La journaliste et artiste visuelle Hind Oufriha présente, depuis le 18 février et jusqu’au 9 mars 2017, à la galerie Ezzou’art, l’exposition de photographies “El Harba wine”, née d’un voyage dans la région d’Ouargla et dont le point de départ fut la découverte d’un passeport algérien déchiré.
Celle qui aime humblement se définir comme “artiste visuelle”, présente, depuis le 18 février et jusqu’au 9 mars, à la galerie Ezzou’art (Centre commercial et de loisirs de Bab-Ezzouar), une exposition de photographies intitulée “El harba wine”, composée d’une trentaine de tableaux très éclectiques, tant ils touchent à différents aspects de la vie quotidienne dans le Sud, et, d’une manière plus générale, celle dans tout le pays.
Ce projet tant esthétique qu’humanitaire, a pris racine lors d’un voyage qu’a effectué l’artiste à Ouargla, dans ses k’sour plus précisément, et la découverte d’un fragment de passeport algérien déchiré, jeté à même le sable. Étonnée par cette trouvaille, elle en prendra instinctivement des clichés : “J’ai été prise d’une émotion fulgurante à sa découverte, je l’ai pris en photo parce que je n’en revenais pas”, nous confiera l’artiste avant d’ajouter : “Je me suis dit, c’est peut-être ça la fameuse légende du passeport déchiré, du harrag. Je l’ai donc pris avec moi, il a fait le voyage dans ma poche jusqu’à Alger, je me suis même retrouvée à vérifier s’il était là pendant tout le trajet. Inconsciemment, en sauvant ce fragment de document, j’avais peut-être voulu nous sauver nous-même”. Tel le Petit Poucet, la photographe essayera de revenir sur les traces de ce présumé-harrag sous la forme d’une fiction, à travers laquelle elle essayera de comprendre pourquoi cet Algérien a commis un tel acte ?
Où se trouve-t-il actuellement ?
Dans quoi s’est-il réfugié.? Pour répondre à ces questions, et surtout “conjurer le sort”, selon les propos d’Oufriha, l’exposition a été élaborée sur trois niveaux, une “triangulation” représentative de nos questionnements, de nos errances, qui amènent certains à se réfugier dans d’autres pays ou même dans la religion, de nos traces sur cette terre, mais aussi de nos échecs. Se présente au visiteur, au commencement de l’exposition, le portrait d’un homme adossé à un des murs des ksour. Même si les portraits ne sont pas omniprésents, car l’artiste aura surtout voulu “marquer le hors-champ de la présence humaine dans le désert”, toujours est-il que la silhouette de cet homme donne le “LA” à cette belle exposition.
Une présence à travers laquelle le visiteur pourra s’imaginer le parcours de cet individu, les questionnements qui se sont produits chez lui, et finalement, son errance, qui l’aura amené à abandonner une partie de lui même. Par ailleurs, le déracinement (volontaire ou non), exprimé au travers du passeport, des gants, une paire de baskets, ou encore une bouteille d’alcool, abandonnés en plein désert par leur(s) propriétaire(s), et qui témoignent de la présence de ce supposé harrag, sont le deuxième élément sur lequel s’est appuyée la photographe afin de remonter le fil de cette vie oubliée.
Au centre de l’exposition, trône un tableau du continent africain, fait avec des éléments qui rappellent encore une fois, le sort des migrants et de l’Afrique ; du papier plume recouvert d’une couverture de survie, qu’on donne aux harraga pour se réchauffer, mais qui représente aussi cette Afrique en détresse. “J’ai voulu exprimer l’idée de détresse, cette envie de couvrir, de sauver l’autre”, expliquera-t-elle.
La forme du continent a été, quant à elle, faite avec un sac-poubelle, faisant écho à la détérioration environnementale dont souffre le berceau de l’humanité, surmonté d’une pièce métallique en relief, et du fameux passeport déchiré, qui trône finalement, sur une Afrique suppliciée.