«Il faut arrêter avec les concepts de joueur local et émigré, seule la compétence compte»
Sur le banc de Lakhouia depuis peu, Djamel Belmadi arbore fièrement sa nouvelle casquette d’entraîneur. Fait pour ce métier, il dirige son équipe d’une main de maître. Pour une reconversion, c’est une réussite, du moins pour le moment. Fort de son expérience d’ancien international, Djamel Belmadi nous parle avec passion de la sélection. Il commente son actualité, avec un recul empreint de neutralité.
Parlez-nous d’abord, si vous le voulez bien, de votre expérience sur le banc de Lakhouia ?
Je suis satisfait de mes débuts. C’est une nouvelle aventure qui commence. Un défi que j’avais envie de relever. Pour le moment, je suis très content de l’évolution des choses.
Ça se passe plutôt bien. J’éprouve beaucoup de plaisir à faire ce métier. Je m’y plaîs vraiment beaucoup. Je suis nouveau dans le métier, mais l’envie de me faire un nom dans le milieu me pousse à me transcender. En somme, c’est une expérience très excitante.
Etes-vous satisfait du rendement de votre équipe jusqu’à maintenant ?
Pas à 100 %. Seulement, je ressens de l’amélioration au quotidien. Les garçons sont très attentifs. Ils restent à l’écoute de ce qu’on leur dit et ceci est primordial. Après, il va falloir être patient. Les résultats ne viennent qu’avec le travail. On ne devient pas une super équipe du jour au lendemain. C’est plutôt un processus de longue haleine qui est en train de se mettre en place. Nous espérons recueillir le fruit de nos sacrifices bientôt.
Ressentez-vous de la pression autour de vous, peut-être de la part des dirigeants qui voudraient des résultats ?
Non ! Non ! Il est de ma nature de travailler dans la sérénité. Il n’y a jamais eu de pression dans ce sens-là. La seule pression que l’on ressent, c’est celle de la compétition. L’excitation qui grandit à l’approche d’un match. L’ambition, l’envie de bien négocier les échéances, c’est tout. En gros, la pression du métier, sans plus.
Comment trouvez-vous le niveau du championnat qatari ?
Il n’est pas facile, contrairement à ce que peuvent croire certains. La compétition est plutôt relevée.
Il y a beaucoup de joueurs de très haut niveau. Ils en ont l’expérience requise. Le fait d’avoir attiré des joueurs comme Baky Koné, Kader Keita, Belhadj, Mansouri ou encore les deux Sud-Coréens est révélateur de la valeur du championnat. Ça le médiatise un peu plus, aussi. J’ai déjà été joueur ici et je sais pertinemment que pour remporter un trophée, il faut être très costaud.
Parlons maintenant, si vous le souhaitez, de la sélection algérienne et de la démission de Rabah Saâdane, pensez-vous que ce départ était opportun ?
Personnellement, je continue à croire qu’il aurait dû partir juste après le Mondial. Bien que le bilan de l’Algérie en Afrique du Sud ne soit pas un succès, il serait, néanmoins, parti sur une bonne note. Là, il y a un arrière-goût d’échec. Je suis désolé de la manière dont il a été écarté.
Je crois que le fossé a grandi après les deux échecs face au Gabon et à la Tanzanie. Tout le monde attendait une meilleure production de la part du groupe, après l’expérience sud-africaine, mais c’est le contraire qui s’était produit. Après, il était difficile de voir les différentes parties cohabiter. Quelqu’un devait trinquer et dans pareil cas, c’est toujours le coach qui paye les pots cassés. Dommage !
Pensez-vous que l’équipe était capable de passer au second tour du Mondial ?
Absolument. On en avait les moyens, c’est certain. Il y avait un groupe costaud. Il y avait du talent, de la jeunesse et de l’expérience. Le problème à mon avis est qu’on n’y a pas cru vraiment.
