« La révolution agraire doit être une œuvre de solidarité nationale et non une lutte de classe« , Boumediene, discours du 24 septembre 1972.
Il y a de cela 37 ans disparaissait le président algérien Houari Boumediene, frappé subitement au cours de cet été de 1978 par une mystérieuse maladie galopante, diagnostiquée comme étant la maladie de Waldenström.
Boumediene a gouverné par voie d’ordonnance, laissant l’Algérie plus de onze ans sans constitution.
Homme fort du clan d’Oujda, le chef d’état-major Boumediene avait entrepris lucidement et habilement sa prise de pouvoir en soutenant d’abord dés 1962, le feu président Ahmed Ben Bella, en l’aidant à accéder à la présidence de la République Algérienne avant de le renverser le 19 juin 1965, l’accusant d’en faire qu’à sa tête et cultivant le culte de la personnalité.
En réalité Ben Bella avait cette « légitimité historique » qui faisait défaut au froid militaire ambitieux Houari Boumediene.
Ceux de ma génération, nés aux débuts de la guerre d’Algérie 1954-1962, avions été si marqués par cet homme austère qui longtemps nous haranguait, pointant du doigt l’impérialisme occidental accusé de tous les maux dont souffrent encore les pays du tiers-monde.
Boumediene avait beaucoup d’ambition pour l’Algérie, il voulait édifier un état fort. Lui qui avait nationalisé les hydrocarbures pour libérer l’économie nationale de toute ingérence étrangère, a tout de même sacrifié l’agriculture, mettant sans le vouloir le pays dans une situation de dépendance alimentaire alarmante qui n’a fait que s’accentuer. Pensait- il tout résoudre en industrialisant avec le pétrole qui commençait à couler à flots ?
In sa remarquable thèse intitulée Algérie, les racines de l’intégrisme, Saïd Bouamama, algérien résidant en France, docteur en sociologie et chercheur à l’L’IFAR (institut de formation des travailleurs sociaux) avait écrit dans son introduction à l’analyse de la période où avait régné le président Boumediene :
« La période de Boumediene est celle d’une des tentatives les plus radicales de rompre avec la dépendance et avec les règles d’exploitation qui régissent le système capitaliste mondial.
Nationalisations, développement du secteur industriel public, réforme agraire, scolarisation, santé gratuite… Ces faits sont indéniables et incontestables. Ils indiquent que l’Algérie pendant cette période a accompli des progrès considérables dans la prise en charge des tâches nationales démocratiques.
Mais la période est également celle d’autres réalités d’une toute autre nature. Entraves aux droits démocratiques, développement du capital privé et du capital spéculatif, utilisation du secteur public à des fins d’enrichissement personnel, réforme ne touchant pas aux intérêts des possédants, enracinement de l’idéologie intégriste…Ces aspects sont tout autant incontestables que les précédents. Ils mettent en évidence les limites de l’expérience de libération économique qu’a connue l’Algérie. Ils soulignent les limites de la petite bourgeoisie radicale dans la conduite d’une révolution nationale et démocratique ».
Les tentatives de « socialisation » durant la période Boumediene étaient louables en sortant d’un siècle et de demi d’exploitation capitaliste coloniale. Mais c’était -il possible dans un environnement capitaliste mondial hostile ?
Nous savons aujourd’hui que le Chine, l’Inde et le Brésil se sont convertis au capitalisme pour émerger quelque peu sur la scène mondiale …
Merci à Boumediene de nous avoir fait rêver et d’avoir tenté de tourner le dos à ce capitalisme qui mènera tôt ou tard le monde à la faillite.