Les tensions politiques s’intensifient au sein du gouvernement français, alors que Les Républicains reprennent une proposition controversée d’Édouard Philippe visant à dénoncer l’accord bilatéral avec l’Algérie de 1968. Avant le débat parlementaire prévu ce jeudi, Emmanuel Macron a publiquement désapprouvé cette stratégie.
L’ancien Premier Ministre, Édouard Philippe, persiste dans sa recommandation de dénoncer l’accord de 1968 avec l’Algérie, exprimant cette position lors d’une interview à l’Express en juin dernier. Cette initiative a trouvé écho chez Les Républicains, qui ont intégré cette proposition dans leur niche parlementaire le 7 décembre à l’Assemblée.
Emmanuel Macron a vivement réagi à cette démarche, exprimant son mécontentement lors du conseil des ministres du 6 décembre. « Je n’avais pas compris que la politique étrangère de la France était définie au Parlement », a-t-il déclaré, remettant en question l’ingérence du Parlement dans les affaires étrangères. Les députés ont finalement rejeté la proposition de la droite.
Bien que le gouvernement se montre ouvert à la révision de l’accord bilatéral, la 1ère Ministre, Elisabeth Borne, a souligné que des discussions en ce sens étaient déjà en cours. Cependant, l’exécutif craint qu’un vote parlementaire ne compromette les relations diplomatiques sensibles avec Alger, actuellement en voie d’apaisement.
Analyse de l’accord de 1968
Pour comprendre l’enjeu de cette proposition, il est essentiel de revenir à l’année 1968, six ans après la fin de la guerre d’Algérie. Le 27 décembre de cette année-là, le général de Gaulle et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires Etrangères et futur président algérien, signent un accord qui crée un statut particulier pour les ressortissants algériens en France. Cet accord régule la circulation, le séjour et l’emploi de ces ressortissants.
À cette époque, la France connaît une croissance économique soutenue, marquée par les Trente Glorieuses. Pour répondre à la demande de main-d’œuvre, l’accord facilite l’entrée des Algériens sur le territoire français. Ils sont autorisés à s’établir librement pour exercer des activités commerciales ou des professions indépendantes. Bien que le délai d’obtention d’un titre de séjour de dix ans soit raccourci, les étudiants algériens perdent certains avantages, notamment pour l’obtention d’un emploi étudiant.
🤪 𝗠𝗔𝗖𝗥𝗢𝗡 𝗘𝗧𝗔𝗟𝗘 𝗦𝗢𝗡 𝗜𝗚𝗡𝗢𝗥𝗔𝗡𝗖𝗘 𝗘𝗧 𝗦𝗢𝗡 𝗠𝗘𝗣𝗥𝗜𝗦 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗖𝗢𝗡𝗦𝗧𝗜𝗧𝗨𝗧𝗜𝗢𝗡
Furieux que des députés LR veuillent remettre en cause l'accord🇫🇷🇩🇿de 1968 sur l'immigration, Macron s'en indigne en se croyant finement ironique :
«𝑱𝒆… pic.twitter.com/8I6srWAt80— François Asselineau (@f_asselineau) December 6, 2023
Évolution de l’accord depuis 1968
Depuis sa signature en 1968, l’accord a été modifié trois fois, en 1985, 1994 et 2001, principalement pour aligner le statut dérogatoire des Algériens sur celui du droit commun des étrangers, devenu plus avantageux avec le temps. Cependant, au cours des 22 dernières années, le texte est demeuré inchangé. Les critiques de droite estiment qu’il est obsolète, qualifiant l’accord d’autorisation automatique à l’immigration, tandis que d’autres, comme le sénateur centriste Philippe Bonnecarrère, estiment qu’il demeure équilibré.
À noter que le projet de loi sur l’immigration discuté ce mois-ci à l’Assemblée nationale ne concernera pas les Algériens. Les Républicains semblent profiter de cette proposition pour diviser la majorité présidentielle. Cette stratégie semble porter ses fruits, à en juger par la réaction véhémente d’Emmanuel Macron.
En conclusion, la proposition de dénoncer l’accord bilatéral franco-algérien suscite des débats houleux au sein du gouvernement français, exposant des divergences significatives sur la politique étrangère et l’immigration. Alors que l’exécutif se montre ouvert à la révision de l’accord, la crainte de perturber les relations diplomatiques avec l’Algérie persiste, mettant en lumière la délicate équation entre politique intérieure et relations internationales.