O. HIND
Plus de 200 dessins ont été réalisés durant 3 mois et qui témoignent d’une saisissante lucidité de ces enfants quant à l’actualité de leur pays…
Elle est artiste et enseignante en arts plastiques. Elle s’appelle Fatima Chafaâ. Durant plusieurs semaines, elle a patiemment encadré un workshop autour du thème «El Hirak». Le résultat est plutôt bluffant. Saisissant ! Des dessins qui témoignent d’une si belle lucidité et une maturité à toute épreuve chez ces enfants. Notons ceux de Aïn Benian avec une collecte de 200 dessins issus de l’imaginaire d’enfants dont l’âge varie entre 10 ans et 16 ans. Un travail qu’elle a réalisé durant les mois de mars, avril, mai et ce, dans les différents quartiers de La Fontaine, la Madrague, Coopemad, quartier L’îlot, celui de l’ancien village, la Cité Belle vue, le quartier la Forêt, celui Gambetta, la cité Française et enfin au quartier Plateau.
Des enfants doués
Un résultat stupéfiant qui fait montre des marches hebdomadaires en masse du peuple, de ses revendications sociopolitiques avec des dessins simples, parfois naïfs, mais si éloquents dans l’ensemble ce qui en dit long sur leur conscience de l’actualité qui prévaut dans leur pays malgré leur jeune âge… Interrogée sur le formidable travail et magnifiques exercice pédagogique qu’elle a entrepris patiemment courant ces workshops l’artiste plasticienne Fatima Chafaâ nous confie : «Le Hirak est tellement beau qu’on ne veut pas qu’il soit récupéré comme toute belle chose en Algérie, on voulait que ces enfants et jeunes adolescents comprennent grâce à ce Hirak qu’il est possible de se révolter, de marcher pour leur honneur, grâce à l’unification on peut vivre dans une Algérie meilleure. Je me sentais responsable vis-à-vis de ces enfants, je crois même à l’idée que nos enfants sont notre espoir.» A propos de sa démarche plastique, l’enseignante explique qu’elle voulait «impliquer les enfants et les jeunes adolescents de toutes les classes sociales et les quartiers les plus populaires de ma ville natale Aïn Benian.» Et d’ajouter : «Le lieu propice pour ce workshop est l’école publique. J’ai commencé à contacter les écoles, j’ai eu carte blanche à condition de respecter le règlement intérieur des écoles (ne pas prendre les enfants en photos ou en vidéo) .
Expression et créativité
Pendant le workshop, la chose la plus importante était d’établir la confiance des enfants en commençant par les écouter, leur faire confiance et parvenir à les comprendre.
Il y a eu un échange sur le Hirak la cause, l’objectif et son avenir. La deuxième étape était de les emmener à exprimer leur vision par le dessin. Chose qui n’était pas très évidente car pour certains enfants il n’était pas donné à tout le monde de savoir dessiner, Il fallait leur assurer que tout être peut dessiner avant même de savoir écrire. Même une Tkharbicha est un dessin. Ils ont eu confiance en eux-mêmes et les plus réticents sont parvenus à s’exprimer. Ils étaient eux même surpris.» L’autre démarche à laquelle Fatima Chafaâ a fait appel, consistait aussi à «laisser les enfants et jeunes adolescents choisir eux-mêmes leurs matériels. Beaucoup d’enfants et jeunes adolescents ont une phobie de la feuille blanche et le crayon».
Ainsi, nous apprend-on, la durée de ces ateliers ne dépassait pas les 2 heures car afin d’éviter que ces enfants ne se lassent… «Pour moi, la chose la plus importante était leur spontanéité» et de faire remarquer avec acuitté : «Pendant longtemps on a parlé d’une génération de téléphone et de tablette qui ne s’intéresse en aucun cas à ce qui les entoure, mais ils ont prouvé tout le contraire par leurs dessins… On voit que leur conscience est égale à celle des adultes», reconnaît volontiers Fatima Chafaâ enthousiaste et satisfaite du bon travail accompli. Et de conclure avec joie :
« La plus belle chose que j’ai pu tenir de ces workshops est qu’avec une génération pareille, ils ne pourront jamais nous enlever notre Algérie. » Enfin, fait –elle savoir, ce workshop comporte près de 200 dessins qui seront présentés sous forme de vidéo, et ainsi qu’une publication. O.H.