Economie des zones frontalières : Eloges du troc… et de ses avantages

Economie des zones frontalières : Eloges du troc… et de ses avantages

En mars 2017, une nouvelle association patronale voyait le jour pour défendre les intérêts des opérateurs ayant des liens d’affaires avec les pays d’Afrique de l’Ouest.

Cette association a pour nom l’« observatoire des opérateurs économiques et des hommes d’affaires algériens en Afrique de l’Ouest ». Elle est constituée d’une cinquantaine d’opérateurs économiques nationaux en activité dans cette partie du continent africain. Elle a pour président Mohamed Dahaj.

« La création de cette structure est d’intensifier les échanges commerciaux et économiques entre notre pays et différents autres pays de l’Afrique de l’Ouest », a déclaré M. Dahaj dans un entretien avec l’APS. « L’objectif de la démarche est de promouvoir les

différents produits industriels, agricoles ou d’élevage algériens auprès d’opérateurs et entreprises économiques de ces pays africains », a-t-il ajouté. Six mois plus tard, l’Observatoire, qui signe sa première initiative publique depuis sa création, revient à la charge. A Béchar, lors d’une rencontre organisée lundi dernier par ses membres sous l’union des commerçants, UGCAA, l’association a appelé à la révision de la législation algérienne relative au troc frontalier. Elle a souhaité que la liste des produits et marchandises éligibles à cette activité commerciale et économique, limitée pour l’instant aux produis alimentaires et agroalimentaires, soit élargie aux produits industriels. « Le développement du commerce de troc frontalier en Algérie, et plus particulièrement dans quatre wilayas du sud (Adrar, Tindouf, Tamanrasset et Illizi), est conditionné par la révision des textes de loi régissant cette activité qui représente un intérêt pour le développement économique de ces régions », a déclaré lundi dernier son président, Mohamed Dahaj. « Nous devons nécessairement élargir la liste des produits et des marchandises destinés au troc aux diverses autres productions industrielles nationales et ne pas la limiter, comme c’est le cas actuellement, à des produits agro-alimentaires », a-t-il précisé. Actuellement, le troc frontalier avec ces pays se limite aux pâtes alimentaires, fruits et légumes, quincaillerie, produits de l’entreprise nationale Naftal (graisses et huiles), quelques matériaux de construction, tabacs locaux et quelques produits électroménagers, alors que des pays de l’Afrique de l’Ouest ont acheminé, au titre du troc frontalier, des mangues, des bananes, du café et ses produits dérivés (nescafé), des épices, du henné, des arachides et autres produits du genre, a-t-il expliqué.

Une revendication ancienne

« Le troc international qui se fait actuellement entre l’Algérie, le Mali et le Niger, doit être élargi à des produits industriels, et ce, dans le cadre d’une étroite coordination entre les services des Douanes, des impôts et du commerce de chaque wilaya du Sud concernée dans la perspective de l’ouverture de nouvelles perspectives commerciales et économiques aux entreprises et unités de production implantées à travers ces wilayas du Sud, a souhaité M. Dahaj.

La Fédération nationale des importateurs et exportateurs algériens (FNIE), présente à la rencontre de Béchar, soutient les propositions formulées par le président de l’Observatoire « surtout pour le développement économique et social des zones frontalières de ces pays, pour mettre un terme aux différentes activités de contrebande et contribuer au bien-être des populations, a indiqué, pour sa part, son représentant, Mohamed Hassani. L’initiative de l’Observatoire des opérateurs et hommes d’affaires algériens en Afrique de l’Ouest de mobiliser ses membres pour élargir la liste des produits éligibles au troc – une activité concentrée essentiellement au niveau des frontières avec le Mali et le Niger – est une première. La revendication qu’il porte est cependant ancienne.

En 2012, pour ne remonter qu’à cette année, une importante rencontre appelant à encourager le commerce du troc par l’élargissement des produits éligibles à cette activité a eu lieu à Tamanrasset. C’était avant la création de l’Observatoire, mais certains de ses membres actuels étaient présents à l’initiative – un séminaire – ayant lieu dans la capitale du Hoggar algérien.

Il y a cinq ans, les opérateurs intéressés mettaient également en exergue la nécessité d’une révision des textes de loi afin d’encourager l’activité économique et commerciale dans des zones frontalières souvent déclassées économiquement et lutter contre la contrebande. L’une des recommandations de l’époque, rappelle-t-on, est de donner aux walis territorialement compétents le droit d’étendre la liste des marchandises autorisées au troc selon les besoins de sa région. Depuis cette date rien de nouveau ne s’est véritablement produit. La raison, selon des sources douanières, est la recherche actuelle des meilleurs moyens d’organiser l’activité du troc menacée à la fois par l’insécurité et ses conséquences et par le risque qu’elle ne déborde hors des wilayas frontalières, ce qui porterait atteinte à sa vocation première.

Les opérateurs habilités à faire le commerce du troc, rappelle-t-on, également, sont soumis à la réglementation en qualité de grossistes résidant dans les wilayas frontalières et doivent obligatoirement disposer des infrastructures de stockage et des moyens de transport. En plus de toutes ces conditions, les troqueurs doivent être repris sur la liste fixée par un arrêté du wali compétent. Autre raison : la modestie des marchés du troc. Les produits recensés par les Douanes algériennes sont les variétés de datte sèche, destinées principalement aux marchés malien et nigérien à des valeurs n’excédant pas les 30 millions de dinars – ce qui est dérisoire -, ainsi que les produits animaliers (l’ovin, le bovin, le camelin et le caprin). Ceux-là sont souvent importés du Niger pour des valeurs ne dépassant pas les 40 millions de dinars, selon des estimations de 2013.

Si les chiffres sur le troc aux frontières demeurent difficiles à vérifier en l’absence d’outils d’analyse et d’observations « à jour » de l’activité du troc, les commentaires à son propos sont presque tous mitigés et la présente comme une activité certes importante pour les populations concernées mais marginales. On suppose alors que la mobilisation nouvelle des membres de l’Observatoire pour que les produits qui les concernent soient revus à la hausse et touchent la manufacture par exemple répond à des intérêts particuliers. Certains peuvent être compris au rappel important selon lequel le troc bénéficie d’avantages importants, dont l’exonération totale des droits et taxes et la dispense de toutes les formalités relatives au commerce extérieur.