Eclairage – Cancer du sein : l’autopalpation en question

Eclairage – Cancer du sein : l’autopalpation en question

SANTÉ

Depuis de nombreuses années, médecins et gynécologues encouragent leurs patientes à pratiquer des autopalpations de leurs seins chaque mois pour tenter de déceler un éventuel cancer du sein. Une pratique remise en cause car jugée « stressante » et « peu performante » par plusieurs experts. MYTF1News fait le point.

Une femme sur huit sera concernée par le cancer du sein dans sa vie. Depuis 2004, les femmes de 50 à 74 ans sont invitées à réaliser gratuitement une mammographie ainsi qu’un examen clinique tous les deux ans. Ce n’est pourtant pas le seul axe de prévention. Elles peuvent également réaliser une autopalpation afin de détecter une éventuelle anomalie.

L’intérêt de l’autopalpation

« Détecté à un stade précoce, le cancer du sein peut non seulement être guéri dans neuf cas sur dix, mais aussi être soigné par des traitements moins agressifs, moins mutilants ou entraînant moins de séquelles », rappelle Agnès Buzyn, présidente de l’Institut national du cancer, à l’occasion d’Octobre rose, mois de mobilisation contre le cancer du sein. L’autopalpation permettrait donc de détecter de manière précoce un éventuel cancer. « A partir de 25 ans, les femmes devraient commencer à s’examiner les seins comme elles le font avec leurs grains de beauté par exemple », explique la gynécologue Elisabeth Paganell au site de l’Express.

Au cours des dernières années, cette méthode s’est largement généralisée. A la fin du mois de septembre, une application pratique d’autodépistage du cancer du sein a même vu le jour. Commercialisée par la fondation Keep a breast, « Check Yourself » – c’est le nom de l’application – décrit aux femmes les différentes étapes d’un autoexamen de la poitrine. Elle permet aussi, entre autres, de programmer des rappels mensuels pour ne pas oublier de les réaliser.

Une pratique controversée

Pourtant, de plus en plus de praticiens critiquent cet examen. « Il y a une promotion de l’autopalpation dans certains pays où il n’y a pas de dépistage organisé », explique ainsi à MYTF1News le Dr Artus Albessard, médecin coordonnateur et directeur de DOC 31, structure en charge du dépistage organisé des cancers (sein et colon). « Mais en France, il est possible pour une femme de plus de 50 ans de se faire dépister gratuitement à l’aide d’appareils de mammographie bien plus performants – entre 75% et 80% des cancers du sein surviennent après 50 ans ». Le spécialiste va même plus loin en affirmant que la sensibilité de l’autopalpation est « assez médiocre et que ses résultats sont peu performants ».

« Ces autoexamens peuvent rapidement devenir générateurs d’angoisses », ajoute le Dr Catherine Exbrayat, médecin en charge du programme de dépistage du cancer du sein à l’office de lutte contre le cancer en Isère. « Cela peut même se transformer en cauchemar », abonde le Dr Artus Albessard. « Car tous les mois, des boules ou des amas cellulaires apparaissent, notamment en période de règles. » « Ce qu’on recommande aux femmes c’est d’être attentives aux changements », conclut le Dr Catherine Exbrayat.

Quelles alternatives ?

Avant 50 ans, il n’est pas conseillé de se faire dépister. « Excepté en cas d’antécédents familiaux ou de prédispositions génétiques », explique le Dr Brigitte Seradour, ancienne présidente de la Société française de sénologie et de la pathologie mammaire (SFSPM) et chargée du programme de dépistage national jusqu’en 2010. De plus, « entre 75 et 80% des cancers du sein ne surviennent qu’après 50 ans », ajoute le Dr Artus Albessard. Le médecin généraliste ou le gynécologue peut cependant réaliser ponctuellement une palpation afin de repérer une éventuelle anomalie.

Après 50 ans et avant 74 ans, le programme de dépistage organisé, mis en place en 2004 sur le territoire français, permet aux femmes qui le souhaitent de bénéficier gratuitement d’une mammographie et d’un examen clinique des seins deux fois par an. « Mais en France, seules 52% des femmes de plus de 50 ans se font dépister dans le cadre de ce programme », déplore le Dr Artus Albessard. Créé il y a dix ans, le dispositif a permis à 22 millions de Françaises de 50 à 74 ans d’effectuer une mammographie de contrôle et de diagnostiquer 150.000 cancers.