Des employés de la Direction générale de la Caisse nationale d’assurance sociale (Cnas) ont marqué hier deux heures d’arrêt de travail, de 10 H à 12 00 H, afin de protester contre les conditions de travail, a-t-on constaté sur place.
La goutte qui a fait déborder le vase étant l’instauration de l’émargement digital, jugée contraignante par le personnel, voire carrément irréalisable. En effet, bon nombre d’employés a profité de notre présence sur les lieux pour nous signaler plusieurs dysfonctionnements au niveau de la Cnas.
Il s’agit en premier lieu de l’émargement instauré à 12 et à 13 H, en sus de ceux de 8 H et de 16 H 30. Durant la pausedéjeuner, les employés soutiennent ainsi qu’il est humainement impossible à plusieurs centaines de travailleurs de pointer à midi, puis à 13 heures, alors que le nombre d’appareils prévus à cet effet n’a même pas été augmenté. Mieux, l’article 13 du règlement intérieur de la Cnas, dont nous avons pris connaissance, stipule clairement que le pointage a lieu seulement au début et à la fin de travail.
En outre, certains des employés de la Cnas ont appelé au départ du directeur des ressources humaines, accusé d’abus d’autorité et de recrutements abusifs, entre autres. C’est également lui qui se trouve derrière cette mesure contraignante signalée plus loin dans le texte. Sur le plan matériel, le « bâtiment » qui abrite le siège de la Cnas est vétuste et nécessite des travaux de réfection en urgence.
Il est cocasse de relever ici que la Cnas, sur le plan des infrastructures, donne l’air d’appliquer la règle des deux collèges, puisque les cadres dirigeants et les directeurs centraux occupent une belle bâtisse, dotée de toutes les commodités, alors que le restant du personnel est « parqué » dans des constructions préfabriquées dont la durée de vie ne devrait pas dépasser une vingtaine d’années.
Accompagnés par un groupe d’employés jouant aux guides, nous avons pu constater que le gerflex du parterre est lépreux, les sanitaires en très mauvais état, les climatiseurs à l’arrêt (voire illustrations). La situation générale donne l’air d’être tellement catastrophique que nos sources racontent qu’ils reçoivent très souvent la visite de « charmants » souris et rats. Selon des employés, l’édifice recèlerait de l’amiante, une substance mortelle, officiellement proscrite en Algérie.
En dépit de la bonne santé financière de la Cnas, ses employés ne bénéficient pas non plus de climatiseurs. Ils nous ont indiqué qu’ils étouffent en ce moment des grandes chaleurs, sans compter l’asphyxie endurée durant le Ramadhan.
Par ailleurs, les employés de la Cnas ont fustigé la nouvelle procédure d’indemnité de transport qui exige une déclaration sur l’honneur concernant la distance exacte entre le domicile et le lieu de travail, remettant ainsi en cause les certificats de résidence fournis dans le dossier professionnel, et paraphés par des services relevant carrément de l’autorité du ministre de l’Intérieur.
La direction de la Cnas serait-elle allée jusqu’à contester la bonne foi des services relevant de Daho Ould Kablia luimême ? Interrogé sur le mécontentement de ses employés, le directeur de la Cnas, Choukri Hafed, nous a indiqué que l’instauration de la procédure de l’émargement digital rentre dans le cadre de la modernisation de la Cnas, qui exige un minimum de rigueur durant les heures de travail. Ces appareils sophistiqués sont directement liés au centre de paiement et tout retard ou absence seront sanctionnés selon la loi en vigueur.
En outre, cette mesure va permettre d’affiner les calculs des indemnités mensuelles et trimestrielles ajoutées au salaire brut. Concernant la pausedéjeuner, notre interlocuteur a précisé que le règlement intérieur de la Cnas accorde une pause-déjeuner de seulement 30 minutes. Or, la direction a «charitablement» doublé ce laps de temps. Il y a lieu de s’interroger sur la véracité de ces dires, sachant qu’une pause-déjeuner, aussi bien chez les employeurs privés que publics, varie entre une heure et une heure et demi.
S’agissant des climatiseurs, le DG de la Cnas affirme que tous les bureaux en sont dotés, et incombe donc la faute de leur mauvais fonctionnement aux délestages opérés par la Sonelgaz. Pour ce qui est de la vétusté des locaux, notre interlocuteur a fait état de l’existence d’un projet de reconstruction. Reste à se demander pourquoi il a trainé en longueur, jusqu’à pousser les travailleurs à perdre patience et en appeler aux médias.
De son coté, le président de la Commission nationale de la préparation du congrès de la Fédération des travailleurs de la sécurité sociale, le Dr. Ghalmi Mustapha a estimé que la façon ave laquelle les employés de la direction de la Cnas revendiquent leur droits est anarchique. Selon lui, ces derniers auraient dû d’abord passer par les représentants des travailleurs afin de plaider à mieux leurs revendications.
La position de Ghalmi Mustapha, qui nous a reçus en même temps que le DG de la Cnas, est d’autant plus incompréhensible qu’étant avant tout syndicaliste, il est censé prendre la défense des travailleurs contre leurs employeurs. Cela est d’autant plus vrai que beaucoup de travailleurs, particulièrement excédés, n’excluent pas la possibilité de créer un syndicat autonome si Sidi Saïd ne leur permet pas de choisir librement leurs représentants.
Fawzi Khemili