Froides concessions électorales

Froides concessions électorales

Mahdi Boukhalfa

Froides concessions électorales
Pas de pression fiscale ni de hausse des prix des carburants, de l’eau, de l’électricité et du gaz. L’année 2019 sera en mode «zen» pour les Algériens, après les hausses des deux précédents exercices budgétaires. La baisse drastique des recettes pétrolières combinée à une hausse incontrôlée des importations a fait que le gouvernement donne un sérieux tour de vis à sa politique économique en 2017 et 2018, sans zapper la prise en charge sociale. Pour 2019, il semblerait que les choses vont évoluer dans le sens d’une baisse de la pression fiscale en direction des ménages, avec une hausse prévue dans le projet de loi de finances, examiné hier en Conseil des ministres, du budget réservé aux transferts sociaux.
Cette augmentation sera de 1.772,5 milliards de dinars, soit 8,2% du PIB, une hausse de 12,5 mds de DA par rapport à la loi de finances 2018. C’est énorme, et cela cache mal ce souci de recherche de la paix sociale en prévision de la prochaine présidentielle dans la confection, cette année, de la loi de finances pour 2019. Et, si le candidat de la majorité présidentielle est connu, il reste que pour le moment, le président Bouteflika n’a pas encore répondu aux appels de ses partisans, dont le FLN. Et, dans la perspective de cette élection, il semblerait que le gouvernement s’est octroyé un «break» sur le front financier pour ne pas trop accabler les citoyens de nouvelles taxes et de hausse des prix des principaux produits de consommation, les carburants, l’eau ou l’électricité dont la subvention fait toujours débat. Avec l’élection présidentielle d’avril prochain, il est évident qu’il y aura une pause dans la politique fiscale du gouvernement, qui va cette année «casser» la tirelire pour s’assurer un climat social favorable à la tenue d’un bon scrutin. Le ministre des Finances n’a pas caché qu’il n’y aura pas de nouvelles taxes en 2019.
Et, là, le gouvernement entend marquer son empreinte, car l’avant-projet de loi de finances 2019 prévoit une enveloppe budgétaire, au titre du soutien aux familles nécessiteuses, de 445,3 milliards de dinars, dont 208,4 milliards de dinars destinés à la subvention des prix des produits de base (céréales, lait, sucre et huile alimentaire). Les subventions de ces produits représentent à elles seules 11,8% de l’ensemble des transferts sociaux pour 2019. Alors, il est évident que la politique sociale du gouvernement ne fléchira pas d’un cran pour le moment, d’autant que la hausse actuelle des prix de l’or noir est un élément accélérateur de la prise en charge de la demande sociale. Le président Bouteflika, qui a présidé le Conseil des ministres, ne veut pas en fait contrarier la prochaine échéance électorale, en faisant autant de concessions au front social qu’il le faut, même dans le cas où il ne serait pas candidat. Il est indéniable que le gouvernement a fait des concessions sur le plan fiscal au niveau du projet de loi de finances 2019, pour ne pas perturber la prochaine échéance électorale, en prévision d’un probable 5e mandat du président Bouteflika.
Car, si le gouvernement n’est pas favorable au suicide financier, en restant attentif aux grands équilibres budgétaires, et, surtout, à récupérer sur le plan fiscal, d’une manière ou d’une autre, ce qu’il «sacrifie» au front social, la fragilité de la politique financière de l’exécutif reste cependant réelle, avec le recours au financement non conventionnel. Le fait d’éponger les déficits du Trésor en recourant «à la planche à billets», et à financer la paix sociale pour s’assurer un bon scrutin, n’est toutefois pas une bonne stratégie, en l’absence de croissance économique.