Demain, vint-huit ans seront passés sur la révolte du 5 octobre 1988. Ces événements qui permettront à l’Algérie de sortir de l’ère du parti unique à l’ouverture, restent de toutes les étapes de l’histoire contemporaine du pays, un repère à même d’éclairer le chemin à venir.
Aujourd’hui, peu de gens s’en souviennent, malheureusement. Quand au sein de la société, les partis et associations qui, en réalité, sont le fruit de l’ouverture démocratique qui s’en est suivie, travaillent à peine pour perpétuer l’esprit d’octobre 1988, on trouve chez les officiels une sorte de «malaise» à évoquer cette date. Cette dernière est, en effet, liée à la violence et la répression qui ont suivi les manifestations, ainsi qu’au nombre de morts et de personnes arrêtées et/ou torturées. Une mémoire difficile à admettre, sauf lorsqu’il y a matière à tirer profit, comme lors des récents événements du «printemps arabe», quand le pouvoir est sorti pour dire que «l’Algérie a déjà connu son printemps en 1988». Presque la seule et unique organisation de la société civile à faire du 5 octobre une date référence, l’association nationale de jeunes du Rassemblement actions jeunesse (RAJ). Une série de rencontres débats, animées par des acteurs politiques, activistes, syndicalistes, sociologues et politologues, se poursuit jusqu’au 8 du mois en cours, outre un rassemblement pacifique en hommage aux victimes des événements, prévu demain à la place Port-Saïd, en face du TNA d’Alger. Une tradition «contre l’oubli et pour la mémoire et combat pacifique continu». Trois mots qui résument de près, ce qu’est l’esprit d’octobre 1988, quant les Algériens avaient envahi la place publique, pour exprimer leur ras-le-bol des entraves aux droits et aux libertés, et demander la démocratie et l’ouverture en place de la pensée et du parti unique. «Octobre 1988 n’était pas un accident de parcours, mais le résultat d’une gestion, la conséquence d’une politique, dont les signes avant coureurs se sont multipliés, dés le début de la décennie 1980», dit maitre Ali Yahia Abdennour, dans l’une de ses contributions.
Entre acquis et rêve inachevé
Durant l’été 1988, l’Algérie présidée par Chadli Bendjedid, vivait sous le règne du parti unique, le FLN. La presse était muselée, les partis interdits et les militants de gauche, même les berbéristes, étaient surveillés, y compris à l’étranger. Frappée de plein fouet par le choc pétrolier, l’Algérie était assise sur un volcan. Les luttes au sein du pouvoir ont amené le chef de l’Etat à prononcer un discours d’une rare virulence, vers la fin du mois de septembre où il dénoncera «les blocages». Très vite, les rumeurs circulent sur une grève générale le 5 octobre. Mais, la veille à Alger, des émeutes de jeunes embrasent les quartiers populaires d’El-Harrach et de Bab-el-Oued, avant que l’agitation gagne tout le pays. Le jour «J’», c’est le chaos : institutions, magasins, symboles du FLN et même ministères, sont saccagés et incendiés. Puis c’est le drame et l’horreur, avec l’armée qui intervient dans la répression. Bilan officiel :500 morts. Mais, la grande victoire fut la nouvelle Constitution votée le 23 février 1989, à 73% des suffrages des électeurs. Un texte qui autorise le multipartisme et met fin à le pensée unique. 28 ans après, le bilan semble loin des espoirs, bien qu’il y ait en la matière, quelques avancées. Les Algériens s’expriment à travers une multitude de journaux et de médias audiovisuels, et militent dans une soixantaine,-même si certains ne servent que de décor-, de partis politiques. Malgré plus de réformes au lendemain de ce qui est communément appelé «printemps arabe», le pouvoir ne cède pas tellement sur les libertés. Les militants et activistes sont poursuivis, pour tout et rien. Les emprisonnements pour délit d’opinion sont légion. Il est vrai que les droits de l’homme, la démocratie et les libertés reviennent de loin en Algérie. Mais, le chemin reste encore long.