Adjal Lahouari
«En tout cas, à voir l’envie et l’ardeur des joueurs, on peut dire que Belmadi est en train de jeter les bases d’une bonne équipe ». Ce texte figurait dans l’analyse du match Algérie-Tunisie remporté par les Verts le 27 mars dernier. En dépit de ce constat élogieux, nous n’avons pas manqué de préciser que beaucoup de travail restait à faire en raison des lacunes persistantes. Trois mois plus tard, le nouveau constat est beaucoup plus rassurant avec quatre victoires en milieu hostile avec la plus solide défense, l’attaque la plus prolifique et plusieurs artilleurs.
Le titre de l’analyse « Les bases techniques existent » s’est donc avéré fondé et nous conforte dans notre jugement. Le Sily national s’est incliné dimanche face à une équipe algérienne supérieure dans tous les domaines. Et pourtant, en dépit de leur évidente domination, on a senti une certaine retenue chez les Fennecs. Et c’est Belaïli qui a fourni en zone mixte l’explication : « Après l’élimination du Maroc et de l’Egypte, on ne voulait subir le même sort ! ». Quoi qu’il en soit, il n’y a plus de doute à présent. L’équipe nationale algérienne a trouvé une identité de jeu bien définie, avec un pressing tout terrain dès la perte du ballon. Or, cette faculté est le propre des grandes formations car, lorsque la relance est propre et rationnelle, l’adversaire est immédiatement en danger.
Avec la superbe technique et la créativité des Mahrez, Belaïli, Bennacer et Ounas, le travail de sape de Bounedjah ainsi que l’appui des hommes du milieu, l’équipe nationale vient d’atteindre un palier très intéressant. Le comportement de la charnière centrale Mandi-Benlamri, dont la constitution a commencé au mois de mars face à la Tunisie, est exceptionnel. A droite, Atal s’est compliqué la tâche et n’était-ce le caviar donné à Ounas, il aurait été crédité d’une faible prestation, laquelle figure au rayon des lacunes certainement relevées par Belmadi, au même titre que les dégagements intempestifs du ballon dans le camp de l’adversaire. On y ajoutera enfin le piège du hors-jeu dans lequel Bounedjah est tombé à plusieurs reprises. Ce que l’on retiendra encore, c’est que, tout en affirmant avoir 23 titulaires sous la main, Djamel Belmadi n’a pas dérogé au principe qu’on ne change pas une équipe qui gagne, sauf en cas de force majeure. Il est donc revenu au onze qui a battu le Kenya et le Sénégal, le plus logiquement du monde.
Mais, qu’est-ce qui a changé dans cette équipe auparavant friable en défense et peu convaincante au milieu et en attaque ? Pour avoir des réponses objectives, il faut se référer au constat de Claude Leroy, le spécialiste reconnu du football africain : « J’ai trouvé les Algériens extraordinaires dans la récupération collective. Dès que le ballon est perdu, ils sont tous concernés pour le récupérer. C’est peut-être l’influence de Mahrez et la patte de Guardiola à Manchester City. On sent une équipe qui vient fermer tous les intervalles et qui bloque tous les extérieurs. Dès qu’un joueur adverse a le ballon, ils font beaucoup d’efforts et sont au point physiquement et tactiquement.
C’est l’équipe qui m’a fait la meilleure impression tactique depuis le début de la compétition ». Cette solidité a été déjà visible lors des précédents matches et on a vu les attaquants, comme Mahrez, Belaïli, Bounedjah et Delort (ce dernier lors du troisième match), prêter main-forte à leur défense lorsque le besoin se faisait sentir. Ce qui explique la solidité du secteur défensif, sans oublier l’apport des hommes du milieu comme Feghouli et Guedioura, Bennacer étant chargé de la bonne relance du jeu.
D’ailleurs, conscient que l’une des forces de la Guinée se situait au milieu, Djamel Belmadi a accordé une attention particulière à cette zone en donnant des consignes précises au duo Guedioura-Bennacer.
En ce qui concerne la Guinée, le coach algérien avait les idées claires quant aux forces et aux faiblesses de l’adversaire. Pour sa part, l’entraîneur Paul Put avait déploré le manque d’efficacité de l’attaque malgré les occasions créées. Quant à Belmadi, il était résolu à tirer profit des manques de la charnière centrale guinéenne accusant un déficit dans ses interventions sur des adversaires plus rapides. Aussi, les Belaïli, Mahrez et Bounedjah ont eu la possibilité de bien s’exprimer face à cette défense. On aura apprécié les tentatives des attaquants algériens.
A ce sujet, il se confirme que, lors des entraînements avant ce choc, Belmadi a travaillé plusieurs combinaisons visant à déséquilibrer les défenseurs guinéens. Il s’agit donc bel et bien d’une application planifiée en un temps record si l’on prend en compte la date de la prise en mains de l’équipe nationale par Belmadi.
On peut dire que, contrairement à certains techniciens au bagout abondant et trompeur, Belmadi a fait progresser les joueurs, et cela se répercute inévitablement sur le rendement de l’équipe, en exigeant des efforts que certains cadres ne consentaient pas sous la houlette d’autres sélectionneurs. Et c’est dans ce nouvel état d’esprit que réside la différence. Donc, il n’y a pas de recette miracle, mais une intelligente évolution tactique, avec de la conviction, du sérieux et du travail. Cela devait être dit.