Da Hocine Adjkoum, responsable de l’ONM
«Zirout Youcef et Ben M’hidi priaient à la mosquée du village»
En tant que moussebel, Hocine Adjkoum avait 18 ans lors de la tenue du congrès.
«Tout le monde savait que les responsables de la guerre d’Algérie étaient là, mais personne ne savait pourquoi et que ce qu’ils faisaient. A l’heure de la prière, ils descendaient dans la mosquée et priaient avec tous les villageois. Zirout Youcef, Bentobal, Larbi Ben M’hidi discutaient normalement avec les villageois, surtout le colonel Ouamrane qui se vantait beaucoup, car il était fort et en venant à Ifri Ouzellaguen, il était arrivé avec deux soldats français qu’il avait capturés lors de son déplacement. Le congrès a duré dix jours et pendant ces dix jours, nous, les habitants de la région, nous n’avons fait que soutenir cette réunion. Déjà avant le début du congrès, une nouvelle loi avait été décrétée interdisant tout déplacement entre les villages, sauf pour les responsables. En ce qui me concernait, j’étais dans la sécurité. Entre la sécurité, les moudjahidine et les chargés de la sécurité on était au total près de 900 personnes. Les gens de la région étaient en première ligne car connaissant parfaitement le terrain et le mouvement des casernes françaises. A la fin du congrès, Mohamedi Saïd a réuni les populations des villages et nous a expliqué ce qu’était un congrès. Près de six mois après, les Français ont découvert le congrès et ratissèrent toute la région régulièrement.»
Makhous Baya, épouse de Idri Lounis, adjudant
«Tout s’est passé dans le secret le plus total»
«Je me rappelle qu’une parente à moi allait se rendre dans un village voisin avant d’être refoulée à Thalla Ifri, car durant cette période tous les déplacement étaient interdits dans la région, notamment entre les villages.
Celui qui se disait être au courant des circonstances de la tenue du congrès et des différents lieux était un menteur, tout était tenu en secret, poursuivit-elle. Six villages ont été concernés. Les femmes n’étaient pas concernées et n’étaient pas au courant. Deux femmes, dont celle de la maisonnette et une autre qui travaillait avec le chef de l’organisation, étaient au courant et s’occupaient des besoins des congressistes. Seul le propriétaire de la maison était au courant. Ils ne sont plus de ce monde. Il a fallu neuf mois après pour que les gens d’ici apprennent la tenue du congrès à la suite du bombardement des villages par l’armée française. Nous avions souffert terriblement.» Aujourd’hui, elle vit toujours avec la pension de son défunt mari. Ce n’est que récemment qu’elle a bénéficié d’une «petite» pension de moudjahida. Mais elle est là comme toute femme qui se respecte et avec son petit-fils pour célébrer cette date symbole de l’histoire récente de l’Algérie.
Kadri Zahra, veuve de chahid
«14 villages étaient mobilisés»
«Mon époux me disait à l’époque que cela faisait plusieurs semaines que ces gens se réunissaient et écrivaient dans cette maison sans savoir exactement pour quelle raison, mais ils avaient réussi: 14 villages étaient mobilisés et les congressistes se sont retrouvés là où il y a une sécurité et où il n’y a pas d’indicateurs ou de traîtres. J’ai passé deux ans à Ifri Ouzellaguen. La maisonnette a été choisie parce qu’elle était située dans la forêt entre le quartier d’Ath Saâda et Oumoudjan. Nous, les femmes, avions fait tout ce qui était dans nos possibilités. Notre maison était située sur un passage des moudjahidine. Nous faisions de la couture, lavions les habits, préparions la nourriture et la transportions quand c’était nécessaire. Les moudjahidine nous transmettaient de l’argent, des papiers, bref nous étions assez utiles dans la coordination des affaires de la guerre. Tout le monde avait donné ce qu’il pouvait dans une confiance totale. Aujourd’hui je ne regrette rien. Tout ce que nous avions fait était juste. Ma famille compte des martyrs, des moudjahidine et des moudjahidate et c’est notre fierté. Kadri Hocine, Salah, tous étaient des responsables, tout comme le reste de la famille, ils sont morts pour cette patrie.»
Fatma Iznaguen, sa maison transformée en infirmerie
«Je préparais à manger et je lavais les tenues des moudjahidine»
Elle habitait avec son mari au milieu de la forêt. Avec une infirmière de l’ALN il avait fait de sa maison une infirmerie où étaient soignés les moudjahidine pendant des années. Elle et son mari cuisinaient tandis que l’infirmière de l’ALN s’occupait des soins. «Je faisais mon devoir avec coeur. Mon mari et moi n’avions comme souci que de nous occuper des moudjahidine. J’ai été arrêtée, mais j’ai repris mon travail dès ma libération. Pendant le congrès, je préparais à manger, je lavais les vêtements et les tenues des moudjahidine, mon beau-père se chargeait de leur acheminement vers le lieu du congrès. Notre maison a été brûlée par l’armée française à la suite de la découverte des médicaments et autres objets de moudjahidine, cachés sous le perron. Na Fatma n’a pas bénéficié des années passées en prison faute de témoins.