Le déficit commercial enregistré durant le premier semestre 2019 est venu rappeler la nécessité d’orienter l’économie nationale vers l’investissement productif, il a valeur d’énième avertissement. C’est ce que recommandent des économistes qui, tout en relevant que le déficit était « prévisible », l’expliquant par la nature de l’économie nationale, estiment nécessaire de mettre en branle ses leviers de croissance.
Passant ainsi de 2,84 milliards de dollars à 3,18 milliards de dollars pour la même période de l’année écoulée, le déficit est un signal incontestable de l’obligation de « changer de cap », observent les experts. «Il va falloir trouver des solutions efficientes pour réaliser une croissance économique diversifiée», a jugé l’économiste Mustapha Mekidèche, repris par l’APS, qui qualifie cela de «défi fondamental».
De son point de vue, le déficit enregistré durant les six premiers mois de 2019 est «structurel, qui dure plus globalement depuis plus d’une décennie». Dans le détail, il a expliqué que « l’absence d’autres moteurs de croissance des exportations, conjuguée à l’instabilité du marché pétrolier, ont mené l’Algérie tout droit vers cette situation de déficit commercial », estimant qu’il s’agit d’une « évolution mécanique».
Le constat étant établi, M. Mekidèche a souligné, en termes d’alternatives, la nécessité de «s’orienter vers une politique de diversification significative de l’économie en relançant le secteur industriel ». Il estime que « tant qu’on n’aura pas réglé ce problème structurel, la situation de notre commerce extérieur va inévitablement s’aggraver », évoquant l’impact de l’évolution du marché pétrolier dont les signaux ne sont pas au vert.
Il a relevé, dans ce sens, que les prix du pétrole qui ne se sont toujours pas stabilisés compte tenu du contexte géopolitique international, mais aussi de la baisse de la demande mondiale en énergie, résultant de l’escalade du conflit commercial entre la Chine et les Etats-Unis.
Il va ainsi falloir « remettre à plat l’ensemble de la politique de ré-industrialisation de l’économie nationale », a-t-il soutenu. Relevant que l’Algérie a mis en place « un modèle économique qui absorbe plus de devises et qui ne permet pas, en contrepartie, à ses produits de se positionner sur les marchés internationaux », M. Mekidèche a expliqué que «le creusement de la balance commerciale, durant le premier semestre écoulé, est le résultat de ce modèle économique». «Pour le moment on a manqué d’efficacité pour diversifier notre économie. Il s’agit d’un véritable problème », a souligné M. Mekideche, selon qui, il y a nécessité d’aller vers des « assises nationales sur l’économie et ouvrir ce dossier loin de tout populisme ou toute surenchère, car une telle situation ne peut continuer ».
Pour sa part, Smaïl Lalmas spécialiste des questions relatives au commerce extérieur, ne voit pas d’autre solution que l’encouragement de l’investissement productif et la création d’entreprises, mais aussi le renforcement de la compétitivité des PME. « On ne peut se limiter uniquement au contrôle des opérations d’importation et ignorer le développement de l’économie nationale, qui passe inévitablement par la création d’entreprises et de richesses », a-t-il souligné. Pour lui, le déficit commercial enregistré durant le semestre écoulé atteste que « tous les mécanismes et mesures mis en place visant à réguler les importations et à promouvoir les exportations hors hydrocarbures ont échoué ».
A noter que les exportations algériennes ont atteint 18,96 milliards de dollars (mds usd) durant le 1er semestre de l’année en cours, contre 20,29 mds usd à la même période de 2018, soit une baisse de 6,57%, indiquent les statistiques provisoires de la direction des études et de la prospective des Douanes (DEPD). S’agissant des importations, elles ont atteint 22,14 mds usd, contre 23,14 mds usd, enregistrant également une baisse de 4,30%.
La même source montre que les hydrocarbures ont représenté l’essentiel des ventes algériennes à l’étranger au cours du 1er semestre 2019 (93,10% du volume global des exportations) en s’établissant à 17,65 mds usd, contre 18,84 mds usd à la même période 2018, en baisse de 6,31%.
Concernant les exportations hors hydrocarbures, elles restent toujours marginales, avec près de 1,31 md usd le 1er semestre 2019, ce qui représente 6,90% du volume global des exportations, contre 1,45 md usd à la même période en 2018, en baisse de 10,01%, selon les chiffres de la DEPD.