Ancien ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou a brossé, hier, la situation actuelle de l’économie algérienne lors de la conférence organisée par le Cercle du commerce et de l’industrie algéro-espagnol (CCIAE) au Centre culturel espagnol Cervantès.
Pour l’ancien ministre, les Investissements directs à l’étranger (IDE) doivent contribuer aux ajustements économiques du pays tout en ayant recours le moins possible aux emprunts étrangers. « Moi, je ne veux pas qu’on aille à l’endettement, car le secteur exportateur, source de devises, est fragile.
Il nous faut les IDE en force. Quand on prête à un Etat, on ne lui prête pas pour ses beaux yeux », entame Abdelatif Benachenhou avec franc-parler à travers lequel il a énuméré les différents ajustements budgétaires pour l’économie algérienne. Pour connaître la solvabilité de l’Algérie, l’ancien ministre a rappelé sa volonté pour que l’Algérie soit, comme d’autres pays, notée par les organismes de notation, car « la notation suggère la sagesse», affirme-t-il. Pour rappel, l’Algérie a contracté fin 2016 un emprunt de 900 millions d’euros auprès de la Banque africaine de développement (BAD) afin de financer les réformes visant notamment l’amélioration du climat de l’investissement, l’amélioration de l’efficacité du secteur énergétique et la promotion des énergies renouvelables. Mais Abdelatif Benachenhou juge que comme « l’Algérie est actionnaire de la BAD, ce n’est donc pas très grave ». Concernant les emprunts des entreprises, la problématique reste la même, selon l’intervenant, à cause de l’opacité autour de la santé financière de celles-ci. Les entreprises en Algérie n’étant pas notées, les organismes de prêt demandent une garantie de l’Etat. «Alors que le dinar se dévalue et qu’on ne sait pas jusqu’à quelle valeur il ira, ça engendre des craintes. Celui qui prête en euros, par exemple, exige des garantie de remboursement en euros », rappelle l’ancien ministre des Finances pour expliquer la difficulté des entreprises au recours à l’emprunt.
C’est ainsi que le recours aux IDE paraît, selon l’orateur, une meilleure alternative à l’endettement extérieur pour permettre de mener à bien les ajustements majeurs à entreprendre par les autorités. « Le plus urgent étant l’ajustement budgétaire » à travers la restriction des dépenses et la création de nouvelles sources de recettes. Aussi, l’ajustement au niveau de l’attribution de logements, à l’heure où plusieurs programmes étatiques sont en cours de réception, « l’Algérien a été habitué à être logé par l’Etat », assène Abdelatif Benachenhou, qui appelle également à des ajustements de l’enseignement supérieur. « On a une armée mexicaine, beaucoup de généraux et peu de soldats. L’université forme une flopée d’ingénieurs et de docteurs qui se retrouvent au chômage, il faut changer le système éducatif pour former des plombiers, des électriciens, des informaticiens de base et des peintres entre autres », lance-t-il. Autre ajustement prôné par l’intervenant, celui économique, «le secteur privé a un business-model faux, puisque les prix relatifs ne sont pas les bons, car imbibés de subventions. Or, il faut sortir des subventions », indique-t-il.
Pour permettre aux investissements directs étrangers de contribuer à ces nombreux ajustements, « il faudrait ôter les barrières à l’entrée et non pas que les investisseurs soient freinés, car on en a besoin pour faire entrer du capital et faire jouer la concurrence ». Et si l’Algérie intègre l’OMC, « il faudrait que l’organisation ait un rôle d’instrument d’ajustement et d’accompagnement pour améliorer le climat des affaires en Algérie », estime l’ancien ministre.
A propos de la dernière visite à Alger du candidat à l’élection présidentielle française, Emmanuel Macron, l’ancien ministre des Finances dira que « les responsables étrangers doivent tenir un discours responsable et non pas nier la vérité au motif de gagner quelques voix.
On n’a pas le droit de jouer avec l’espoir d’un peuple pour glaner quelques voix des Algériens de France. Il se trompe car la communauté franco-algérienne en France vote comme tout le monde.
Elle vote comme ses autres concitoyens, de l’extrême gauche à l’extrême droite ». A noter que le nombre d’entreprises espagnoles opérant en Algérie était de 455 en 2014, soit 5% du total des entreprises étrangères inscrites au registre algérien de commerce. Parmi les entreprises espagnoles présentes en Algérie, celles du secteur de la construction. Celles-ci ont réalisé le port de Annaba et la pénétrante de Mascara notamment.