INTERNATIONAL – Les disparitions d’Egyptiens vivant dans les grandes villes se sont multipliées ces derniers mois. Un rapport publié fin août de l’ONG Commission égyptienne des droits et des libertés (ECRF) chiffrait à 1500 les disparitions forcées depuis le début de l’année 2015.
Ce dénombrement est venu étayer un rapport d’Amnesty international publié en juillet qui donnait force détails sur le phénomène.
Parmi les victimes, des adolescents de 14 ans
« L’agence nationale de sécurité égyptienne (NSA) enlève des personnes et les soumet à la torture et à une disparition forcée afin d’intimider les opposants et d’éliminer la contestation pacifique, écrit l’ONG, (…) des centaines d’étudiants, de militants politiques et de protestataires, parmi lesquels figurent des adolescents âgés de 14 ans seulement, ont disparu aux mains de l’État, sans laisser de traces ».
Toujours selon Amnesty qui cite des associations locales, trois ou quatre personnes en moyenne sont capturées chaque jour.
Selon l’un des directeurs de l’ONG dans la région, « le rapport montre non seulement que les personnes soumises à une disparition subissent de graves violences, mais aussi que les forces de sécurité agissent en collusion avec les autorités judiciaires égyptiennes, qui sont disposées à mentir pour couvrir leurs agissements ou qui s’abstiennent d’enquêter sur les allégations de torture, se rendant ainsi complices de graves violations des droits humains. »
Un seul code pour envoyer 3 SMS et son emplacement
Afin d’enrayer cette épidémie de disparitions, l’une des associations qui défend les familles de victimes, l’ONG locale ECRF a créé une application pour smartphones qui permet à la victime de signaler où elle se trouve. Elle s’appelle I Protect et est disponible sur Androïd.
Concrètement, les utilisateurs de téléphone, quand ils sont détenus, peuvent taper un code qui envoie trois SMS à des contacts et un e-mail contenant l’emplacement de l’arrestation à l’ONG ECRF.
L’ONG espère que ces messages engendreront une réaction rapide pendant les 24 heures suivant l’arrestation, moments-clé pendant lesquels les gens sont parfois transférés d’un poste de police à un endroit plus compliqué à trouver. Ces premières heures sont souvent cruciales et informer les proches peut parfois éviter des tortures.
Effet boomerang
En 2013, déjà, une autre application avait été créée pour alerter les contacts d’une personne arrêtée à une manifestation. Mais elle s’était avérée dangereuse pour ses utilisateurs lorsque la police découvrait qu’ils avaient l’appli sur leur smartphone. Le développeur de I Protect, qui a préféré rester anonyme, assure que son interface a pris en compte ce problème.
Il explique au Guardian que « l’interface de l’application ressemble à une calculette classique, pour ne pas éveiller les soupçons. »
Au mois de mars, le ministre de l’Intérieur égyptien avait nié le problème et proclamé que les informations sur les disparitions forcées étaient manipulées, accusant les ONG d’être proches des Frères musulmans, le mouvement politique de l’opposition, en disgrâce depuis la chute de Mohamed Morsi.