Le ministre du Commerce se complaît à rééditer les mêmes bourdes
Le ministre doit savoir que les déclarations ne suffisent pas pour que les choses rentrent dans l’ordre.
Le marché informel peut-il être éradiqué avec des annonces tonitruantes qui ne sont suivies d’aucun effet sur le terrain?
La prolifération des marchands ambulants, la multiplication des marchés parallèles, l’éternelle spéculation sur les prix qui s’exacerbe chaque année, sont autant de facteurs qui poussent à ne plus croire les mesures prises par le ministère du Commerce.
Alors que les économistes tirent la sonnette d’alarme à chaque fois pour prévenir des dangers du marché informel, le département de Mustapha Benbada se complaît à rééditer les mêmes bourdes.
Les choses ont été négligées dès le début et ont empiré au point que l’Algérie s’est réveillée en 2010, selon les chiffres de l’Office national des statistiques (ONS), avec plus de 3,9 millions de commerçants informels. Hallucinant!
Le hic, c’est que le drame ne s’arrête pas là. Car, qui peut oser aujourd’hui lutter efficacement contre ce phénomène quand des décisions du Conseil des ministres sont annulées de crainte d’embraser le pays?
Le décor est d’ailleurs devenu coutumier: à chaque fois que les services de police tentent de déloger les commerçants informels, on assiste à des émeutes, des scènes de violence et même des immolations.
Pourtant, le ministère du Commerce, qui a perdu le pouvoir de contrôle du marché, évoque toujours des mesures pour éradiquer ce phénomène.
Amara Boushaba, directeur de l’organisation des marchés, des activités commerciales et des professions réglementées au ministère, a cru utile de rappeler, hier à l’APS, qu’un programme national d’assainissement des activités commerciales informelles a été mis en oeuvre, ces deux dernières années, pour endiguer ce phénomène à travers l’intégration des commerçants informels dans les circuits officiels.
Selon lui, ces mesures portent sur «l’élaboration d’un plan d’insertion des intervenants informels dans l’économie formelle, l’organisation et l’aménagement des espaces commerciaux réglementés et la régularisation de la situation juridique des marchés non réglementés».
Elles ont trait également, a-t-il poursuivi, à «l’encadrement et la résorption de l’activité commerciale informelle par l’implication de tous les services concernés, la définition des mesures opérationnelles et la réalisation de nouvelles infrastructures».
Un discours qui, certes, incite à l’optimisme, mais qui est contredit par la réalité du terrain. Le programme des 100 locaux commerciaux pour chaque commune, annoncé en grande pompe et destiné aux chômeurs, aurait pu profiter à la lutte contre l’informel, étant donné que les commerçants de l’informel sont eux-mêmes des chômeurs. Quand ils ne sont pas devenus des lieux de débauche, ces locaux sont simplement abandonnés dans certaines communes.
Il serait d’ailleurs curieux de savoir si les 3,9 millions de commerçants informels sont comptés dans le taux de chômage?
Mais là n’est pas le propos. Car M.Boushaba a expliqué que l’insuffisance d’infrastructures commerciales adéquates, a créé un système de «pseudo-marchés» qui s’est développé au milieu d’habitations, sur des terrains vagues, et surtout dans des lieux incommodes et dangereux, dans les rez-de-chaussée des immeubles, ou de villas, des vides sanitaires des cités d’habitation, des routes nationales et parkings de cités.
Dans ce climat, le système d’approvisionnement ne pourra être que déstructuré, improvisé et échappant à tout contrôle.
«Un équilibre fragile du marché s’est créé puis installé sous cette forme et il s’est constitué comme principal voie d’approvisionnement des consommateurs et des ménages», avait reconnu le ministre du Commerce, Mustapha Benbada en mars dernier. Selon le ministre, ces marchés nécessitent une reconversion par leur intégration dans des lieux salubres, dignes et offrant toutes les conditions d’hygiène et de sécurité, conformément aux normes admises. Le discours, comme le ministre le sait bien, ne suffit pas pour que les choses rentrent dans l’ordre.
Toujours dans le chapitre de la lutte contre l’informel, M.Boushaba a cité, sans préciser où en sont les choses, l’instruction interministérielle (Commerce-Intérieur) de mars 2011, adressée aux walis en vue de la mise en place d’une commission de wilaya, chargée d’examiner les voies et moyens de traitement de ce phénomène.