La filiale du groupe KouGC (la fratrie Kouninef) Cogral (Corps gras d’Alger) est à l’arrêt. Ses 350 employés sont mis au chômage technique sans rémunération. Broyant du noir, ils expriment leur douleur, leur colère et leur peur, envisageant l’avenir avec pessimisme. Au portail de l’entreprise, située dans l’enceinte du port d’Alger, est accrochée une grande banderole sur laquelle on peut lire : “350 emplois sont menacés de disparition ; notre progéniture a faim ; on veut une solution à la crise de l’entreprise…” Certains parmi les 350 employés expliquent : “On nous a dit que Cogral a été mise à l’arrêt sur décision politique.
Qu’est-ce que cela veut dire pour notre entreprise et pour ses salariés ? Nous n’avons pas perçu de salaire depuis près de deux mois, en raison du blocage des comptes. Tout ce que nous voulons, c’est faire redémarrer Cogral et percevoir nos salaires.” Dans des notes datant respectivement des 6 et 10 juin dernier, la Banque de l’agriculture et du développement rural (Badr) ainsi que la Banque extérieure d’Algérie (BEA) ont avisé le groupe KouGC que ses comptes sont bloqués suite à une réquisition du juge d’instruction de la 5e chambre du tribunal de Sidi M’hamed.
La décision de gel des comptes bancaires a été ainsi prise, alors même que la désignation d’un administrateur devant assurer la continuité de la gestion du groupe est toujours en attente. Les Kouninef, connus pour leur proximité avec la famille Bouteflika, auraient bénéficié d’avantages indus et d’un accès facile aux marchés publics. KouGC est présent dans les travaux publics, la téléphonie et l’agroalimentaire, entre autres secteurs d’activité. Le groupe avait pignon sur rue depuis environ cinq ans, affichant un chiffre d’affaires de l’ordre de 15 milliards de dinars en moyenne annuellement.
Le 24 avril dernier, trois de ses principaux actionnaires, les frères Kouninef, ainsi que le gérant du groupe ont été placés en détention provisoire pour des accusations liées notamment au non-respect des engagements contractuels dans la réalisation de projets publics, trafic d’influence avec des fonctionnaires de l’État pour l’obtention de privilèges et détournement du foncier et de concessions. Ce dont plusieurs experts sont sûrs, cependant, c’est que la plupart des entreprises dont les propriétaires sont en détention provisoire risquent de péricliter, si l’État ne prend pas de mesures adéquates leur permettant de surmonter les difficultés de l’heure.
Youcef Salami