Des affrontements ont éclaté dans la nuit de samedi à dimanche dans la ville d’Annaba entre les forces de l’ordre et des centaines de jeunes marchands ambulants. Une vingtaine de manifestants ont été arrêtés par la police, à l’issue d’une course-poursuite qui a duré jusqu’à une heure tardive de la nuit.
A l’origine des émeutes qui se sont déclenchées juste après le ftour, selon des sources locales, une opération de délogement menée par la police contre les vendeurs informels, installés tout le long de la rue Ibn Khaldoun, jusqu’au marché. Révoltés, les jeunes se sont mis à saccager des magasins, des édifices publics et même à s’attaquer au commissariat du 9e arrondissement. Une véritable scène de bataille qui a poussé les responsables locaux de la sécurité à déployer les éléments antiémeute. Ces derniers qui ont eu recours aux bombes lacrymogènes ont procédé à plusieurs arrestations.
En ce mois de Ramadhan, pourtant ce n’est pas la première fois que des heurts sont enregistrées, alimentant des doutes sur les tenants et aboutissants de leur caractère répétitif.
Dans la nuit du 14 juin dernier, les forces de police de Larbâa Nath Irathen, à l’est de la ville de Tizi Ouzou, ont utilisé des balles en caoutchouc pour disperser des militants du MAK qui s’apprêtaient à tenir un rassemblement, commémorant l’historique marche du 14 juin 2001 à Alger. Les émeutes ont vite éclaté, faisant une dizaine d’arrestations. Mais, paradoxalement, la police n’avait pas pour habitude d’intervenir dans ce genre de rassemblement pacifique.
Les habitants étaient d’ailleurs surpris de la répression qu’ont subi les jeunes du MAK, même s’ils ne partageaient pas leurs idées. Une scène presque similaire s’est reproduite, hier, lorsqu’un rassemblement des habitants du village Tifilkout, devant la le siège de daïra d’Iferhounen, toujours à l’est de Tizi Ouzou, a été réprimé. Du jamais vu jusqu’à présent, puisque des dizaines d’actions similaires sont organisées en Kabylie et ailleurs sans qu’elles soient réprimées. Les manifestants se dispersent dans le calme à la fin de l’action.
Veut-on alors souffler sur la braise ? Les interrogations, conjuguées au contexte sociopolitique actuel que connaît le pays, ont de solides arguments. La détérioration du pouvoir d’achat des Algériens, affaiblis par plus de taxes et des augmentations tout azimut, est confrontée à la détermination du gouvernement à fixer l’âge de la retraite à 60 ans et à ne plus ajouter ne serait-ce qu’un centime aux salaires des fonctionnaires. De leur côté, les syndicats autonomes, plus représentatifs que la centrale syndicale UGTA, promettent une réplique «forte», menaçant de paralyser plusieurs secteurs sensibles, tels que l’éducation, la santé et l’administration publique. Ajouté à ce climat de tension sociale, le contexte politique qui semble s’accélérer avec une pléiade de lois soumises «en urgence» à l’APN pour adoption. Des textes violemment critiqués et rejetés par l’opposition qui redoute un «plan» en élaboration pour l’après-Bouteflika. D’où les craintes de ces émeutes qui risquent à tout moment de constituer l’étincelle à un mouvement plus large et violent, surtout que les tentatives de récupération des foules en ces temps de démission totale du citoyen de la chose politique, sont monnaie courante.