Fuite des capitaux et rapatriement de l’argent de la garantie: Le gouvernement ordonne une enquête

Fuite des capitaux et rapatriement de l’argent de la garantie: Le gouvernement ordonne une enquête

Les années d’or de l’automobile, à savoir 2011, 2012 et 2013, semblent avoir profité aux uns, ceux qui se sucrent sur le dos de l’État algérien, mais pas aux autres, ceux qui payent rubis sur l’ongle leurs impôts, versent leur argent dans les banques algériennes et rapatrient l’argent de la garantie redevable par les maisons mères deux ans après la vente des produits. Surtout pas aux autres qui, tenus de déclarer la comptabilité détaillée de l’exercice annuel, obéissent aux règles fiscales qui régissent les entreprises de droit algérien.

Mais malheureusement, on est loin du compte, si on se fie aux chiffres déclarés par les uns et les autres, y compris ceux qui ont fait des chiffres d’affaires (CA) faramineux et qui déclarent un bénéfice infinitésimal. Jeudi dernier, le site TSA révélait que “plusieurs concessionnaires automobiles sont visés par des enquêtes fiscales (…). La direction des grandes entreprises (DGE) de la direction générale des impôts (DGI) a établi une liste de concessionnaires automobiles à contrôler”.

La publication des exercices au CNRC (Centre national du registre du commerce) pourrait confirmer ou infirmer ces informations. Mais, jusqu’ici, cet aspect a fortement été négligé par le gouvernement qui a pris la décision d’engager des enquêtes approfondies sur certains concessionnaires. Car, il y aurait même des concessionnaires automobiles qui ont réalisé des résultats dépassant leurs propres prévisions et qui ont déclaré un bilan en dessous du seuil d’un chiffre d’affaires.

Non seulement ces entreprises n’honorent pas leurs impôts, mais elles transfèrent leurs bénéfices à l’étranger à travers des procédés que les enquêteurs vont s’atteler à élucider.

De la loi, de la liste des fraudeurs

et des interrogations

Même si on ne détient pas toutes les statistiques liées à ces cas de fraude flagrants, il n’en demeure pas moins que les représentations des marques européenne, américaine et asiatique sont concernées par ces pratiques qui portent un grave préjudice au budget de l’État. Cette enquête gouvernementale intervient au moment où un nouveau cahier des charges vient réguler un tant soit peu l’exercice de cette activité et l’anarchie qui règne dans un marché ouvert à toutes les potentialités. Loin de remettre en cause sa substance, cette loi ne prend en charge que le volet inhérent aux surfacturations des produits via des sociétés-écran établies à l’étranger pour frauder et provoquer une fuite des capitaux qui se chiffre en milliards de dinars.

D’où ces interrogations : est-ce que les clauses relatives aux fausses déclarations sur le bénéfice et le rapatriement de l’argent sur la garantie seront pris en considération dans les textes d’application inhérents aux chapitres financement, investissement et placement dans cette enquête ? Mieux, n’est-il pas temps que les services des impôts mettent le holà sur les fausses déclarations et les anomalies qui entachent le compte de résultat de chaque concessionnaire et de procéder à une lecture analytique basée sur les déclarations des concurrents ? Autrement dit, est-il normal que certains concessionnaires payent le double de l’IBS de ce que versent à l’État deux ou trois concessionnaires ? À en croire les résultats déclarés et publiés au CNRC, il est temps également de se pencher sur une comparaison négative sur l’IBS (impôt sur le bénéfice des sociétés) afin de déterminer le résultat exact d’exploitation négatif. Cette situation s’explique par la différence temporelle et temporaire (impôt différé actif) ainsi que la différence permanente entre le résultat fiscal et le résultat comptable. Autrement dit, il ne serait pas exclu que les enquêteurs tombent sur des déclarations sur les charges fictives ou encore sur la surfacturation sur la pièce de rechange.

Rapatriement de l’argent de la

garantie : des milliards de dinars !

L’autre aspect réside dans le fait que certains concessionnaires ne rapatrient pas les sommes colossales déduites sur la garantie payée par la maison mère à sa représentation en Algérie. Car, chaque produit vendu en Algérie est garanti par le concessionnaire. Le client bénéficiera de deux ans ou d’une extension de garantie dûment payée par le concessionnaire. Cet argent est systématiquement remboursé par la maison mère au concessionnaire après un délai de rigueur arrêté entre les deux parties. Or, il se trouve que certains concessionnaires placent cet argent à l’étranger provoquant un manque à gagner astronomique pour le budget de l’État et aux impôts. Sachant que chaque acte commercial est imposable, ces pratiques ont été dénoncées par l’Association des concessionnaires automobiles algériens (AC2A). D’autant que les investigations, qui seront par ailleurs suivies de près par le Premier ministère et les ministères chargés du secteur, risquent d’éclabousser des représentants officiels de marques automobiles qui, jusqu’ici, estiment être à l’abri de redressements fiscaux, voire de retraits d’agrément.

Il faut savoir que ces pratiques ne sont pas le propre de notre pays où le marché de l’automobile n’a que huit ans en termes de croissance. Mais, à l’aube de l’ouverture du champ de l’industrie automobile, le gouvernement devra revoir sa copie pour assainir un marché où règne une “anarchie organisée”, où tout le monde trouve son compte. Notamment les lobbies.

Aujourd’hui, la question est surtout de savoir si les services des impôts comptent aller jusqu’au bout pour faire éclater la vérité sur les pratiques malsaines de certains concessionnaires qui profitent d’un marché de 6 milliards de dollars US.