Ils sont plusieurs dizaines de personnalités de la vie publique, entre professeurs d’université, écrivains, sociologues, historiens, journalistes, artistes, militants politiques et associatifs, chercheurs et bien d’autres corporations, à avoir lancé, hier, sous la forme d’une lettre ouverte destinée au procureur général d’Alger, une action de solidarité avec les manifestants pacifiques interpellés et passés devant les tribunaux pour avoir brandi l’emblème amazigh.
Les auteurs de l’appel ont pris cette initiative après les arrestations opérées contre des manifestants pacifiques, les vendredis 21 et 28 juin. Interpellés puis inculpés pour « atteinte à l’unité nationale » avec comme unique pièce à conviction dans le dossier de cette sinistre mise en scène : l’emblème amazigh, symbole d’identité et de culture nord-africaines déployé aux côtés du drapeau national, écrivent les auteurs de la missive qui, d’autre part, affirment que le procès « pour l’exemple » qui se prépare constitue « une forfaiture qui rappelle une triste époque que nous croyions révolue, un attentat contre les libertés, une violation des lois de la République, un mépris de la justice».
Usant de mots forts, les signataires de la lettre ouverte qualifie les faits reprochés aux manifestants pacifiques mis derrière les barreaux, en attendant leur procès, sont les victimes d’un «impardonnable crime contre la cohésion nationale, que des millions de compatriotes ont déjà condamné en scandant ‘‘es Algériens, khawa khawa’’».
L’occasion a été saisie par les dizaines de citoyens militants signataires de l’appel pour rappeler à ceux qui l’auraient déjà oublié la condamnation de Hadj Ghermoul «qui a dit ‘‘Non au 5e mandat’’ avant tout le monde» et le triste sort dont a été victime Kameleddine Fekhar «dont la mort a été programmée» après avoir été déclaré «coupable de désobéissance civique malgré les offres indécentes du sérail». Puis, aux auteurs de la lettre de soulever le tout dernier cas de ce que les signataires de la lettre ouverte appellent «agression liberticide contre l’Algérie, ses valeurs, et son Histoire» : le cas de Lakhdar Bouregâa, l’officier de l’ALN jeté en prison et ciblé par une violente campagne d’injures et de dénigrement.
«Pour avoir participé aux mêmes manifestations que les détenus que vous vous apprêtez à sacrifier pour sauver un régime délinquant ; pour avoir déployé le même emblème amazigh», écrivent les auteurs de la lettre ouverte, en solidarité avec les victimes de la répression et de l’arbitraire, ils jugent que eux également doivent être, et demandent à l’être, inculpés pour atteinte à l’unité nationale. Ainsi « le jour du procès, nous serons dans le box des accusés, unis dans la diversité de nos convictions, pour vous dire, une fois encore : ‘’Yetnehaw ga3 – Ad ruhen akw – Tout le monde dégage !’’», écrivent ces militants de la société civile pour conclure leur lettre ouverte.
Azedine Maktour