Reconnue, après un combat sanglant et de longue haleine, comme langue nationale en 2002, puis officielle en 2016, Tamazight semble revenir à la case départ en Algérie, en témoigne la dernière correspondance du Secrétariat général du ministère de l’Éducation nationale, fermement dénoncée hier par la coordination des inspecteurs de la langue Amazighe.
En effet, la coordination des inspecteurs de la langue Amazighe, via un communiqué publié hier, a fortement dénoncé « la correspondance du Secrétariat général du ministère de l’Éducation nationale, émise sous le numéro 194, du 14 août 2021 » concernant « l’exclusion de l’enseignement de Tamazight de l’emploi du temps alternatif de l’élève pour l’année scolaire 2021-2022 ».
La coordination a affirmé, dans le même communiqué, que « les inspecteurs de Langue Amazighe, tous paliers confondus, réunis ce jour, le 28 août 2021, à Bgayet » ont décidé « d’envoyer un courrier à Monsieur le Ministre du secteur pour attirer son attention sur les arrière-pensées et les conséquences d’une telle décision, pour le moins inattendue ».
L’état fait-il machine arrière ?
La décision a surpris plus d’un. La coordination des inspecteurs de la langue Amazighe affirme qu’elle a rappelé à l’état ses devoirs envers la langue Amazighe, et qu’elle a « émis des propositions pour une meilleure prise en charge de cet enseignement, répondant effectivement aux ambitions des Algériennes et Algériens ».
Dans une déclaration à BRTV, Yahia Bellil un enseignant en langue Amazighe dans la wilaya de Béjaia, affirme que la décision du ministère de l’Éducation nationale implique que, l’enseignement de la langue Amazighe connaitra certains changements. En effet, « les deux heures censées être dédiées à cet effet, vont être désormais exclues de l’emploi de temps officiel », déplore-t-il.
Cela veut dire, ajoute M. Bellil, que « si l’enseignement de toutes les matières est dispensé le matin, pour étudier le Tamazight, l’élève devrait revenir le soir, et si les cours auront lieu le soir, Le Tamazigh ne peut qu’être enseignée le matin, comme le sport et certaines autres matières. Cela est injuste ».
Une décision injuste ?
Cette décision, martèle l’intervenant, « va à l’encontre de toutes les autres circulaires du ministère de l’Éducation nationale, ainsi qu’à l’encontre de la constitution« . Et d’ajouter que « exclure une matière essentielle de l’emploi du temps revient à la casser, à la tuer, et à marginaliser ses enseignants ». Concernant les élèves, « leur dire qu’il s’agit d’une matière supplémentaire, et leur demander de revenir assister à ses cours au moment ou ils sont censés se reposer, revient à les pousser à la détester ».
Selon le même intervenant, « le Tamazight est considérée comme une matière secondaire, alors qu’elle doit être valorisée, car il s’agit d’une langue nationale et officielle ». Yahia Bellil indique en outre que ce sont de telles décisions qui ont causé à la langue Amazighe « ce retard qu’elle affiche en comparaison avec d’autres langues ».
L’enseignant rappelle aussi le long combat qui a été mené afin de gagner l’enseignement du Tamazight dans les écoles. En effet, c’est grâce au printemps berbère de 1980, tout en passant par la grève du cartable en 1995 et le printemps noir de 20021, que l’enseignement du Tamazight dans les écoles a été obtenu. Un butin que les élèves risquent désormais de perdre, estime la coordination des inspecteurs de la langue Amazighe.