Djilali Hadjadj sur l’argent mal acquis transféré depuis l’Algérie vers l’étranger : «Les politiques français ont des dossiers entre les mains»

Djilali Hadjadj sur l’argent mal acquis transféré depuis l’Algérie vers l’étranger : «Les politiques français ont des dossiers entre les mains»

C’est l’une des questions qui se posent aujourd’hui pour les autorités algériennes qui ont lancé une vaste opération « mains propres » au lendemain de la chute du président Bouteflika : comment récupérer l’argent des biens mal acquis placés illégalement par des anciens responsables algériens à l’étranger ?

Pays qui renferme le plus de fortunes « des dignitaires corrompus algériens», la France semble être un grand obstacle : ses banques, réputées par leurs complicités avec les réseaux de corruption à l’international, se sont pendant longtemps servies comme un outil de transfert des richesses des dignitaires algériens, a accusé, hier, Djilali Hadjadj, porte-parole de l’Association algérienne de lutte contre la corruption. « À Bercy [le quartier dans lequel est installé le ministère français de l’Économie et des Finances], ils ont un inventaire précis, sur tous les achats avec carte bancaire, et les achats de l’immobilier à Paris ou sur la Côte-d’Azur », a souligné Hadjadj, qui a été l’Invité de la Rédaction, émission de la Chaîne 3 de la Radio nationale.

Mais, il regrette que la France ne s’implique pas trop dans ce sens, voire même, elle utilise ces données pour « faire du chantage ou de la pression ». «Les politiques français ont, entre les mains, des dossiers qui prouvent des crimes économiques commis par des oligarques ou des dignitaires algériens ». Donc, « lors des négociations, si la partie algérienne ne cède pas rapidement, on commence à parler de cela dans les médias », a-t-il critiqué. Le président de l’Association de lutte contre la corruption a accusé les banques françaises installés en Algérie de «faciliter et alimenter les comptes bancaires des dignitaires algériens en France ».

« Les comptes bancaires des dignitaires algériens en France, leur existence et facilitations, ont été facilités par les banques françaises qui se sont installées en Algérie pendant ces 15 dernières années. Des banques françaises connues comme étant impliquées dans la corruption à l’international, qui ont été aidées par la justice américaine », a-t-il révélé. Citant le dossier de la société canadienne, SNC Lavalin, Djilali Hadjadj a invité la justice algérienne de prendre contact avec homologues suisse et canadienne afin d’avoir plus d’informations sur cette affaire ou des responsables ont plaidé coupable devant les tribunaux suisses pour des affaires de corruption dont l’Algérie est concernée. Il a indiqué aussi qu’il est important que l’Algérie signe d’autres conventions. « L’Algérie n’a ratifié que deux conventions sur le crime transnational organisé, et la convention sur les assurés, mais en matière de lutte contre l’évasion fiscale, et lutte contre les paradis fiscaux, l’Algérie n’a pas voulu les ratifier ». Selon lui, cette volonté de restitution, exige que « l’Algérie doit donner des assurances pour les pays concernés pour s’assurer leur collaboration.

« Actuellement l’image de l’Algérie est très mauvaise dans le monde en matière de corruption » a-t-il fait remarquer. Hadjadj, qui s’est félicité de la réouverture de certains dossiers de corruption par la Justice algérienne « à condition que cette réouverture soit totale et les magistrats indépendants », a indiqué que «la récupération de l’argent, nécessite une stratégie et une volonté politiques. Cela prendra du temps. Il faut se rapprocher des gouvernements des pays concernés».

Selon lui, la convention des Nations unies, traite le cas des transferts illégaux des avoirs vers l’étranger. Certes, « ce n’est pas une affaire facile ». « Les pays qui reçoivent ont aussi ratifié ces conventions, mais ne sont pas très chauds pour restituer les avoirs a-t-il mentionné. » La procédure démarre par l’introduction d’une demande de gel de ces avoirs, ensuite les identifier d’où et comment ils sont transférés » a-t-il expliqué.

Hamid Mecheri