Tout s’est joué face à la Slovénie. On les a respectés un peu trop. Ce n’est qu’après notre match nul face à l’Angleterre qu’on s’était dit : «Waou ! Finalement, on n’est pas si mal que ça !» Mais à ce moment-là, on avait déjà perdu trois points qui étaient largement à notre portée. Dommage ! J’avais l’impression que les garçons ont abordé ce tournoi avec suffisance. Certes, ils ont réussi l’exploit de qualifier l’équipe, mais ils auraient pu chercher d’autres succès au lieu de dormir sur leurs lauriers.
A qui, selon vous, incombe la responsabilité des deux échecs face au Gabon et à la Tanzanie ?
A tout le monde ! Je m’attendais à voir un groupe plus fort, plus aguerri. Je pense sincèrement que les garçons allaient mûrir davantage après une telle expérience, mais c’est le contraire qui s’est produit.
J’ai été frappé par le niveau de jeu de l’équipe. Les garçons ont continué à jouer avec suffisance. Il fallait continuer à bosser pour être encore plus fort, mais finalement c’est le contraire qui s’est produit. Il y avait de la suffisance. Pas assez d’envie à mon avis pour aller de l’avant.
Beaucoup a été dit sur la composante de la sélection et l’opportunité ou non d’intégrer des joueurs locaux, qu’en pensez-vous ?
Ça a toujours été d’actualité. Je me souviens que cette question m’a été posée plusieurs fois lorsque j’étais joueur. Je ne comprends toujours pas l’utilité d’un tel débat. A ce que je sache, ceux qui jouent actuellement en sélection sont des Algériens ! Ils méritent donc tout notre respect. Il faudrait, à mon avis, arrêter avec ça et laisser le sélectionneur choisir seul les joueurs qu’il pense capables de défendre les couleurs nationales.
L’essentiel est d’avoir des éléments de classe mondiale. Peu importe leur provenance du moment qu’ils sont Algériens. La sélection a besoin de joueurs de haut niveau. Des joueurs qui évoluent dans les plus grands championnats, c’est important…
Est-ce à dire pour autant que ceux qui évoluent dans le championnat algérien n’ont pas le niveau pour prétendre intégrer la sélection ?
Je n’ai jamais dit ça. Je me demande seulement à quoi sert cette polémique. Lequel des deux championnats est le plus relevé, l’Européen ou l’Algérien ? Incontestablement, le championnat européen. La sélection a besoin de joueurs de classe mondiale. Je ne dis pas que les locaux n’ont pas leur place. Loin s’en faut. Je veux juste dire qu’il faudrait sélectionner les joueurs pour leurs qualités intrinsèques et non pour le nom du championnat où ils jouent.
Que faut-il à l’équipe pour progresser ?
Que les joueurs continuent à travailler. Il faut oublier les exploits passés. Il faut mettre en place une stratégie de travail à même d’élever le niveau du championnat local et par ricochet celui de la sélection.
Il faut une vraie stratégie de travail. La fédération a une part de responsabilité dans ce qui s’est passé. Il faut mettre fin à ce laxisme et montrer plus de fermeté dans ce que l’on fait, car finalement, le joueur s’adapte au milieu dans lequel il se trouve. S’il y a de la rigueur, de la discipline, il s’y soumettra, faute de quoi, il se retrouvera sur la touche. C’est comme ça que ça marche, pas autrement.
Etes-vous pour la nomination d’un entraîneur local ou étranger à la tête de la sélection ?
Je ne suis ni pour l’un ni pour l’autre. L’important est qu’il soit compétent. Je ne connais pas personnellement M. Benchikha pour que je puisse émettre un avis, mais je lui souhaite de tout cœur toute la réussite dont il aura besoin dans sa mission.
Comment voyez-vous cette deuxième sortie des Verts dans ces qualifications à la CAN 2012 ?
Wait and see ! J’attends de voir. Le football n’est pas une science exacte. Ce que je sais, c’est qu’il y a un objectif à atteindre et il faudra par conséquent mettre tous les atouts de son côté pour aller au bout.