Les compléments alimentaires, les produits à base de créatine, les psychotropes ou encore les drogues de soumission se répandent de manière assez inquiétante chez les Algériens ces dernières années.
L’utilisation anarchique ou encore excessive de ces substances peut présenter de nombreux problèmes de santé et risques de surdosage ou d’interaction médicamenteuse notamment en cas de prise inadaptée. Le constat et l’alerte ont été étayés par le chef de service de toxicologie du CHU Ben-Badis de Constantine, le Pr Belmahi Mohamed-Habib.
Intervenant lors de l’émission hebdomadaire du Soir d’Algérie « LSA Directe », présentée par Hakim Laalam, le spécialiste a fait le tour de toutes les substances néfastes sur la santé. Il s’agit donc des compléments alimentaires, des produits à base de créatine, des psychotropes ou encore des drogues de soumission.
Sur ce dernier point, Pr Belmahi affirme que l’utilisation de psychotropes se répand de plus en plus ces dernières années. Au niveau de son service, explique-t-il, « l’on constate qu’il y a énormément d’abus et une utilisation anarchique et intempestive de psychotropes ».
Se disant ne pas savoir les raisons derrière ce phénomène, notamment les drogues de soumission (communément appelées drogues de violeurs), qui ne cesse de prendre de l’ampleur, l’intervenant affirme que cela « touche, non seulement les garçons, mais les filles également ».
À ce propos, il précise que « certaines (filles NDLR) peuvent subir, dans le cadre des fêtes de mariage ou d’anniversaires surtout, des drogues de soumission », alertant que « les chiffres durant ces deux dernières années sont effarants ». Pour faire face à cela, il préconise d’en « parler le plus souvent possible, dans les écoles et pas uniquement durant les journées spécifiques comme celle de la toxicomanie ».
43% des Algériens consommaient les compléments alimentaires en 2020
Abordant la question de la consommation des compléments alimentaires, le Pr Belmahi indique que leur utilisation à visée amincissante, antistress, revitalisante ou destinée aux sportifs, parait souvent anodine. Or, cela peut exposer le consommateur à des risques sanitaires graves dans certains cas.
Dans ce sillage, le spécialiste cite une étude comparative menée par des étudiants en fin de cycle du département de pharmacie de la Faculté de médecine de Constantine. Selon cette étude, en 2015, la consommation des compléments alimentaires était de 11% parmi les Algériens. En 2020, 43% d’entre eux en prenaient.
Dans les détails de cette étude, l’intervenant affirme que le pourcentage des femmes accros à ces produits était plus important que celui des hommes, avec respectivement 22 et 14%. Pour ce qui est de la consommation des compléments par les tranches d’âge, il explique que ceuux de 17 à 25 ans prennent ces additifs avant et pendant les examens.
Concernant la catégorie des 15 à 35 ans, la consommation est élevée en été, car il s’agit « d’apports pour le développement de la condition physique ». Concernant les + 55 ans, ils consomment plus de denrées alimentaires en hiver pour leur immunité, en l’occurrence le zinc, le magnésium et la vitamine D », explique encore le même intervenant.
« Les produits à base de créatine contiennent plus de 50% d’impuretés »
Toujours dans le contexte de la consommation excessive des substances et leur conformité, l’invité de « LSA Direct » ajoute que « certaines molécules utilisées comme antistress à base de Garcinia interdites aux USA en 2009 et en France en 2012 sont toujours commercialisées en Algérie ».
Pis encore, il révèle que la multiplication des spots publicitaires pour les denrées alimentaires peut accroitre la consommation de ces produits à base de substances. À ce propos, il fait état d’un flou en matière de limites juridiques entre médicaments et compléments alimentaires.
Citant l’exemple des produits utilisés dans les salles de fitness et de musculation, il souligne qu’ils sont à base de créatine et donc contiennent plus de 50% d’impuretés.
« La créatine du commerce, vendue sous forme de poudre soluble ou semi-soluble, en comprimés, en gaufrettes ou sous forme liquide, est un dérivé synthétique résultant d’une réaction chimique entre la sarcosine de sodium et la cyanamide », a-t-il expliqué à ce propos.
Concernant les dangers de ces substances, le spécialiste en toxicologie précise qu’elles « peuvent engendrer des risques de cardiotoxicité et de néphrotoxicité ». À titre d’exemple, il indique que « la prise de 25 g de créatine par jour est équivalente à l’ingestion de 4 à 5 kg de viande, ce qui constitue en soi un apport protéique considérable ».