Incertitudes sur le marché pétrolier M. Attar : «les prix seront déterminés à l’avenir par l’évolution de l’économie mondiale»

Incertitudes sur le marché pétrolier M. Attar : «les prix seront déterminés à l’avenir par l’évolution de l’économie mondiale»

Les cours pétroliers ont amorcé une descente qui inquiète les pays producteurs dépendants de cette rente. Les prix ont en effet chuté lundi à New York, dans un marché à la recherche d’un nouveau plancher devant l’absence de perspectives d’un prochain rééquilibrage entre l’offre et la demande.

Younès Djama – Alger (Le Soir) – Le cours du baril de référence (WTI) a lâché 1,54 dollar à 40,06 dollars sur le contrat pour livraison en septembre, après avoir oscillé autour du seuil des 40 dollars, sous lequel il n’a plus fini depuis quinze semaines au New York Mercantile Exchange (Nymex). Les analyses vont bon train. Et les incertitudes aussi.

Interrogé hier à ce sujet, l’ancien P-dg de Sonatrach et aujourd’hui expert international dans le domaine du pétrole, Abdelmadjid Attar, insiste sur le fait que ce qui va déterminer les prix à l’avenir, c’est l’évolution de l’économie mondiale, laquelle a priori, surtout après le Brexit (référendum de sortie de la Grande Bretagne de l’Union européenne, ndlr), n’a pas l’air de reprendre. Mais ce sont surtout toutes les prévisions de croissance qui sont en alerte.

Le second facteur est lié à la situation géopolitique à l’intérieur et autour des pays producteurs, notamment Libye, Irak, soutient notre interlocuteur. «Si la situation demeure la même d’ici la fin de l’année, surtout s’il n’y a pas de changement, les prix vont rester autour des 50 dollars le baril. En revanche, si la situation se détériore, ce sera beaucoup plus proche des 40 dollars que 50», prédit-il tout en maintenant que les prix vont rester entre 40 et 50 dollars jusqu’à la fin de l’année.

Pour rappel, le baril a dépassé 50 dollars suite à une conjoncture particulière liée notamment aux incendies qui ont ravagé le Canada en mai dernier. A cela il fallait ajouter la situation en Turquie, mais aussi les interruptions de la production en Libye, au Nigeria et au Venezuela. «Ce sont des facteurs qui peuvent sévir de nouveau», prévient

M. Attar qui ajoute que le marché pétrolier n’est plus aujourd’hui une question de niveau de production qui a baissé».

De plus, l’expert fait aussi remarquer qu’à chaque fois que le prix atteint 50 dollars ou les dépasse même d’un dollar ou deux, on assiste à plus de pétrole de schiste aux Etats-Unis, car la fourchette comprise entre 45 et 50 dollars représente le seuil de rentabilité d’une bonne partie du pétrole de schiste aux États-Unis. Ce qui fait dire à M. Attar qu’il est peu probable que les prix du pétrole dépassent les 50 dollars.

«Actuellement, il est vraiment difficile de faire des prévisions de prix pour le semestre qui reste de cette année, ce qu’on peut dire de façon sûre, globalement, c’est que le prix restera bas», note-t-il.

Inquiétude sur la situation de l’amont pétro-gazier algérien

En juillet dernier, Abdelmadjid Attar soutenait sur les ondes de la radio M que l’évolution du prix du pétrole est à présent indépendante de tout acteur ou accord entre Etats, à l’instar de celui signé entre la Russie et l’Arabie Saoudite sur le gel de leur production. Il a aussi estimé qu’à court terme, la tendance baissière des cours du pétrole pourrait être entraînée par l’éventuelle augmentation de la production libyenne, mais surtout de celle de l’Irak. «Pour les six prochains mois et pour 2017, le risque ne vient pas de l’Arabie Saoudite. Le risque vient d’une éventuelle augmentation de production de la Libye, le retour de l’Iran déjà présent sur le marché et surtout de l’Irak.

Ce pays qui produit plus de 4 millions de barils de pétrole/jour, est encore loin de son quota d’avant. Plus que cela, l’Irak dispose de gisements qui sont beaucoup plus faciles à exploiter et qui ont une inestimable capacité de production.

Sur le front interne, l’expert énergétique Mourad Preure, hôte en mai dernier de la même webradio, s’inquiète sérieusement de la situation de l’amont pétro-gazier algérien et qui n’est pas «au niveau de ces dix dernières années», avait-il dit. Son inquiétude est d’autant importante que, d’après lui, cet amont gazier n’arrive pas à suivre le rythme de la consommation domestique au point que le pays ne dispose plus de volumes pour défendre ses parts de marché sur le plan international.

«Nous sommes dans une industrie de long terme. Si vous avez un trou d’air aujourd’hui, c’est que vous n’avez pas pris les bonnes décisions il y a dix années», avait-il illustré en rappelant que l’Algérie était connue pour la stabilité de sa législation dans le secteur énergétique.

«Le pétrole est un domaine d’incertitudes géopolitique, géologique, commerciale etc. Si, en plus, on ajoute l’incertitude sur le plan réglementaire, on ne s’en sort plus», soulignait cet expert qui rappelle que, pourtant, pendant 20 ans, la législation algérienne était restée «stable et fonctionnait bien». «Et en une année, elle a changé deux fois de suite. Du coup, l’image de l’Algérie a été brouillée», a-t-il regretté.

Face à la baisse des investissements dans le secteur pétrolier, du fait de la chute des prix depuis juin de l’année 2014, Mourad Preure a suggéré le retour à la substance de la loi 86-14 qui a permis la relance de la production pétrolière et gazière algérienne.