À 71 ans, le plasticien Hocine Houara, un des pionniers du mouvement pictural à Batna et dans la région des Aurès, a toujours un pinceau généreux en couleurs inspirées de la splendeur de la nature d’une région à laquelle il s’identifie.
Avec un parcours artistique de plus de 44 ans, ce fils de la ville d’El-Kantara qui dépendait de Batna jusqu’au découpage de 1974, poursuit encore ses investigations dans l’univers des arts plastiques entamées en 1969, lorsqu’il a rejoint à l’âge 20 ans l’école des Beaux-Arts d’Alger Avec des œuvres touchant aux diverses tendances expressionniste, réaliste et abstraite, l’artiste expose de nouveaux à la maison de la Culture «Mohamed Laïd Al Khalifa» de Batna à l’occasion de la journée nationale de l’artiste, ses toiles «Instant d’évasion», «La mère auréssienne», «Le déluge», «Doukhan wa ramad», «Le sommeil du rêve» et «Composition». Bien que les thèmes divergent d’une toile à une autre, le bleu avec ses infinies nuances constituent le dénominateur commun de ces úuvres. «Cette couleur, a confié l’artiste à l’APS, me transpose dans des univers où les couleurs s’écoulent tel un rêve ou les fils de laine qui glissaient entre les doigts de ma mère lorsqu’elle tissait ses tapis aux couleurs aussi radieuses que la nature d’El-Kantara en printemps».
«Enfant, je m’installais souvent en face du métier à tisser de ma mère et contemplais, émerveillé, les motifs colorés qui prenaient forme progressivement», a ajouté Houara qui assure conserver le souvenir «singulier» d’une toile qu’il avait vue accrochée dans la maison d’un voisin et qu’il ne sut qu’elle était une des úuvres du peintre espagnol Francisco de Goya qu’après avoir fréquenté l’école des Beaux-Arts. Pour son ami Mohamed Berkane (68 ans), également artiste-peintre, Hocine Houara choisit avec minutie ses couleurs qui sont le fruit non pas du hasard mais de plusieurs années de recherche et d’investigation. Houara garde un sentiment tout spécial pour sa toile Naânaâ qui lui avait ouvert la voie de la notoriété avec l’obtention en 1981 du premier prix du Festival international des arts plastiques à Souk Ahras. Exposée pour la première en 1979 à Batna, cette úuvre, souligne l’artiste, est «le portrait d’une fillette de son village El Kantara dont les traits avaient réussi à concentrer ceux de tous les enfants de l’Algérie mélangés à l’innocence propre à toute enfance». «De toutes les œuvres, Naânaâ est ma préférée que j’ai toujours refusé de vendre», confie-il .
«En dépit du grand nombre de plasticiens dans la capitale des Aurès, cette ville ne possède encore pas une galerie d’exposition et les salons d’arts plastiques demeurent espacés dans le temps, regrette Houara qui a enseigné l’art plastique dans plusieurs lycées de Batna et à l’école régionale des Beaux-Arts de cette ville. Au terme du voyage d’investigation de recherche à l’origine de la composition d’une toile, le moment le plus fort en émotion pour l’artiste demeure celui de sa présentation au public, soutient Houara qui souligne que «l’exposition pour l’artiste est non pas un instant de détente mais une continuité qui prépare le lancement d’une nouvelle recherche». Les artistes ont besoin d’une structure permanente d’exposition qui sera pour eux un carrefour de rencontres et d’échanges et, pour la ville, «un lieu d’effervescence artistique», a encore soutenu Houara qui note que, faute d’une telle structure, sa plus récente participation à une exposition collective remonte à 2015 à Alger. «Une galerie d’art a toujours été un rêve pour les artistes de la région depuis le fondateur du mouvement pictural auréssien, le défunt Abderrahmane Tamine dit Abdou», a encore affirmé Hocine Houara qui est également sculpteur et céramiste.