Il était une fois lPosta Lekbira, Alger

Il était une fois lPosta Lekbira, Alger

La Grande-poste d’Alger, cet édifice centenaire, sera bientôt transformé en musée qui racontera l’histoire de la poste et des télécommunications en Algérie. Retour sur l’histoire de la Grande Poste, l’Posta pour les Algérois, devenue le cœur de la capitale et un de ses symboles.

Architecture néo-mauresque

Tout a débuté en 1903. Charles Célestin Jonnart, est nommé gouverneur général et se pique de célébrer le centenaire de la colonisation, en 1930, dans le « rapprochement » avec les autochtones. Dans cette optique, il signe une série de circulaires pour imposer un certain cachet architectural aux constructions publiques. C’est l’arrière-fond politique de l’architecture néo-mauresque d’Alger.

Cela commence par les constructions scolaires que l’on veut d’autant plus « républicaines » que la communauté musulmane s’est montrée réticente à l’égard de l’école et tend à préserver ce qui reste de l’enseignement religieux. L’école coranique située à proximité du mausolée de Sidi-Abderrahmane, dans la Basse-Casbah, est le premier édifice construit dans le style néo-mauresque en 1904.

Charles Célestin Jonnart est tellement satisfait de sa « réussite » qu’il décide, par voie de circulaires, de généraliser le style aux constructions administratives et publiques et aux édifices communaux.

En 1906, l’architecte Henry Petit, qui s’est chargé de la construction de la Medersa de la rue Marengo, va réaliser le siège du journal La Dépêche Algérienne ainsi que celui de la a Préfecture. Le premier abrite aujourd’hui, le siège du RND au centre ville et le second abrite les services de la Wilaya d’Alger.

En 1909, Petit achève la construction du magasin des Nouvelles Galeries, situé actuellement à la rue Larbi-Ben-M’hidi, devenues le musée d’art moderne et contemporain, MAMA.

Symbole colonial

La construction de la Grande Poste qui devait symboliser aussi bien la « réussite » de la colonisation que la « communion » des communautés sera confiée aux architectes Voinot et Tondoire.

La Grande- Poste a été édifiée sur les restes de l’ancien fort turc situé sur le bras de mer de Ras Taffoura.

De part sa situation, la Grande- Poste est devenue le cœur de la ville européenne. A proximité de ce monument, il y avait une statue de Jeanne d’Arc ainsi qu’un buste du duc d’Isly. Sur le plateau des Glières, situé en contrefort, on pouvait voir le monument aux Morts ainsi qu’une grande horloge florale.

Voinot et Tondoire vont réaliser une œuvre d’art qui se veut une synthèse. Avec sa grande coupole et ses deux faux minarets, la Grande-Poste en impose.

La façade principale est ornée de trois arceaux et d’une galerie supérieure à colonnes jumelées. Le large escalier en marbre couleur ambre permet d’accéder sur le parvis qui donne sur trois portes monumentales taillées dans du bois précieux.

A l’intérieur, le précieux est conjugué à toutes les formes. Avec ses faïences, arcs, coupoles, stalactites et stuc ciselé, le plafond de la salle principale est un joyau architectural.

plafon de la grande salle de la grandeposte

Si les plans ont été tracés par les Européens, l’essentiel de la main-d’œuvre était, toutefois, algérienne et marocaine. De nombreux ouvriers y laisseront la vie.

Le gouverneur Jonnart a tenu à « marquer » l’édifice dont il a choisi la hauteur et les inscriptions religieuses. Dans ce décor oriental, on pouvait lire, “Dieu est vainqueur”, “Le pouvoir éternel Lui appartient” ou encore “Il n’y a de puissant que Dieu”.

Chez la population autochtone ni la Grande Poste, ni le néo mauresque, n’auront d’incidence sur la vie des gens. Elle deviendra, jusqu’en 1962, un « centre » pour les Européens.

Durant la guerre de Libération, les postiers algériens qui y travaillaient ont payé un lourd tribut. Trente-six d’entre eux ont perdu la vie, presque tous assassinés par l’OAS.

Dégradation et laisser-aller

Le monument, qui abrite toujours les services de la poste algérienne et ceux d’Algérie télécom, n’accueille pas moins de 10 000 visiteurs par jour.

En plus des aléas du temps, La Grande- Poste, a souffert des derniers séismes qui ont frappé la capitale. L’incendie qui a ravagé en décembre 2012 une partie du bâtiment a accentué la dégradation des lieux.

La Grande- Poste, qui n’est pas classé monument national, va ainsi être transformée en musé de la poste. Le sauvetage de ce vestige témoin d’une partie de l’histoire de la ville d’Alger a-t-il commencé ?

intérieur de la grandeposte

Le projet de transformation sera financé par l’Etat algérien, Algérie Poste et Algérie Télécom. Un appel d’offres est lancé pour la réalisation de ce projet, dont la première phase requiert un investissement de 80 millions de dinars, a-t-on encore précisé.