Haï Nedjma: Elle accuse son demi-frère de viol pour quitter la maison

Haï Nedjma: Elle accuse son demi-frère de viol pour quitter la maison

M. Nadir

Haï Nedjma: Elle accuse son demi-frère de viol pour quitter la maison
  S. Houari, jeune homme de 29 ans, a-t-il réellement sexuellement abusé de Zohra, sa demi-sœur de 17 ans, ou celle-ci l’a-t-elle injustement accusé pour se venger de ce demi-frère qui surveillait son comportement et n’hésitait pas à la battre lorsqu’elle parlait aux garçons ? C’est ce que le tribunal criminel de première instance a eu à déterminer, hier matin, en l’absence de la présumée victime et plaignante.

Plainte pour attentat à la pudeur

Les faits de cette triste affaire remontent à janvier 2017 lorsque S. Zohra, lycéenne de 17 ans habitant dans le quartier de Nedjma, s’est présentés à la police pour porter plainte contre Houari. Dans sa déposition, elle affirme que son demi-frère et principal soutien de la famille depuis le décès du père en 2010, abusait d’elle de manière régulière et la contraignait à des rapports intimes contre-nature. Un examen médical mettra en lumière une ancienne fissure et des lésions qui établissent que l’adolescente a effectivement subi des rapports sexuels violents. Interpellé et interrogé, le suspect s’offusque et jure n’avoir jamais approché sa demi-sœur de manière aussi abjecte. Il affirmera qu’au contraire, il subvenait à ses besoins ainsi qu’à ceux des autres membres de sa famille, qu’il considérait Zohra et ses sœurs comme ses propres sœurs et que jamais l’idée de les approcher de manière inappropriée ne lui avait traversé l’esprit. Il reconnaîtra qu’il lui arrivait de les battre lorsque l’honneur de la famille était en jeu. Et justement, quelques jours avant le dépôt de plainte pour attentat à la pudeur, il avait surpris Zohra en train de discuter avec un inconnu devant le domicile familial. «Je rentrais du travail et quand le garçon m’a aperçu, il a pris la fuite. J’ai demandé des explications à ma sœur et je l’ai frappée», racontera-t-il en suggérant que la surveillance des mœurs de ses sœurs était peut-être la raison qui a poussé Zohra à porter plainte.

«Mœurs légères»

Après enquête et instruction du dossier, le magistrat instructeur décidera de disposer de suffisamment d’éléments à charge pour inculper Houari d’attentat à la pudeur avec violences, selon l’article 335, alinéa 1 du code pénal, qui prévoit une peine comprise entre cinq et dix ans de réclusion à temps.

A la barre, S. Houari maintient ses déclarations. «Je n’ai jamais abusé de ma sœur», dira-t-il d’entrée en rappelant, à la demande de la présidente du tribunal, les faits qui se sont produits ce dimanche 8 janvier 2017. «C’est vrai que je l’ai frappée ce jour-là à cause de son comportement (…), elle avait une attitude qui ne me plaisait pas et, d’ailleurs, elle a quitté la maison depuis quelque temps et elle est tombée enceinte (…). C’est tout ce qu’elle cherchait», ajoutera-t-il comme pour souligner la justesse de son jugement. Appelée à témoigner, la petite sœur de Zohra a confirmé les propos de son demi-frère en déclarant que sa sœur avait fait exprès de l’incriminer pour pouvoir partir vivre sa vie. Interrogée par la présidente sur les habitudes de la famille et la disposition des pièces de la maison, l’adolescente a répondu que les filles dormaient dans la chambre de leur belle-mère tandis que Houari couchait dans la leur. «Il n’est jamais arrivé à Houari de venir chercher ta sœur Zohra de nuit ?» demande la présidente. «Non, jamais, la chambre était toujours fermée à clé», répond-elle.

Le crime impossible

Alors que le représentant du ministère public requiert dix ans de réclusion criminelle en se basant sur les conclusions du certificat médical confirmant des relations sexuelles violentes et en mettant en doute le témoignage à décharge de la sœur de Zohra, la défense plaidera l’acquittement pur et simple de son client. Dans leur argumentaire, les avocates déploreront «une enquête et une instruction qui n’ont pas été à la hauteur de la complexité du dossier», et affirmeront qu’il n’était pas possible que Houari eût commis le crime dont il est accusé par Zohra en raison de la présence de la belle-mère et des sœurs dans une chambre fermée à clef et du fait qu’il partageait une pièce avec son frère. Elles évoqueront également la situation actuelle de Zohra qui a profité de la détention de Houari pour quitter le domicile familial et tomber enceinte. «Quant à ses antécédents judiciaires (Houari a été impliqué dans des bagarres), ils sont imputables à l’environnement social et la nature de Haï Nedjma, un des quartiers les plus chauds de la wilaya», a expliqué l’une des avocates, en précisant qu’un antécédent ne peut constituer une preuve de culpabilité. «L’accusation n’a pas réussi à apporter des éléments de preuve matériels incriminant l’accusé. Notre client ne peut, donc, logiquement pas être déclaré coupable», terminera la défense en réclamant l’acquittement. Au terme des délibérations, le tribunal criminel de première instance déclarera S. Houari innocent des faits qui lui étaient reprochés.