A la librairie générale d’El-Biar, samedi dernier, à l’occasion de la vente-dédicace de son nouvel ouvrage intitulé l’Effacement, paru aux éditions Barzakh, M. Toumi nous a chaleureusement accueillis et a bien voulu répondre à nos questions.
Parlez-nous de ce nouveau roman…
Je raconte l’histoire d’un homme de quarante-quatre ans qui se lève un matin et ne voit plus son reflet dans le miroir. Il panique et va consulter un psychiatre. Ce dernier lui apprend qu’il est atteint du syndrome de l’effacement. Un mal qui touche les individus de sexe masculin nés après l’indépendance de l’Algérie.
On apprend par la suite que cet homme est le fils d’un grand Moudjahid, très connu, et on découvre, à travers les confidences qu’il fait au psychiatre, le mode de vie de toute une génération, celle des années soixante-dix et quatre-vingt. Comment finalement une classe sociale s’est formée ?
Comment les enfants de ma génération, puisque j’ai le même âge, ont eu du mal à exister et à émerger face à la génération précédente qui a libéré le pays et a été glorifiée ? Chose qui n’est pas du tout évidente. La trajectoire de ce personnage est au final une réflexion autour de la transmission générationnelle.
Ecrire un tel ouvrage nécessite tout de même énormément d’efforts…
Ecrire est un peu un acte vampirisant, dans le sens où on s’empare de tout ce qui nous entoure pour construire des fictions qui s’inspirent de faits réels, de personnes qu’on croise ou encore de stéréotypes sociaux. J’ai essayé de me fondre dans ce personnage que j’ai inventé pour voir le monde à travers ses yeux.
Le roman national a façonné notre histoire ou en tout cas celle de nos parents, et empêche de nouvelles histoires d’émerger, pourquoi ?
On est un pays très jeune. Si on regarde le roman national, l’histoire qu’on nous raconte encore en Algérie est celle de nos parents. On ne sort toujours pas du roman de la Guerre de libération. C’est la même histoire. Pourtant, il y a eu toute une génération qui a succédé à l’ancienne, qui a combattu le terrorisme et qui est en train de construire le pays. C’est autour de cette réflexion que j’ai essayé d’écrire.
Vous portez un jugement assez critique sur la génération précédente…
Ce n’est pas un jugement que je porte, c’est plutôt un constat. Je pense qu’on est toujours écrasé par cette gloire, par ce roman qui crée une espèce d’ombre sur un autre roman national qui pourrait apparaître.
Comment cette transmission intergénérationnelle pourra-t-elle s’effectuer ?
La transmission est un acte serein et naturel. Je suis sûr que la prochaine génération, celle qui a 20 ou 30 ans aujourd’hui, prendra le pouvoir et construira une autre histoire. On ne peut plus s’arrêter uniquement au fait qu’on a libéré notre pays. Il faut regarder devant.
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