La crise que connaît actuellement l’euro est «tout bénéfice» pour l’Algérie. C’est ce qu’a souligné hier Brahim Gacem, expert en finance internationale, au cours d’une conférence débat qu’il a animée au centre de presse El Moudjahid.
La raison en est simple : la monnaie européenne se dépréciant, les importations algériennes de l’Europe reviendront moins cher.
C’est différent de la crise financière internationale de 2008-2009, où les cours du pétrole s’étaient effondrés et où l’euro avait pris de la valeur, entraînant des répercussions négatives sur la balance des paiements.
De plus, la détérioration de la monnaie unique fragilise les Etats de l’UE, les mettant dans une position difficile sur le plan économique et financier.Cette situation, l’Algérie de même que tous les pays émergents devraient en tirer profit et mieux négocier leurs relations avec les Vingt-Sept.
L’Algérie aura le 15 juin prochain à Bruxelles une réunion avec le Conseil européen, pour essayer de mettre à plat certaines questions en rapport avec l’accord d’association avec l’UE.
La dépréciation de l’euro s’invitera-t-elle dans ces débats ? Les négociateurs algériens seront-ils dans une position confortable pour négocier au mieux les clauses de cet accord ? Pour Brahim Gacem, en temps de crise, les Etats «se barricadent», se protègent, protègent leurs échanges, en renforçant les barrières douanières.
Cette manière de faire, les Européens en usent aujourd’hui et ils ne peuvent pas la contester à l’Algérie, a-t-il avancé. Ce procédé, les négociateurs algériens peuvent le faire valoir, a-t-il recommandé.
Au sujet des dernières dispositions prises dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009, l’invité du forum d’El Moudjahid dira que ce sont des mesures «réfléchies» et «justifiées» dans une économie moderne. Ce sont des dispositions «normales», comme on en trouve aux «quatre coins du monde», a-t-il ajouté.
A l’en croire, l’importation de véhicules, par exemple, payée en devise forte, n’apporte pas grand-chose à l’économie nationale, le réseau des concessionnaires créant «peu d’emplois». Tempérant ses propos, il a eu cette phrase : «Que l’Algérie en importe en temps normal [le baril à 149 dollars], cela paraît normal, mais qu’elle le fasse alors que les cours du brut ont été divisés par trois, cela me semble excessif.»
M. Gacem a par ailleurs estimé qu’il est exclu que la Grèce, affectée de plein fouet par une crise sans précédent, «quitte» l’Union européenne. De même, il a avancé qu’il est «impensable» que l’Allemagne tourne le dos à l’UE, au prétexte qu’il y a des pays, à l’image de la Grèce, qui ne mettent pas de la rigueur dans leur budget. Avant de dire oui, l’Allemagne s’était opposée à l’aide financière dont a bénéficié Athènes.
C’est un matelas de 110 milliards de dollars pour sauver un Etat enlisé dans une crise. Justifiant l’attitude des Allemands, le conférencier a livré quelques données significatives : les employés germains partent en retraite à l’âge de 67 ans, les Grecs à 52 ans.
En plus, les Grecs bénéficient d’un treizième et d’un quatorzième salaire. Ces avantages dans la corbeille grecque se conjuguent cependant au passé, après que l’Etat grec eut opéré un tour de vis dans les budgets.Brahim Gacem a, dans une communication introductive aux débats, brossé un tableau de l’évolution de la crise financière internationale.
Il a ainsi évoqué la bulle Internet de 2000, la politique expansive de 2006, celle restrictive (2006-2007), la crise du crédit immobilier aux Etats-Unis (2007-2008), et enfin la politique budgétaire expansive (2008-2009). Il a expliqué que la politique restrictive a entraîné onze augmentations des taux d’intérêts, qui sont passés de 1 à 5%.
Par Youcef Salami