Lors de notre tournée au SILA, nous avons croisé fortuitement une conférence intéressante sous l’intitulée «Les noms propres de personnes en Algérie, entre histoire et état civil»
Lors de notre tournée au SILA, nous avons croisé fortuitement une conférence intéressante sous l’intitulée «Les noms propres de personnes en Algérie, entre histoire et état civil» animée par la professeur Ouerdia Yermiche, spécialiste en sciences de langage dans l’ensemble des universités algériennes, particulièrement en onomastique (étude des noms propres), elle nous livre dans ce bref entretien un bref historique de l’anthroponomie algérienne avant pendant et après l’occupation française qui a complètement dénaturé les noms.
Quel est, selon vous, la période tournante de l’histoire des noms en Algérie ?
Les noms propres algériens étaient traversé par différentes influences, l’origine du nom berbère a duré avant d’être chamboulé par les différentes invasions qui ont ciblé le sol algérien à l’exemple des romains, vandales, turques, espagnoles et turcs et enfin les français. L’événement marquant de l’histoire des noms algériens a été l’année 1882. Il a été instauré un nouveau mode de désignation de personnes qui est le mode patronymique, et c’est à partir de 1882, avec la loi sur l’état civil que nous avons donné un nom de famille à l’algérien.
Contrairement aux anciens noms d’Algériens qui n’étaient pas choisis de façon arbitraire, peut-on dire que la France a dénaturé tout le sens des noms ?
Les noms à leur origine berbère n’étaient pas choisis arbitrairement, ils étaient essentiellement liés à la tribu, au village, à ses caractéristiques et à ses us et coutumes. C’est à partir de la colonisation française que les noms de famille ont été complètement dénaturés le système coloniale n’a pas respecté les normes traditionnelles de désignation. Les Français ont utilisé des procédés pas du tout honnêtes pour désigner des personnes, ils les désignaient pas des noms d’animaux, d’insectes ou d’insultes, et ça n’avait aucun lien avec l’origine généalogique. Le colonialisme français a cassé et opéré une rupture dans la généalogie des personnes à travers le mode patronymique.
Après l’indépendance, est-ce qu’il y a eu des efforts pour que les Algériens reprennent leurs anciens noms ?
L’état civil algérien post indépendance n’a été que la suite d’erreurs commises par l’occupation française, rien n’a été fait pour rétablir l’authenticité de la patronymie algérienne.
Pour que les choses se rétablissent, il faut une forte décision politique afin de revoir, de réfléchir et d’observer le système anthroponymique tel que transcris par la France. Il faut essayer de corriger l’ancienne fixation du nom en français qui comportait des altérations, et réfléchir par la suite sur des normes qui peuvent faire une transcription en arabe qui rétablit le nom dans sa prononciation d’origine.
Vous avez effectué une étude sur pas moins de 77.000 noms. Parlez-nous en…
J’ai travaillé sur l’anthroponomie algérienne en essayant de relever un large échantillon de noms de famille à travers tout le pays, notamment au nord. A travers cet échantillon du chiffre qui est énorme déjà, j’ai pu quand même relever les incohérences aussi bien au niveau de la sémantique des noms que de la forme. J’ai montré combien le disfonctionnement lié à l’organisation des anthroponymes est grande.
Croyez-vous qu’il y a assez de livre qui aborde le sujet des noms algériens et leur histoire ?
Je suis la première depuis l’indépendance à avoir fait une thèse universitaire sur l’anthroponomie algérienne. Farid Benramdane a fait sa thèse sur les toponymes (le nom des lieux) et je suis fière de dire que nous avons encadré plusieurs générations d’étudiants qui travaillent dans ce domaine depuis notre début aux années 1980.
Nous avons publié seulement des travaux universitaires sur l’histoire de noms en Algérie, mais l’idée de publier des livres de la vulgarisation a germé, et je prépare un livre intitulé L’histoire du nom de famille en Algérie.
Kader B.