La communauté internationale mesure tous ses pas dans la gestion de la crise politique en Libye, où l’intervention militaire de l’Otan en 2011 avait démontré que la force engendrait anarchie et chaos.
Le président du Conseil présidentiel Faïz Serradj devra annoncer, au plus tard demain, la composante du nouveau gouvernement d’union, dans le cadre du processus de dialogue interlibyen lancé par l’ONU à Genève en janvier 2015. Jugé pléthorique, avec 32 ministres, le premier exécutif avait été rejeté par le Parlement reconnu de Tobrouk qui s’est prononcé contre avec 84 voix sur 104. Faïz Serradj s’est donc engagé à proposer une nouvelle composante dans les 10 jours qui allaient suivre.
Il a promis de réduire le nombre de ministres, même si ce n’est pas ce détail qui pose problème à certains acteurs de la crise libyenne, notamment ceux exilés à Tobrouk. Le cas du général à la retraite et commandant en chef de l’opération “Al-Karama (Dignité)” constitue le point de discorde qui empêche de trouver un consensus total autour de toutes les questions posées dans le cadre du dialogue onusien à Skhirat, à Alger et à Rome.
Accusé de servir les intérêts américains et d’avoir des ambitions purement personnelles autres que celles de sauver le pays du chaos, le général Khalifa Haftar continue toutefois à disposer de suffisamment de soutiens et d’influence dans l’est du pays, notamment à Benghazi. Mais si le sort de cet ancien ténor du défunt régime de Mouammar Kadhafi et son rôle sont au centre d’un profond désaccord, la menace terroriste de l’organisation autoproclamée État islamique (Daech) oblige les parties libyennes à mettre de côté leurs rivalités individuelles et calculs politiques. Acculés par la communauté internationale, le gouvernement de Tobrouk et son rival non reconnu de Tripoli sont devant deux choix : accepter le compromis ou subir une intervention militaire étrangère qui serait soigneusement préparée par les puissances occidentales. Pour le moment, ces mêmes puissances écartent toute éventuelle intervention militaire en Libye.
Réunis à Rome (Italie) mardi, les membres de la coalition internationale contre Daech en Syrie et en Irak ont longuement discuté autour de l’opportunité d’intervenir ou pas en Libye pour freiner la branche libyenne de l’organisation dirigée par Abu Bakr al-Baghdadi et l’empêcher de s’emparer davantage de territoires dans ce pays, plus particulièrement des champs pétroliers situés entre Ras Lanouf (ouest) et Benghazi. “En Libye, nous sommes sur le point d’avoir un gouvernement d’unité nationale et cela empêchera Daech (acronyme de l’EI en arabe) de prendre le contrôle de l’avenir du pays”, avait assuré le secrétaire d’État américain, John Kerry, à l’ouverture de cette réunion. “Il y a certes un risque que l’activité (de l’EI) s’intensifie, mais il est très rassurant de voir qu’il y a une très grande convergence de tous les pays sur la nécessité de parier sur la consolidation du processus politique qui s’est ouvert” en Libye, a affirmé son homologue italien Paolo Gentiloni, lors d’un point presse à la fin de la réunion, a rapporté l’AFP. “Il n’est absolument pas question que nous intervenions militairement en Libye”, a insisté, de son côté, le chef de la diplomatie française Laurent Fabius.
Il est vrai que la France, l’Italie et les États-Unis sont encore à réaffirmer qu’une nouvelle intervention militaire en Libye est à écarter pour le moment, mais les événements peuvent s’accélérer si les blocages politiques persistent entre les représentants des autorités de Tripoli et de Tobrouk. la balle est dans le camp des Libyens.