Il est allé étudier la musique à Paris. Il ne reviendra jamais
Les habitants de cette petite paisible ville sont toujours sous le choc. Ils n’arrivent toujours pas à croire que Didine, qui est parti à Paris pour étudier sa passion, la musique, ne reviendra jamais…
La nouvelle est tombée tel un couperet samedi dernier à Rouiba! Kheireddine Sahbi que tout le monde appelle «Didine» est le jeune Algérien qui est mort dans les terribles attentats de Paris. C’est le choc dans cette ville paisible de la banlieue est d’Alger. Celui qui est allé à Paris pour étudier sa passion, la musique, ne reviendra jamais!
La horde terroriste l’a enlevé de ce monde emportant avec elle les rêves et les ambitions d’un jeune qui a quitté son pays pour vivre sa passion et faire éclater son talent aux yeux du monde. «Grâce à son talent, il a pu rejoindre la prestigieuse université de la Sorbonne à Paris. Musicien dans l’âme, il était en train de réaliser son rêve: ajouter à son talent la maîtrise de la science de la musique en étudiant l’ethnomusicologie», nous confie les larmes aux yeux, Omar Zemmoul, un de ses amis. «En a peine une année, il s’était très bien intégré. Son talent a été reconnu à sa juste valeur. Il faisait partie d’un groupe de musique classique avec qui il devait donner un concert le 21 novembre prochain. Mais des illuminés qui n’ont rien à voir avec l’islam en ont voulu autrement…», ajoute-t-il avec autant d’émotion. Cette émotion est d’ailleurs ressentie dans toute sa petite ville qui pleure son enfant prodige, sa fierté. Dans son quartier, la cité de l’Inforbat ou dans le reste de Rouiba, on ne croit toujours pas que Didine n’est plus de son monde. Le sourire de ce gentil garçon hante encore les rues et ruelles de Rouiba.
Les habitants se souviennent de celui qui porte bien son nom «Sahbi» en étant l’ami de tout le monde. «Il était toujours là prêt à rendre service. Toujours souriant, il ne s’énervait jamais. Musicien, compositeur, arrangeur musical il faisait le tour du pays pour partager sa passion, en donnant des cours gratuits aux jeunes amoureux de la musique classique», se souvient Fayçal Oulebsir, un autre de ses amis. «On passait de belles soirées à discuter jusqu’à l’aube! On parlait d’avenir, d’espoir et surtout d’ambition. Il est parti trop jeune, mort à Paris loin de nous, emportant avec lui sa joie de vivre et ses espoirs. Quelle terrible nouvelle!», ajouta-t-il encore sous le choc. «C’est un voisin, un vieil ami,un frère qui s’en est allé hier, je ressens une profonde émotion et un désarroi terrible. J’ai une grande pensée pour sa famille et ses amis. C’est un jeune, mort pour être allé étudier en France, mort pour avoir voulu découvrir le monde, mort en laissant derrière lui un chagrin immense et une image d’un ami, d’un fils, d’un voisin plein de vie et de la joie de vivre. Au revoir, adieu», témoigne un de ses voisins.
Khaled avec qui Kheireddine a fréquenté les jeunes catégories du club de basket-ball local, le WAR, est lui dans tous ses états. Il crie sa colère contre la bêtise humaine qui a emporté Didine et 128 autres âmes innocentes.
Ahmed Messaoudène, l’un de ses plus proches amis, quant à lui, ne trouve pas les mots pour exprimer sa tristesse. Il préfère s’isoler quelques minutes pour aller lui écrire un message qu’il espère lui parviendra au Paradis. «Un être cher, un ami de toujours, un ami que la violence et la haine, l’ignorance et la bêtise humaine nous ôtèrent sans crier gare; un frère avec qui j’ai partagé mon enfance, avec qui j’ai grandi, avec qui j’ai fait tous les jours le chemin de l’école, du primaire à la faculté. Un ami d’enfance avec qui j’ai partagé tant de secrets, une complicité comme on ne peut rarement partager avec quelqu’un, un passionné, un garçon ambitieux, plein de convictions, qu’on ne partageait pas souvent mais qui donnaient lieu à d’interminables discussions, avec qui j’ai aussi découvert le monde de la musique, de l’andalou, son monde, à lui, qu’il partageait sans modération», a-t-il écrit dans cette lettre au Paradis… «Ce monde qui l’a conduit à tout quitter pour un avenir, juste un avenir, sans se soucier de sa couleur, duquel il fut privé, parti à la fleur de l’âge les rêves plein la tête, des rêves pleins d’idées, son instrument à la main, comme un artiste. Parti en artiste, pour nous revenir en chansons, en rires, en courage, en pleurs, en larmes en chagrin, on t’aime. Quoi qu’on dise ou qu’on fasse, on ne peut rien y changer, On ne t’oubliera jamais», a-t-il poursuivi, non sans retenir ses larmes. C’est le même chagrin et la même tristesse que l’on retrouve chez une autre de ses amies d’enfance et voisine, Biba. «Repose en paix Didine, tu as été pris à la fleur de l’âge par des monstres sans foi ni loi. Rebi yerrahmek», a-t-elle écrit sur sa page Facebook avant de se mettre en deuil comme d’ailleurs tout Rouiba qui s’est solidarisée avec la famille de la victime, connue pour être les libraires de la ville. Des fous sans foi ni loi ont ainsi assassiné une famille, une ville et un pays tout entier. Kheireddine était trop jeune pour mourir, comme toutes les victimes de cette tragédie. Mais le destin a voulu qu’il tire sa révérence en écoutant sa passion.
Un dernier acte comme celui de tous les maestros….Repose en paix l’artiste!