Il y avait du beau monde samedi soir au niveau du Musée d’art moderne et contemporain d’Alger. Et pour cause!
Fêter les 50 ans de la Cinémathèque algérienne n’est pas une sinécure. C’est d’autant plus symbolique que cela coïncidait avec le lendemain de la commémoration du 70e anniversaire des massacres du 8 mai 1945. Le vernissage en question dont la date choisie n’était sûrement pas anodine s’est fait en présence de Nadia Labidi, ministre de la Culture, Ahmed Bédjaoui, Monsieur cinéma et commissaire de ladite expo et de nombreux invités nationaux et français dont Costa Gavras l’ami de l’Algérie à qui on doit la coproduction algéro-française Z notamment.
Aussi, ce vernissage qui s’est déroulé dans le faste a permis à l’assistance de découvrir sur deux niveaux, l’atrium et puis le sous-sol, «la saga de la création de la cinémathèque» avec ses temps forts entre affiches, portraits, documentations/archives et des extraits vidéos de films célèbres dont La bataille d’Alger. «Un groupe d’hommes férus de cinéma et engagés aux côtés des Algériens, ont accepté de relever le défi lancé par Mahiedine Moussaoui, directeur du Centre du cinéma et Ahmed Hocine appelé à diriger la nouvelle institution. C’est cette saga des premières années que se propose de raconter en images et en textes, cette expo. (…) Comme il est impossible de couvrir l’histoire du demi-siècle d’activités de la cinémathèque, nous avons pris le parti de raconter la période qui a vu sa naissance et de nous arrêter à la fin du Panaf et des années 1960. Les visuels de cette première exposition se déclinent autour des affiches conçues et réalisées par le très talentueux artiste suisse François Roulet et des photographies prises par Daniel Leterrier. Tous deux étaient membres de cette dream team qu’animait avec brio et rayonnement, Jean-Michel Arnold. (…) du Mama, il suffira aux visiteurs de traverser la rue pour aller suivre les cycles de films qui renvoient à la trentaine d’affiches de François Roulet. A chacun de ces cycles qui avaient été programmés par Jean-Michel Arnold, correspond une mini-rétrospective d’oeuvres classiques et une centaine de films du monde entier, datant des années 1960 et provenant du fonds de la Cinémathèque algérienne…» écrit le commissaire général Ahmed Bédjaoui dans le riche catalogue de cette expo dont un portrait en noir et blanc lui est consacré aussi, bien évidemment compte tenu de son grand apport au 7e art algérien. Parmi les autres portraits que l’on peut distinguer également celui de Elias Moussaoui, responsable des archives, Bernard Riobé pianiste improvisateur qui a accompagné notamment les films muets avec grâce et subtilité.
Le cinéma africain avait eu droit notamment au premier Festival culturel panafricain de 1969. Il est illustré par ses fervents représentants tels Soulemyane Cissé, Med Hondo, Djibril Diop Mambaty et Semben Ousmane, Sam Babakar, Lionel N’Gakane entre autres. L’expo a choisi aussi de raconter un cinéaste, Von Sternberg, immortalisé en images noir et blanc par le photographe Daniel Leterrier qui l’a suivi dans ses déambulations à travers les villes d’Alger, Tlemcen, au coeur de groupes différents: des femmes, des enfants, des musiciens et des marchands.
Une trentaine de clichés inédits, faut-il le souligner. A l’entrée du Mama, au fond, le public pourra admirer les dessins et autres affiches signées François Roulet. Véritables chefs d’oeuvre qui nous ont marqués tant par leur forme et couleurs expressives qui attirent d’emblée l’attention.
«De l’avis unanime, les trente-deux affiches qu’il a composées durant les sept années qu’il a consacrées au service de la Cinémathèque algérienne constituent la partie la plus aboutie de son oeuvre graphique et un grand moment de l’histoire de l’affiche de cinéma» écrit Françoise Coursaget dans le catalogue. A côté de cela l’expo comporte aussi plusieurs cycles de cinéma déclinés en affiches et d’images extraites des célèbres films présentés à la cinémathèque.
On citera celles des cinéastes du maquis comme feu René Vautier, disparu cette année, Pierre Clément, Djamel Chandarli entre autres, Mohamed Lakhadar Hamina, le cinéma des années 1960 en Algérie, comme celui de Mustapaha Badie, Ahmed Rachedi, Hamina encore, Riad Mohamed Slim, Tewfik Farès, Abderrahmane Bouguermouh, Ghaouti Bendeddouche, Sid Ali Mazif, mais aussi les coproductions dont La bataille d’Alger de Gillo, Pontecorvo Peri Onzo, L’étranger de Luchino Visconti, Z de Costa Gavras, des cycles du cinéma mondial, à l’instar de Charlie Chaplin, Le cinéma soviétique, l’expressionisme allemand, Fritz Lang, Josef Von Stenberg, le cinéma français, et ses belles affiches telles des films Le beau Serge de Claude Chabrol, La règle du jeu de Jean Renoir, Jules et Jim de François Truffaut, Jean-Luc Godard, mais encore le cinéma suédois, polonais, italien, japonais, maghrébin, arabe avec Youssf Chahine, le western de John Ford, le film noir, Alfred Hitchcock, la comédie musicale américaine etc.
Toutes ces filmographies vous pouvez en avoir un large aperçu juste en face, soit à la cinémathèque sise au 26, rue Larbi Ben M’hidi où une série de films vous seront projetés, chaque jour à partir de 13h et ce jusqu’au 10 juillet.