Histoire/ Guerre de libération : Les «disparus», nouveau dossier de discorde entre Alger et Paris ?

Histoire/ Guerre de libération : Les «disparus», nouveau dossier de discorde entre Alger et Paris ?

Le ministre des Moudjahidine, en visite hier à Médéa, a affirmé que son département est détenteur d’une liste de 2 100 martyrs «portés disparus».

« Le recensement effectué par les service du ministère des Moudjahidine, avec le concours des structures spécialisées qui lui sont rattachées, nous a permis de dresser une liste de 2 100 martyrs dont on ne connaît aucun lieu d’enterrement et que nous considérons aujourd’hui comme des personnes portées disparues, faute de sépultures ou d’identification exactes de leur lieu d’enterrement », a-t-il expliqué en marge de la célébration du 58e anniversaire de la mort du chahid Ahmed Hadj Hamdi, fusillé le 29 septembre 1960 à Médéa. «Beaucoup de chefs militaires, djounoud et de fidaïs, arrêtés par les différentes forces de sécurité coloniales ou par l’armée, n’ont jamais plus donné de signe de vie une fois conduits dans les centres de détention ou de tortures sous l’autorité de ces dernières », a déclaré M. Zitouni, en citant parmi « les disparus », les martyrs Djilali Bounaâma, Si-M’hamed Bougara et Larbi Tébessi, dont les circonstances de la mort et leurs lieux de sépultures restent inconnus à ce jour, estimant que l’armée coloniale « porte la responsabilité » de ces disparitions, a-t-il ajouté.Le ministre a tenu à souligner que le « dossier » des disparus durant la guerre de libération « bénéficie du même intérêt accordé à celui relatif à la récupération des crânes des chouhada, détenus en France ». Il a affirmé, dans ce contexte, que l’équipe en charge de la récupération des « crânes des martyrs » a achevé la procédure « préliminaire » couronnée par une première visite en France au mois d’août dernier, et qu’une seconde visite est programmée pour les jours à venir afin de « faire avancer ce dossier », a-t-il poursuivi. Hasard ou pas, la déclaration de Tayeb Zitouni sur les « portés disparus » algériens intervient peu après l’annonce, par la Secrétaire d’Etat français aux Armées, d’envisager de se rendre début 2019 à Alger pour la question des disparus de la guerre d’Algérie et parvenir à « un acte de vérité » afin de « réconcilier les mémoires ». Mardi, 25 septembre dernier, Geneviève Darrieussecq a déclaré que « 1 500 civils et 500 militaires français n’ont jamais été retrouvés ». « Je voudrais que les choses avancent. Il faut qu’on se mette d’accord sur une méthode. J’aimerais pouvoir me rendre en Algérie début 2019 et aborder notamment cette question», a-t-elle indiqué dans un entretien avec «Le Figaro». «L’idée est de parvenir à un acte de vérité afin d’avancer vers une réconciliation des mémoires, qui resteront différentes, mais qui pourront se parler, se côtoyer». Les discussions qu’elle aura avec la partie algérienne seront intéressantes à suivre à plus d’un titre dès lors que la question de l’histoire et de la réconciliation des mémoires n’est toujours pas réglée et on se demande si la déclaration de M. Zitouni sur les «portés disparus» n’est pas un préambule à un nouvel affrontement mémoriel entre Alger et Paris sur le dossier de la guerre de libération.

Inauguration

du musée de la Wilaya IV historique

Le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, a inauguré hier le musée régional de la Wilaya IV historique au pôle urbain de Médéa. La cérémonie a eu lieu en présence du ministre chargé des relations avec le parlement, Mahdjoub Bedda. Elle marque «l’achèvement de l’opération d’un musée régional dédié aux six Wilayas historiques », réalisée en « hommage et en signe de fidélité » aux valeureux chouhada et combattants pour la liberté, a indiqué le ministre, en marge de cette cérémonie, qui coïncide avec le 58e anniversaire de la mort du chahid Ahmed hadj Hamdi, dit «Arslane», responsable du service d’information au sein du commandement de la Wilaya IV historique.

M. Zitouni a révélé que «les efforts consentis, dans ce sens, par l’Etat ont permis de doter 43 wilayas du pays d’un musée du moudjahid» et que son département «œuvre actuellement pour réunir les fonds nécessaires pour doter les wilayas restantes de structures similaires ». Le ministre a annoncé, à cette occasion, la réalisation de trois « galeries de la Mémoire », situées respectivement à Oran, Constantine et Ouargla, qui viendraient s’ajouter à celle réalisée dans la capitale, Alger. Ajoutant que ces espaces « interactifs » sont appelés à « mieux faire connaître notre histoire et, en particulier, l’épopée de la guerre de libération, auprès des jeunes ». Il a tenu à saluer, au cours d’une rencontre consacrée au parcours du chahid Ahmed Hadj Hamdi, le rôle des médias durant la guerre de libération, assurant que ces derniers, en dépit du peu de moyens dont ils disposaient, ont « largement réussi à contrecarrer la machine de propagande coloniale et à parvenir à mobiliser les citoyens et à galvaniser les troupes de l’Armée de libération nationale (ALN) qui combattaient dans les maquis ». Le martyr Ahmed Hadj Hamdi fut parmi ceux qui « ont fait honneur à ce métier et n’ont pas hésité, un seul instant, à sacrifier leur vie pour faire entendre la voix de la Révolution et celle des opprimés », a déclaré le ministre lors de cette rencontre.

Écrit par Selma Allane