Entrepreneuriat féminin en Algérie : Le Cread note une évolution “en dents de scie”

Entrepreneuriat féminin en Algérie : Le Cread note une évolution “en dents de scie”

Le Centre se demande si l’entrepreneuriat ne connaît pas une crise de croissance depuis quelques années.

Le Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (Cread) vient de publier un ouvrage intéressant consacré à “l’entrepreneuriat féminin en Algérie”, produit en partenariat avec la fondation Konrad-Adenauer Algérie.“L’analyse de l’entrepreneuriat féminin en Algérie soulève des questions contradictoires”, soulignent les auteurs de l’ouvrage.

Ce dernier  traite de la réalité et des principales caractéristiques de l’entrepreneuriat féminin à travers des enquêtes menées par le Cread, ainsi que des données de l’Office national des statistiques (ONS) et de celles du Global Entrepreneur Monitor (GEM). Les dernières données de l’ONS révèlent qu’en 2018 les femmes représentaient 17,8% de la population occupée totale, mais leur poids dans le chômage est de 32,4%.

Parmi les femmes chômeuses, celles qui sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur représentent 56,5%. Bien qu’en légère progression au cours des deux dernières décennies, le taux d’activité féminine reste en Algérie, en dépit d’un taux élevé de scolarisation à tous les paliers de formation, parmi le plus faible du monde arabe. Il est passé de 11,9% en 2000 à 15,31% en 2018, se situant bien en deçà de la moyenne du monde arabe qui est de 20,87%. Il en va de même pour le taux de chômage féminin.

Selon les données de l’ONS, il se situe à 19,4% en 2018, en légère augmentation par rapport aux années précédentes, pratiquement le double du taux concernant les hommes (9,9%). Le Cread qualifie de contradictoire l’évolution de l’entrepreneuriat féminin, enregistrée au cours de la dernière décennie. Entre 2003 et 2018, le nombre des femmes entrepreneurs a connu une croissance de 60,1%. “Cette croissance sur quinze ans cache une évolution en dents de scie du poids de l’entrepreneuriat féminin”, nuance, néanmoins, le Cread.

“Rapporté au nombre global d’entrepreneurs du pays, l’entrepreneuriat féminin a représenté le taux de 13,4% en 2003 pour atteindre 20,1% en 2004 et retomber de manière irrégulière au taux de 11,4% en 2018”, constate le Cread. L’année 2018 a enregistré le taux le plus faible du poids de l’entrepreneuriat féminin au cours des deux dernières décennies. “Est-ce le prélude à une véritable crise du processus entrepreneurial mené par les femmes ?” s’interroge le Cread.  

Une baisse par rapport à l’entrepreneur global  
Le Cread évoque une stagnation du nombre d’entrepreneures. Le nombre global d’entrepreneures a connu une croissance de 27,2%, alors que la population occupée féminine a enregistré une forte croissance s’élevant à 75,6% entre 2005 et 2016. L’ouvrage fait également état d’une baisse relative du poids de l’entrepreneur féminin dans l’emploi global.

“Malgré la faible augmentation du nombre d’entrepreneures, on constate que la décennie 2005-2016 a été marquée dans la dernière partie (2010-2016) par une chute importante du taux de l’entrepreneuriat féminin”, relève le Cread. Ce dernier note que le poids de l’entrepreneuriat féminin par rapport à l’entrepreneuriat global a augmenté au début de la décennie 2000 pour atteindre 19,4% en 2006.

En d’autres termes, un entrepreneur sur cinq était une femme, alors que vingt ans auparavant les entrepreneurs féminins se comptaient sur les doigts d’une main. Mais cette position, note le Cread, a été progressivement perdue, puisque ce taux est redescendu à seulement 12,8% en 2016, soit un taux équivalent à celui de 2017. Le Cread se demande si l’entrepreneuriat ne connaît pas une crise de croissance depuis quelques années.

Les données brutes, précise le Centre, ne permettent pas d’identifier cette crise. Évoquant une enquête de l’ONS, le Cread indique que le chômage frappe aussi des entrepreneurs ayant cessé leur activité. Les femmes entrepreneurs représentent 7,30% de la population au chômage ayant déjà travaillé. Pour la population masculine, ce taux passe à 18,20%. “Ces taux donnent une certaine image des cessations d’activité”, estime le Cread. 
 

Meziane Rabhi