Vendredi dernier, la France annonce la prochaine ouverture des archives sur « les enquêtes judiciaires » de la guerre d’Algérie. En réaction, des spécialistes algériens s’interrogent sur les véritables intentions de Paris, notamment le timing de cette nouvelle démarche.
La ministre française de la Culture Roselyne Bachelot a annoncé vendredi 10 décembre la prochaine ouverture des archives sur « les enquêtes judiciaires » de la guerre d’Algérie (1954-1962). Selon elle, il s’agit d’une ouverture des archives avec 15 ans d’avance sur les enquêtes judiciaires de gendarmerie et de police qui ont rapport avec la guerre d’Algérie.
Il convient de noter que cette déclaration est intervenue dans un contexte de relations diplomatiques tendues entre les deux pays. Qui plus est, cette annonce a été faite deux jours après la visite à Alger du ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian.
De l’autre rive de la Méditerranée, cette nouvelle démarche est reçue avec beaucoup de méfiance et moult interrogations, notamment de la part des spécialistes. L’on s’interroge désormais sur le timing, mais aussi sur les véritables intentions de la France.
« Pourquoi maintenant ? »
C’est le cas, à titre d’exemple, du politologue Abdelkader Soufi. Dans une déclaration rapportée par le quotidien El Moudjahid, il s’interroge d’emblée « quant aux intentions réelles ». S’interrogeant aussi ; « pourquoi maintenant ? », il livre ses appréhensions quant à quelque « forme de pression et de chantage » sur l’Algérie à cause de ses positions diplomatiques.
Affirmant que ce timing doit être analysé minutieusement, le politologue se demande pourquoi la France n’ouvre pas les archives sur les autres dossiers en lien avec la guerre d’Algérie, si vraiment elle a l’intention d’aller vers l’avant dans le règlement des différends ?
« Pourquoi ne pas ouvrir les archives des essais nucléaires ? Pourquoi on n’ouvre pas toutes les archives de la colonisation ? Pourquoi uniquement les archives, et pourquoi de la gendarmerie précisément ? », s’est demandé l’intervenant.
S’agit-il d’un « forcing » ?
Ainsi, sans passer par quatre chemins, il y voit carrément « un forcing pour amener l’Algérie à changer ses positions par rapport à certaines questions, sécuritaires ». Or, il martèle que « ça sera peine perdue ».
Pour sa part, l’enseignant à la faculté des sciences politiques et relations internationales d’Alger, le Dr Mohamed Khodja, estime qu’il s’agit tout simplement d’une manœuvre électorale ».
Dans une déclaration rapportée par le même journal, il remet en cause la partie de l’archive que compte ouvrir la France, en l’occurrence ceux sur les enquêtes judiciaires de gendarmerie et de police.
A ce propos, il déclare que « la France a mené la guerre avec son armée et non pas avec sa police et sa gendarmerie ». D’ailleurs, il préconise d’ouvrir plutôt « l’archive militaire de 1954 à 1962 ».