L’attaque du Nord-Constantinois a su réinsérer la dynamique révolutionnaire dans son processus initial.
La libération du pays à l’heure de la démarcation armée contre le colonialisme français a fait que cette date a signé la rupture de façon définitive avec l’ordre colonial et ses succédanés. C’était en effet une véritable insurrection armée qui a su redonner au mouvement de libération armé sa sève nourricière pour qu’il puisse se redéployer en force et faire sortir le tandem FLN/ALN de son immobilisme. Cela après avoir subi de sérieux revers avec la disparition de beaucoup de ses cadres pendant la première insurrection, à savoir le mouvement déclencheur de la révolution du 1er novembre 1954.
Cette attaque qui a été bien organisée sur le plan stratégique et militaire par l’inénarrable Zighoud Youcef, se voulait comme une réponse à l’armée coloniale française qui se targuait de dire que «les fellaga» ne sont plus de retour, c’était juste des escarmouches émanant de quelques «hors-la-loi». L’armée coloniale française avait mobilisé 50.000 soldats durant la première insurrection du 1er novembre 1954, et celle du Nord-Constantinois a vu ce chiffre presque doubler, ce qui montre que l’armée coloniale avait affaire réellement à une structure armée organisée et non pas à un groupuscule ou des bandits qui troublaient l’ordre comme aimait-il à le répéter à qui voulait l’entendre.
La dimension éminemment politique de l’insurrection du Nord-Constantinois s’inscrivait dans le sillage du 1er novembre, elle est le prolongement direct de l’Appel à l’insurrection armée qui s’est vue contrainte de prendre en main la destinée du peuple algérien livré à toute sorte d’assujettissement et d’exploitation coloniale. La révolution était telle qu’elle avait été tracée par ses idéologues à l’image de Abane Ramdane et autres Larbi Ben M’Hidi et Didouche Mourad.
La crise se faisait sentir après le sérieux coup qu’avait subi la structure qui était derrière le déclenchement de la première insurrection annonciatrice de l’élan révolutionnaire, avec beaucoup de cadres de ce mouvement insurrectionnel surtout au niveau de l’Aurès et la Kabylie, c’était la période de la répression des plus sévères qui s’est abattue sur les responsables et les fondateurs du FLN/ALN, comme il y avait beaucoup de pertes dans les rangs de l’armée de Libération nationale.
Il fallait redonner de l’élan et de l’étincelle à un mouvement qui allait être complètement essoufflé, n’était-ce l’attaque du Nord-Constantinois qui a su renverser la donne en réinsérant la dynamique révolutionnaire dans son processus initial.
Le choix armé était imposé par les circonstances qui ont présidé à la création du FLN dans une situation caractérisée par la dislocation du Mouvement national en général et du PPA-MTLD en particulier qui était en proie à une véritable crise avec l’approche hégémonique qui était la règle de la part de Messali et ses disciples jusqu’à plonger tout le Mouvement national dans l’impasse politique.
L’attaque du Nord-Constantinois a mis un terme une fois pour toutes à cette situation de non-guerre et de non-paix avec le colonialisme français, pour ainsi consacrer la conception armée telle qu elle a été initiée durant la première insurrection, à savoir du novembre 1954.
Beaucoup d’historiens considèrent que l’attaque de Nord-Constantinois comme un élément déclencheur d’un processus interminable du combat libérateur qui a permis à la révolution de se doter de structures organisationnelles et un programme politique et armé pour mener à terme le combat libérateur.
C’était l’étape décisive qui a remis sur les rails l’objectif de l’indépendance par tous les moyens possibles y compris armés.
La bataille de Sidi Mezghiche dans laquelle Zighoud Youcef est tombé au champ d’honneur, était le point de non-retour pour la Révolution algérienne.
La France coloniale a réagi de la manière la plus féroce après cette attaque dans le Nord-Constantinois, puisque sa force de frappe était ciblée de façon orchestrée par les soldats de l’ALN. Mais la riposte était tellement lâche que les populations du Nord-Constantinois se rappellent des massacres commis par les milices qui ont bénéficié de la complicité directe de l’armée coloniale pour commettre des massacres qui restent indélébiles dans leurs mémoires.
La répression a touché l’ensemble des régions du Nord-Constantinois, surtout la région d’El Harrouch et la ville de Skikda, ex-Philippeville. La terreur battait son plein durant cette date.
Mais celle-ci a enclenché l’amorce d’un véritable départ du mouvement de libération qui a permis l’internationalisation de la cause algérienne et son combat pour son indépendance nationale.
L’attaque du Nord-Constantinois a précipité les populations de prendre une fois pour toutes une décision quant à leur implication mordicus dans le combat pour la libération du pays. Parce que avant cette date fondatrice de l’élan révolutionnaire, les populations n’avaient pas encore cette ardeur et conscience pour s’impliquer dans la lutte de Libération nationale. L’événement du 20 août 1955 a enterré définitivement les approches qui oscillaient entre l’attachement à «la mère patrie» et celle qui visait à avoir un semblant d’indépendance sans que cela soit réellement réalisé sur la base du recouvrement de la souveraineté nationale et la restitution de notre identité en tant que Etat-nation.