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L’escalade, observée ces dernières quarante-huit heures, est donc le signe probant d’une imminence de l’opération d’envergure que s’apprête à lancer l’armée syrienne dans la province du nord-ouest du pays, limitrophe de la frontière turque et où certains groupes rebelles en appellent à Ankara.
L’aviation russe et syrienne ainsi que les forces terrestres alliées ont commencé depuis samedi un pilonnage soutenu de diverses positions terroristes dans la province d’Idlib, prélude avéré à la grande offensive que le gouvernement syrien s’apprête à lancer pour reprendre totalement le contrôle dans ce qui constitue le bastion ultime des groupes extrémistes et rebelles. Samedi déjà, l’aviation russe avait multiplié les raids «les plus intenses» depuis plus d’un mois, une soixantaine environ, confirmant par-là même les propos du président Poutine qui a affirmé à son interlocuteur turc, le président Erdogan, que le gouvernement syrien «a le droit et le devoir de reprendre le contrôle de tout son territoire». On sait que le sommet tripartite de Téhéran s’est achevé sur un constat de semi-échec pour le chef de l’Etat turc qui demandait un cessez-le-feu dans la région d’Idlib et proposait de négocier avec les factions extrémistes un retrait sans effusion de sang. Une proposition qui n’a pas eu l’heur de convaincre aussi bien le président russe que le président iranien Hassan Rohani. Pour Vladimi Poutine, en effet, il y a fort peu de chance pour que des groupes comme Al Nosra, branche d’Al Qaïda, ou Ahrar al cham, parmi les mouvements les plus extrémistes, puissent devenir solvables en honorant des engagements qu’ils ont systématiquement bafoués par ailleurs.
En outre, Moscou n’a pas caché qu’il détient des «preuves irréfutables» selon lesquelles ces groupes terroristes seraient en train de préparer, avec la complicité des Casques blancs, une nouvelle mise en scène sur une prétendue attaque chimique, afin de donner sur un plateau d’argent aux puissances occidentales le prétexte dont elles ont besoin pour procéder à de nouvelles frappes soi-disant «punitives» contre des positions militaires syriennes. L’escalade, observée ces dernières quarante-huit heures, est donc le signe probant d’une imminence de l’opération d’envergure que s’apprête à lancer l’armée syrienne dans la province du nord-ouest du pays, limitrophe de la frontière turque, malgré l’opposition de la Turquie qui soutient certaines factions rebelles et craint par-dessus tout un nouvel afflux massif de réfugiés sur son sol alors qu’elle accueille déjà plus de trois millions d’entre eux.Cette appréhension est également partagée par les Nations unies qui n’ont pas cessé ces derniers jours de mettre en garde contre ce qu’ils appellent une «catastrophe humanitaire» prévisible du fait du déplacement forcé de quelque 800 000 extrémistes et leurs proches, avec cette donne selon laquelle ils ne peuvent se tourner que vers la Turquie.
Outre les raids aériens, l’armée syrienne et les forces alliées russe, iranienne et libanaise ont multiplié les pilonnages à l’artillerie lourde et, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (Osdh), des centaines de rebelles ont déjà commencé à fuir avec leurs familles les zones bombardées, comme celles du sud d’Idlib, craignant de subir les effets comme à Orum al Koubra qui le 10 août dernier a compté 53 morts dont 41 civils. Raids aériens et tirs d’artillerie ont été concentrés sur les localités de Khan Cheikhoun, Latamné, al-Tamania et Hass.
La peur semble s’être déjà installée dans les rangs des groupes terroristes qui savent que l’offensive n’est plus qu’une question de jours et ont du mal à l’envisager dans toutes ses conséquences immédiates et lointaines, malgré la tentative désespérée de recourir au scénario de l’attaque chimique déjà entrepris à Douma, au moment de l’opération contre qui a permis de libérer la Ghouta orientale. Scénario dénoncé par Moscou qui en a livré les conditions exactes et désigné les auteurs, à savoir Hayat Tahrir al Cham, alias al Nosra, qui contrôle 60% de la province d’Idlib, le Parti islamique du Turkestan et des Casques blancs syriens -des ««secouristes» proches des factions rebelles-, lesquels ont tenu une réunion, vendredi dernier, à Idlib, consacrée à la préparation de cette nouvelle provocation. «Ceux qui doivent prendre part à la mise en scène de la provocation doivent être totalement prêts d’ici au soir du 8 septembre (samedi)», a averti, dans un communiqué, le porte-parole de l’armée russe, Igor Konachenkov. Cette manoeuvre était à prévoir, surtout que le président Poutine a écarté la proposition d’Ankara d’un cessez-le-feu à Idlib, considérant à juste titre qu’il n’y avait «pas de représentants des groupes armés autour de cette table» habilités à négocier un arrêt des hostilités. Mais elle n’a aucune chance d’empêcher de près ou de loin l’offensive dont les phases de préparation sont achevées et qui se conclura, quelles que soient les difficultés, par la reprise totale de la région d’Idlib dans son ensemble.