S’il y a un sujet qui fait le plus polémique depuis 2013 en Algérie, c’est bien l’état de santé du président Bouteflika. Est-il oui ou non en état de présider encore aux destinées du pays dans un contexte économique en déprime et politique délétère ?
Question lancinante que n’ont pas réussi à faire taire les nombreuses apparitions du président à la télévision, certes sur son fauteuil roulant, mais néanmoins plutôt en possession de ses facultés intellectuelles.
Et voilà que le président François Hollande vient de dresser le diagnostic bien qu’il ait précisé qu’il n’était pas médecin.
«Le président Bouteflika m’a donné une impression de grande maîtrise intellectuelle (…) ». a témoigné le locataire de l’Elysée.
Connaissant le tropisme français du landernau algérois, il est certain que le réveil a été très dur aujourd’hui. Exit en effet les rumeurs folles sur la santé soit disant dégradée de Bouteflika et les mises en scène du Petit Journal.
Et Hollande ne s’est pas contenté de constater que Bouteflika garde une «grande maîtrise intellectuelle». «Il est rare de rencontrer un chef d’État qui a cette capacité de jugement», a-t-il ajouté, précisant «Le président Bouteflika a toutes ses capacités pour apporter sa sagesse et son jugement pour régler les crises».
Le diagnostic déroutant…
Sans doute que le président français a déçu beaucoup de monde parmi ceux qui attendaient un diagnostic nettement moins optimiste. Ceux là se recrutent parmi les hommes politiques qui fondent leurs stratégies sur l’incapacité supposée du chef de l’Etat à gouverner.
Il y en aurait sûrement qui vont crier au «deal» entre Bouteflika et Hollande. C’est-à-dire que ce dernier va facturer son témoignage extrêmement important dans le contexte interne à l’Algérie, sous forme de contrats pour les entreprises françaises.
Mais cela ne résiste pas vraiment à l’analyse. L’opposition devra redoubler d’ingéniosité pour se poser en alternative au régime et non pas en zoomant sur la santé du président.
L’opposition groggy
Parce que la morale politique et le fonctionnement normal des institutions commandent de laisser le président élu terminer son mandat aussi longtemps que sa maladie ne soit pas invalidante. Il est vrai que Bouteflika n’est plus le grand amateur des voyages à l’étranger ni le volubile tribun qui haranguait les foules.
Cela les algériens le savent depuis plus de cinq ans.
Mais soutenir que ce n’est pas lui qui gouverne, par le simple fait qu’il ne crève pas l’écran, est un peu court…
De ce point de vue, français Hollande a fermé le débat par son précieux témoignage. Pour cause, les «unes» des journaux algériens fleurissent d’articles et d’analyses sur le successeur potentiel de Abdelaziz Bouteflika.
Au-delà de son impact au niveau interne, le constat de Hollande est de nature à rassurer les partenaires de l’Algérie qu’il n’ y a pas vraiment une crise de succession au pouvoir du moins pas dans l’immédiat.
Le propos de Hollande semble d’autant plus honnête qu’il a attesté que Bouteflika «ne peut pas se déplacer facilement», avec cette réalité «je le sais depuis longtemps », a-t-il ajouté.
En clair comme en décodé, François Hollande vient de rendre un grand service à son ami Bouteflika que ses partisans n’ont pas su et pu faire.