Gabon : Ping déplore entre « 50 et 100 morts », le camp Bongo dément

Gabon : Ping déplore entre « 50 et 100 morts », le camp Bongo dément

060916-ping-bongo.jpgLes camps du président réélu Ali Bongo Ondimba et celui de son rival Jean Ping, qui conteste le résultat du scrutin, poursuivaient mardi leur bras de fer. Interrogés en exclusivité sur France 24, les adversaires se contredisent, point par point.

L’opposant gabonais Jean Ping s’est exprimé, mardi 6 septembre, sur l’antenne de France 24. Joint par téléphone, le candidat à la présidentielle, qui conteste la victoire de son adversaire Ali Bongo Ondimba, a d’abord affirmé ne pas être « libre de [ses] mouvements ».

Il a ensuite nié être à l’origine de l’appel à la grève générale pourtant publié sur ses comptes Facebook et Twitter. « Je n’ai pas demandé une grève générale. Les documents qui circulent n’émanent pas de moi. […] Les syndicats de la société civile sont les seuls habilités à demander une grève générale. […] Et oui, je pense que ce sont des manipulations probablement qui sont faites par les uns ou par les autres. D’ailleurs le pouvoir est habitué à ce type de manipulations. »

Pour voir l’interview exclusive de Jean Ping sur vos mobiles et tablettes, cliquez ici.

Jean Ping a par ailleurs estimé que le bilan des violences électorales s’élève à « entre 50 et 100 morts ». « Vous voyez, a-t-il interpellé, le pouvoir tue tous les jours. L’ONU, la France, l’Union européenne, l’Union africaine, m’ont demandé de lancer un appel au calme. Je l’ai fait, et immédiatement, les difficultés que l’on observait ici et là, se sont arrêtées. […] On a fait le même appel du côté d’Ali, au pouvoir, et il a continué à tuer nuit et jour. » L’AFP donne pour l’heure un bilan de 7 morts, tandis que le ministère gabonais de l’Intérieur n’en compte que trois.

Concernant la médiation proposée par l’Union africaine (UA), qui a annoncé être prête à envoyer une délégation « composée de chefs d’État africains, accompagnés par de hauts responsables de la Commission de l’UA et des Nations unies » au Gabon, Jean Ping a dit être prêt à participer à toutes médiations : « Nous acceptons toutes les médiations ! Parce que nous voulons que la démocratie et la paix triomphent ».

« Monsieur Ping est dans des affabulations »

Interviewé quelques heures plus tard sur France 24, le porte-parole du gouvernement gabonais, Alain Claude Bilie-By-Nze, a, lui, répondu point par point à son opposant qu’il accuse non seulement de mensonge mais surtout d’être à l’origine de la violence dans le pays. « M. Ping est dans des affabulations, il est depuis le départ dans une stratégie de violence visant à plonger le pays dans le chaos », dénonce le porte-voix d’Ali Bongo Ondimba, allant jusqu’à accuser son opposant d’ »attitude génocidaire ».

« C’est lui [Jean Ping] la violence, avec ses mots comme ‘cafard’ qui appellent au génocide, à la haine. […] Les médias internationaux parlent de l’attaque du QG de M. Ping mais personne ne parle de ce jeune homme qui a été retrouvé dans ce même QG ligoté, torturé, attaché », renchérit-il, dénonçant une couverture biaisée des événements.

Alain Claude Bilie-By-Nze conteste le bilan des morts évoqué par Jean Ping. « Lorsqu’il parle de 50 à 100 morts, il serait bien incapable de les identifier et de les localiser », estime-t-il. Il réfute également les allégations concernant la disparition d’une quinzaine de ressortissants français annoncée lundi soir par le Quai d’Orsay. « L’ambassadeur de France au Gabon a été reçu par le ministre des Affaires étrangères et il est venu avec 6 noms de personnes identifiées comme des Gabonais. Manifestement, ils ont été pris parmi les casseurs dans la nuit du 30 au 31 », justifie-t-il, rappelant que la double nationalité n’est pas reconnue au Gabon.

Il balaye ensuite les déclarations de l’UE, qui a annoncé mardi avoir relevé « une évidente anomalie » dans les résultats de l’élection du 27 août. « La première anomalie, c’est que les observateurs européens ont passé du temps avec l’opposition. Ils ont voulu transporter des urnes et participer au décompte, ce qui n’était pas prévu dans le contrat avec l’État gabonais », note M. Bilie-By-Nze, déniant toute autorité aux observateurs internationaux, considérés comme « partie prenante ».

Appelant à un retour au calme « par la voie légale », M. Bilie-By-Nze enjoint Jean Ping à saisir la Cour constitutionnelle pour obtenir un recomptage des voix – un recours rejeté par ce dernier qui accuse l’institution d’être soumise au camp Bongo. Seul point de concorde entre les deux camps : la médiation de l’UA. Comme Jean Ping, M. Bilie-By-Nze se dit ouvert à cette option. « Si l’UA souhaite venir à Libreville, nous n’allons pas refuser », assure-t-il.