Dossier de la mémoire Algérie – France : Driencourt livre son analyse

Dossier de la mémoire Algérie – France : Driencourt livre son analyse

Dans un entretien accordé au média français Le Figaro, l’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, est revenu sur les questions mémorielles entre l’Algérie et la France et a évoqué différents sujets à l’instar du Hirak et de l’immigration. Des sujets qu’il avait d’ailleurs traités dans son livre « L’énigme Algérienne », à travers lequel il retrace son parcours de diplomate.

Interrogé sur le dossier de la mémoire, le diplomate français, auteur du livre « L’énigme algérienne, Chroniques d’une ambassade à Alger », Xavier Driencourt, a estimé que « pour la France, l’Algérie était un objet politique étranger, comme pourrait l’être l’Ukraine ou la Chine », notant toutefois, qu’ « elle était aussi un objet de politique intérieure, compte tenu de l’importance de la population française ayant un lien avec l’Algérie ».

Lors de cet entretien, disponible en audio dans la rubrique VOX du même média, Xavier Driencourt a évoqué les déclarations « ambiguës et contradictoires » du Président français, Emmanuel Macron, concernant le dossier de la mémoire et n’a pas manqué de souligner que « l’objectif du Président français était de réactiver le projet de “traité d’amitié” entre les deux pays”, mais aussi “de normaliser les relations avec Alger ».

« Il s’est appuyé sur les travaux de Benjamin Stora, et a commencé par cette tonitruante évocation de «crimes contre l’humanité» supposément perpétrés par la France en février 2017, alors qu’il n’était encore que candidat à l’Élysée. Mais au fil des déclarations, il s’est aperçu qu’il n’obtenait aucun «retour» de la part de ses interlocuteurs », a expliqué l’ancien ambassadeur.

Ainsi, le diplomate français a justifié les déclarations d’Emmanuel Macron, notamment celle sur « la rente mémorielle exploitée par l’Algérie » par « l’absence de répondant » du côté algérien. En effet, Xavier Driencourt a rappelé qu’ « après la publication du rapport de l’historien Benjamin Stora en janvier 2021, son homologue algérien chargé des questions mémorielles, Abdelmadjid Chikhi, avait déclaré qu’il s’agissait d’un problème franco-français sans plus de commentaires ».

« Nous avons besoin d’une Algérie stable dans les décennies à venir », Driencourt

Sur un autre plan, le diplomate français s’est exprimé au sujet de l’évolution du système politique algérien depuis le mouvement populaire du Hirak. Selon lui, « le Hirak représentait une réelle volonté de changement après 20 ans de Bouteflika ». Le diplomate français a également estimé que « d’autres mouvements, progressistes, couvent », rajoutant que « cette question est centrale, notamment pour la France ». « Nous avons besoin d’une Algérie stable dans les décennies à venir, ce qui ne signifie pas pour autant une Algérie figée dans le statu quo », a encore affirmé Xavier Driencourt.

Par ailleurs, l’ancien ambassadeur de France à Alger est revenu sur le nombre important de demandes d’obtention de visas vers la France et a expliqué que cet attachement revenait au fait que de nombreux algériens avaient des proches de l’autre côté de la Méditerranée. « Pour les Algériens, la France est l’ancien colonisateur qu’on critique, mais c’est aussi le pays proche où chacun a un frère, une grand-mère, un cousin… Tout en critiquant, on est conduit à demander qui, un visa, qui une place au lycée français d’Alger ou à la Sorbonne… », a expliqué le diplomate français.

Xavier Driencourt a noté que cet attachement « perdure malgré l’éloignement économique entre les deux pays », révélant, dans ce même sens, que « les entreprises françaises fournissaient 16 % du marché algérien en 2008, alors qu’elles ne fournissent plus que 10 % aujourd’hui ». « Les décideurs algériens se sont tournés massivement vers l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne et bien sûr la Turquie et la Chine. Mais quand il s’agit de la santé ou de l’éducation, le réflexe français prévaut largement, par commodité », a-t-il expliqué.