Graciée, Jacqueline Sauvage sera libre en avril

Graciée, Jacqueline Sauvage sera libre en avril

La remise gracieuse de sa peine par le président de la République devrait permettre à la mère de famille de bénéficier d’une libération dès avril prochain.

Le président de la République, en application de l’article 17 de la Constitution et après avis du ministre de la Justice, a décidé d’accorder à Jacqueline Sauvage une remise gracieuse partielle de sa peine d’emprisonnement de 2 ans et 4 mois ainsi que de l’ensemble de la période de sûreté qu’il lui reste à accomplir. Cette grâce lui permet de présenter immédiatement une demande de libération conditionnelle. Comme le précise l’Élysée dans un communiqué, « le président de la République a voulu, face à une situation humaine exceptionnelle, rendre possible, dans les meilleurs délais, le retour de Mme Sauvage auprès de sa famille, dans le respect de l’autorité judiciaire ».

« Concrètement, le président a fait sauter le verrou de la peine de sûreté et il permet à Jacqueline Sauvage de pouvoir être accessible à une libération conditionnelle dès la mi-avril 2016 », se sont aussitôt réjouies ses avocates, Janine Bonaggiunta et Nathalie Tomasini, reçues une nouvelles fois dimanche à 18H00 par le chef de l’Etat qui les a informées de sa décision. Jacqueline Sauvage avait tué son mari en 2012 après plusieurs dizaines d’années d’un enfer conjugal fait de coups et d’abus sexuels de ses propres filles et avait été condamnée à 10 années de réclusion par la cour d’assises du Loiret. L’avocate générale avait requis entre 12 et 14 ans de prison, mais sans retenir la préméditation contre Jacqueline Sauvage, 65 ans, initialement mise en examen pour assassinat.

La famille reçue vendredi dernier

Fallait-il gracier Jacqueline Sauvage ? François Hollande avait reçu vendredi les filles et les avocates de cette femme condamnée à dix ans de réclusion pour le meurtre de son mari violent, avant de se donner « le temps de la réflexion » pour prendre sa décision. La réflexion n’aura duré que deux jours. Sylvie, Carole et Fabienne Marot, qui réclamaient une grâce présidentielle pour leur mère, avaient rencontré le chef de l’État vendredi après-midi, pendant une heure, avec les avocates de Jacqueline Sauvage, maîtres Nathalie Tomasini et Janine Bonaggiunta.« Ça s’est extrêmement bien passé. Le président a été très à l’écoute. Aujourd’hui, il faut qu’il trouve la bonne réponse », avait déclaré Me Tomasini à la presse.

Entre 100 et 200 personnes avaient par ailleurs manifesté samedi dernier à Parispour demander sa grâce, et des militantes des Femen ont manifesté seins nus vendredi devant sa prison à Saran (Loiret). Une pétition appelant à la grâce présidentielle avait recueilli, vendredi, près de 400 000 signatures sur le site Change.org. Juristes et éditorialistes étaient plus partagés sur le fait de gracier ou non Jacqueline Sauvage, alors que l’opinion publique avait massivement pris fait et cause pour cette femme.

« Il nous terrifiait »

Lors de l’audience, les filles de la victime avaient témoigné violemment à charge contre leur père, entrepreneur d’une société de transport, mort à 65 ans. « Notre père est décédé, et pour moi, c’est un soulagement », avait déclaré l’une d’elles, violée à l’âge de 16 ans et victime de graves violences alors qu’elle était devenue une adulte. « Il était sans pitié, c’était plus fort que lui », avait ajouté sa soeur aînée. « Il m’a détruite intérieurement, je n’arrive pas à tourner la page », avait ajouté la troisième. Toutes trois avaient été violées, battues comme l’était leur mère.

Leur frère, également victime des violences de son père, s’est suicidé la veille du jour où leur mère a finalement tué son mari. Au coeur de l’audience, la présidente de la cour Catherine Paffenhoff a en revanche longuement interrogé sur la passivité de l’épouse face à ce mari tyran, gros consommateur d’alcool, la non-dénonciation des coups, des incestes. « On avait peur de lui, il nous terrifiait », a répondu l’une de ses filles. Reste maintenant à voir si cette décision de François Hollande débouchera dans les mois à venir sur une évolution des lois quant à la notion de légitime défense.