Abdel-Fattah al-Sissi bénéficie jusqu’à maintenant du soutien des capitales occidentales et de ses alliés du Golfe, mais son pouvoir est sur le fil du rasoir et son entêtement à gouverner par la terreur pourrait engendrer le chaos en Égypte.
De nouvelles manifestations nocturnes ont eu lieu dans la nuit de samedi à hier dans le gouvernorat de Suez, en Égypte, où le régime de Abdel-Fattah al-Sissi a arrêté plus de 2000 manifestants en une semaine de contestation, selon les ONG de défense des droits de l’homme. Malgré la répression qui s’est abattue sur les opposants, les Égyptiens ne semblent pas avoir l’intention de reculer, à travers ces manifestations nocturnes qui durent depuis une dizaine de jours. Samedi soir, les autorités ont déployé un impressionnant dispositif policier à la place Ramsès pour empêcher les manifestants de s’y rassembler, à l’appel de l’acteur et entrepreneur Mohammad Ali, exilé en Espagne, et à l’origine de ce nouveau souffle de la révolution égyptienne contre le pouvoir militaire.
Le régime d’al-Sissi a imposé également des restrictions sur l’usage d’internet pour éviter la propagation des manifestations le dénonçant. Parallèlement, les autorités continuent d’interpeller tous ceux qui alimentent la résistance populaire et animent les contestations, que ce soit sur les réseaux sociaux ou sur le terrain. La dernière en date est celle qui a visé le militant politique égyptien Alaa Abdel-Fattah, figure de la révolte de 2011 en Égypte, libéré récemment sous contrôle judiciaire.
Il a été de nouveau emprisonné, a indiqué hier sa famille. “Nous ne savons pas où est Alaa (…) Le poste de police dit qu’il est probablement au parquet de la sécurité d’État”, a déclaré sur twitter sa sœur Mona Seif, également militante politique. Abdel-Fattah, 37 ans, avait été arrêté en 2013 après avoir manifesté contre une loi rendant quasi impossibles les manifestations en Égypte. Il a été libéré en mars dernier mais astreint à un strict contrôle judiciaire de cinq ans. L’activiste avait déjà exprimé en juin dernier ses craintes d’être remis en détention.
Surnommé “l’icône de la révolution” de 2011, qui a provoqué la chute du régime de Hosni Moubarak, Alaa Abdel-Fattah avait continué de s’exprimer sur les réseaux sociaux, sous le gouvernement du président Abdel-Fattah al-Sissi. S’abritant derrière la lutte contre le terrorisme, le président al-Sissi place en détention systématique tous ses opposants parmi les islamistes, les démocrates et les militants agissants au sein des organisations de la société civile ou des syndicats. Depuis son arrivée au pouvoir, en juillet 2013, de nombreuses disparitions de militants ont été signalées, sans compter les centaines d’arrestations arbitraires que les autorités continuent de nier ou de justifier.
Vendredi, la haute-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, s’est déclarée gravement préoccupée par les reportages faisant état d’un “manque de procédure régulière à la suite d’arrestations liées aux manifestations en Égypte”, et a exhorté les autorités égyptiennes à “respecter le droit à la liberté de l’expression et de l’assemblement pacifique dans le plein respect des critères et normes internationales”. Dans une déclaration, elle a exhorté les autorités égyptiennes à changer radicalement leur approche à l’égard de toute future manifestation.
Lyès Menacer