Gaz naturel vers l’Europe: Sonatrach perdrait son monopole

Gaz naturel vers l’Europe: Sonatrach perdrait son monopole

Dans les négociations actuelles et futures autour des nouveaux contrats gaziers, Sonatrach pourrait abandonner le principe d’indexer les prix sur ceux du marché spot du brut et orienterait le gouvernail vers d’autres modèles de commercialisation.

Outre l’indexation des nouveaux contrats gaziers sur le prix spot du gaz en Europe, au niveau des hubs d’approvisionnement, et non plus sur le prix spot du pétrole, Sonatrach est en passe de faire une autre concession, mais non des moindres, à certains de ses partenaires. La compagnie publique des hydrocarbures devrait perdre son monopole exclusif sur les exportations de gaz naturel. Certains de ses grands partenaires, dont l’italien Eni, seront autorisés à exporter le gaz produit en Algérie. Cela marque un tournant majeur dans la politique de commercialisation de Sonatrach, voire dans son rapport au partenaire étranger, considéré jusqu’ici comme un simple associé dans les activités recherche, exploration et production. Le groupe public des hydrocarbures, qui doit surmonter l’échec des quatre derniers appels d’offres, semble apporter des correctifs et des ajustements à sa politique tant dans l’amont pétrolier et gazier que dans son aval. Sonatrach compte prendre ce tournant en misant sur l’option de coentreprise qu’elle envisage de créer avec certains de ses partenaires. C’est cette même option qui a été retenue dans son projet d’investir dans le négoce international et dans la commercialisation des produits pétroliers issus de la raffinerie d’Augusta en Italie. Une coentreprise est actuellement en cours de création avec certaines majors et dans laquelle Sonatrach détiendrait la majorité des actions, nous dit-on.

Le groupe public des hydrocarbures entend étendre sa nouvelle politique commerciale à la vente du gaz produit en Algérie en association avec ses partenaires. Dans les négociations actuelles et futures autour des nouveaux contrats gaziers, Sonatrach pourrait abandonner le principe d’indexer les prix sur ceux du marché spot du brut et orienterait le gouvernail vers d’autres modèles de commercialisation. L’idée retenue, du moins avec l’italien Eni, avons-nous appris, consiste à créer une coentreprise pour l’exportation du gaz produit en Algérie, dans laquelle les deux partenaires partageront à la fois les efforts, les risques et les profits. La semaine dernière, Sonatrach et Eni ont convenu des conditions commerciales pour l’année 2018-2019 en ligne avec le marché du gaz et devraient entamer des conciliabules autour de l’éventualité de proroger le contrat au-delà de 2019. Sonatrach n’a pas divulgué les détails de l’accord conclu la semaine dernière à Milan. Une source de l’entreprise accrédite l’idée d’une révision de certaines clauses du partenariat pour l’étendre au volet de l’exportation du gaz.

Les contrats avec les partenaires étrangers sont basés jusqu’ici sur le principe de partage de la production, tandis que Sonatrach se collait la mission d’exporter le gaz et de négocier les contrats en solo avec ses clients. Après s’être investi dans des négociations aux fins de créer une joint-venture spécialisée dans le négoce international et la commercialisation des produits pétroliers, le groupe Sonatrach semble vouloir étendre sa nouvelle stratégie commerciale à l’exportation du gaz, à en croire une source de l’entreprise. Les changements de stratégie chez la compagnie publique des hydrocarbures obéissent aux risques de modification des tendances du marché dans les années à venir. Sonatrach a également investi dans la diversification de ses clients, en orientant une partie des volumes exportés vers le marché spot. En tout cas, si ce deal Sonatrach-Eni dans l’exportation du gaz vers l’Europe venait à se concrétiser, il marquerait un tournant majeur dans la politique de commercialisation du groupe public des hydrocarbures.

Ali Titouche