Les contrats gaziers à long terme allant jusqu’à 25 ans laissent aujourd’hui de plus en plus place à des accords dont la durée ne dépasse guère une dizaine d’années.
La compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, a procédé récemment au renouvellement d’une bonne partie de ses contrats de livraison de gaz naturel avec ses traditionnels clients européens, dont notamment l’Espagne et l’Italie. Dans un contexte énergétique mondial devenu fortement concurrentiel et changeant, les termes qui sous-tendent désormais les négociations de ces contrats — et sur lesquels Sonatrach reste plutôt laconique dans sa communication officielle — deviennent de plus en plus flexibles, les fournisseurs de gaz comme l’Algérie étant poussés à batailler davantage pour préserver leurs parts de marché.
Quoi qu’il en soit, la première tendance lourde qui se dégage déjà de ces grandes mutations que connaît le marché gazier est que les contrats à long terme allant jusqu’à 25 ans laissent aujourd’hui de plus en plus place à des accords dont la durée ne dépasse guère une dizaine d’années dans la plupart des cas. “L’ère des contrats à long terme est terminée”, nous confirme en ce sens l’expert en énergie et ancien P-DG de Sonatrach Abdelmadjid Attar. Selon lui, le fait que la compagnie nationale des hydrocarbures ait pu renouveler récemment ses contrats gaziers avec ses clients européens sur des durées de 10 ans est déjà “un très bon résultat”. En attendant l’issue des négociations avec la France, Sonatrach, faut-il le rappeler, a reconduit ces derniers mois, pour des durées de 10 ans, la plupart de ses contrats de livraison de gaz vers l’Europe.
Mercredi dernier, la compagnie pétrolière nationale a annoncé la signature d’un second accord de livraison de gaz vers l’Italie, engagé avec le groupe énergétique italien Enel sur une durée de 8 ans avec une option de 2 ans supplémentaires et un volume d’approvisionnement global de 3 milliards de m3 par an. La mi-mai écoulée, Sonatrach avait déjà paraphé un premier accord gazier avec l’autre groupe italien, ENI, portant sur une durée de 10 ans et un volume de 9 milliards de m3 par an. Quelques mois plus tôt, l’Espagne, à travers sa compagnie Gas Natural Fenosa, avait également reconduit ses accords gaziers avec l’Algérie jusqu’à 2030 pour un approvisionnement annuel de 9 milliards de m3.
Et à la mi-juin en cours, Sonatrach et la société pétrolière et gazière portugaise Galp Energia ont signé des accords portant sur l’approvisionnement en gaz naturel algérien du marché portugais pour un volume de 2,5 milliards de m3 par an, prolongeant ainsi de 10 ans leur contrat gazier qui date de 1994. Alors que le marché européen constitue la principale destination pour le gaz algérien, l’Italie avec une part globale de 35% continue à être le premier client gazier de l’Algérie, suivie de l’Espagne avec une part de 31%, tandis que la France arrive derrière avec près de 8% des exportations algériennes de gaz, qui ont atteint un volume global de quelque 51 milliards de m3 en 2018, dont 75% par gazoduc et 25% sous forme de GNL, selon les données du groupe Sonatrach.
Le marché gazier, s’accordent à dire les spécialistes du marché énergétique, devient de plus concurrentiel et les prix en Europe sont presque deux fois moins chers qu’il y a dix ans, d’où la tendance à la négociation de contrats à court et plus ou moins à moyen termes, en lieu et place des anciens accords à long terme qui portaient sur des durées de 20 à 25 ans. Dans le contexte actuel, note en ce sens Abdelmadjid Attar, même si la consommation gazière continue assurément de s’accroître, le monde tend de plus en plus vers l’efficacité énergétique, c’est-à-dire vers “moins de ressources pour plus d’énergie”.
Et, au bout, la concurrence, comme nous l’explique l’expert en énergie Francis Perrin dans l’entretien ci-après, devient de plus en plus exacerbée et les acteurs du marché gazier s’orientent aujourd’hui vers une plus grande flexibilité, en évitant surtout de s’engager sur des durées aussi longues que par le passé.
Akli Rezouali