Les bases militaires ukrainiennes de CrimĂ©e sont dĂ©gagĂ©es une Ă une. Vendredi 21 mars, la signature par le prĂ©sident russe Vladimir Poutine de la loi formalisant l’appartenance de la CrimĂ©e Ă la Russie, en dĂ©pit du renforcement des sanctions amĂ©ricaines et europĂ©ennes, a achevĂ© de libĂ©rer dans la pĂ©ninsule russophone les forces armĂ©es et les civils prorusses qui se retenaient d’agir.
La foule s’est dirigĂ©e Ă l’intĂ©rieur de la base jusqu’Ă l’immeuble oĂą s’Ă©taient retranchĂ©s les soldats ukrainiens. Une dizaine d’entre eux guettaient sur le toit. La foule, de plus en plus hystĂ©rique, s’est prĂ©cipitĂ©e en criant, cassant les vitres, crevant les pneus, escaladant un camion stationnĂ© Ă l’entrĂ©e avant d’essayer, en vain, de le faire tomber. Ils ont commencĂ© Ă Â vider le mobilier du rez-de-chaussĂ©e en dĂ©molissant ce qu’ils pouvaient.
Les soldats ukrainiens tentaient de les calmer, du haut du toit, avec un mégaphone.
Les Ă©chauffourĂ©es ont commencĂ© aussi parmi la foule entre prorusses et pro-ukrainiens, proches de soldats coincĂ©s Ă l’intĂ©rieur. Ils s’invectivaient et hurlaient en pleurant. Des fumigènes ont Ă©tĂ© lancĂ©s, calmant l’assemblĂ©e pour un moment.
L’excitation a repris peu après avec l’arrivĂ©e d’un drapeau russe triomphalement arborĂ© devant l’immeuble. « Rassia ! Rassia ! », le mĂŞme mot tournait en boucle. Et aussi, Ă l’adresse des soldats : « Ordures ! Salauds ! Fascistes ! Rentrez chezvous ! ». A l’adresse des quelques journalistes prĂ©sents : « Sales menteurs ! La CrimĂ©e est Ă la Russie, allez-vous-en ! »
Des militaires russes ont fini par pĂ©nĂ©trer dans l’immeuble puis convaincu la foule en furie de sortir calmement de la base. Tout le monde a obĂ©i, soudain Ă©trangement docile, dans un mĂŞme mouvement moutonnier. Le groupe s’est postĂ© Ă l’entrĂ©e, devant le portail ouvert. Un ancien militaire russe en civil, ayant visiblement autoritĂ© sur les villageois, leur a intimĂ© l’ordre de ne pas dire un mot, de ne profĂ©rer aucune insulte. Sur ce, les militaires ukrainiens, quelques dizaines, sont sortis Ă pied par petits groupes. La foule observait un silence contraint. Certains, ne peuvant cacher leur joie, ont applaudi.
Quelques heures plus tard, c’est la base aĂ©rienne de Belbek, près de SĂ©bastopol, qui Ă©tait prise d’assaut. Pas par une foule de civils mais par des blindĂ©s russes qui ont dĂ©foncĂ© le portail, alors que les soldats ukrainiens avaient refusĂ© de se plier à l’ultimatum qui leur avait Ă©tĂ© lancĂ© une heure plus tĂ´t. A la suite des blindĂ©s, des troupes d’Ă©lite russes Ă©quipĂ©es de casques et d’armes automatiques sont entrĂ©es, tirant des coups de feu en l’air. Une ambulance a Ă©tĂ© vue. Selon la BBC, au moins un militaire a Ă©tĂ© blessĂ©.
Comme le matin Ă Novofedorivka, les soldats ukrainiens ont fini par quitter leur base Ă pied, devant une foule de badauds contrainte au silence par divers agents prorusses. D’après les uniformes : civils en costume, miliciens cagoulĂ©s, militaires russes. Le colonel Iouly Mamtchour, commandant de la base, a Ă©tĂ© arrĂŞtĂ© et emmenĂ©.