Le bilan du passage de l’ouragan Irma a encore enflé jeudi soir avec deux morts à Porto Rico, soit douze décès confirmés au total à travers les Caraïbes, alors que ce cyclone de catégorie 5 s’approche de Cuba et fait trembler la Floride.
A Cuba, où l’ouragan est attendu vendredi soir, 10.000 touristes ont reçu l’ordre de quitter leurs hôtels ou résidences sur les côtes les plus exposées, et le pays est passé en alerte maximale.
Irma devrait ensuite remonter vers la côte sud-est des Etats-Unis, frappant d’abord la Floride puis la Géorgie et la Caroline du Sud, selon les prévisions du centre américain des ouragans, qui prévoit des marées supérieures de 8 mètres à la normale et « un danger d’inondations mortelles » durant les 36 prochaines heures.
Le président américain Donald Trump a exprimé depuis Washington jeudi sa « vive inquiétude » quant aux dégâts qu’il pourrait provoquer.
L’ouragan Irma va « être réellement destructeur » quand il arrivera sur les côtes de Floride, a également prévenu jeudi Brock Long, le chef de l’agence américaine des situations d’urgence (Fema) sur CNN.
Des ordres d’évacuations obligatoires ont d’ailleurs déjà été émis pour les zones côtières de Floride et dans l’Etat de Géorgie, concernant près d’un million de personnes.
« Nous disons à tout le monde: quittez Miami Beach. Je n’aurais jamais pensé devoir dire ça, mais je le dis aujourd’hui », a renchéri le maire de Miami Beach, Philip Levine sur la chaîne Fox News.
« Comme une bombe atomique »
Avant l’annonce de ces deux morts à Porto Rico, ce sont quatre morts qui avaient d’abord été comptabilisés dans les îles Vierges américaines, par le bureau du gouverneur Kenneth Mapp, venant s’ajouter aux six décès déjà recensés sur l’île franco-néerlandaise de Saint-Martin et à Barbuda.
A Porto Rico, plus de la moitié des 3 millions d’habitants sont désormais sans électricité, et des refuges ont été ouverts pouvant accueillir jusqu’à 62.000 personnes.
Irma n’a certes pas tué à Haïti, mais il a commencé à provoquer une forte montée des eaux dans le nord-est de l’île, où de forts vents ont emporté les toitures des maisons selon la protection civile, qui a comptabilisé au moins deux premiers blessés.
A l’approche de l’ouragan, la République dominicaine était également balayée jeudi soir par des vents de 285 km/h et de fortes pluies, poussant 19.000 personnes à l’évacuation.
Dans les îles déjà frappées par Irma, les habitants décrivaient eux un spectacle de désolation.
A Saint-Martin, tout a « été soufflé » comme « par une bombe atomique », a témoigné sur la chaîne Franceinfo Dany Magen-Verge, une habitante de cette île connue pour ses plages paradisiaques, mais où plus de 60% des maisons sont désormais inhabitables.
Sur cette île franco-néerlandaise, frappée de plein fouet, le cyclone a fait quatre morts côté français, avait précisé jeudi le Premier ministre Edouard Philippe, revoyant à la baisse un précédent bilan de huit morts.
Un mort est aussi à déplorer sur la partie néerlandaise de l’île, selon La Haye.
Dans l’île française voisine de Saint-Barthélemy, très prisée de la jet set, les dégâts sont également considérables et le Premier ministre français a fait état d’une cinquantaine de blessés.
« Du jamais vu »
« On dirait presque un pays en guerre », a confié une journaliste de Guadeloupe 1re, Maeva Myriam Ponet, évoquant un « cauchemar » sur ces deux îles coupées du monde.
Le dixième mort provoqué par Irma a été recensé sur l’île de Barbuda, 1.600 habitants, frappée la première par l’ouragan et désormais « totalement dévastée » selon Gaston Browne, le Premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, territoire indépendant.
Il a estimé au passage que l’ouragan devait convaincre « ceux qui ne croient pas au changement climatique ».
L’île britannique d’Anguilla a été elle aussi entièrement rasée.
Irma a généré des vents à 295 km/h pendant plus de 33 heures, battant le record du super typhon Haiyan, qui en 2013 aux Philippines avait produit les mêmes vents pendant 24 heures.
« Une intensité d’une telle longévité, c’est du jamais vu dans le monde depuis le début de l’ère satellitaire », il y a une cinquantaine d’années, a souligné Météo France.
Quelque 1,2 million de personnes ont déjà été affectées par l’ouragan, un nombre qui pourrait grimper à 26 millions, selon la Croix-Rouge.
A Saint-Barthélemy, jeudi, les habitants commençaient déjà à déblayer les rues, inondées ou envahies par des amas de tôles et jonchées de bateaux, d’arbres balayés par les vents, de toitures arrachées et de voitures renversées.
Branson dans sa cave à vin
« On est un peu livrés à nous même, c’est la catastrophe. On attend les secours », a déclaré par téléphone à l’AFP Olivier Toussaint, un habitant de « Saint-Barth ». « On est sans eau, sans électricité. On avait fait quelques réserves, mais que pour deux trois jours, ça va commencer à être dur ».
Un pont aérien est prévu depuis l’île française de Guadeloupe pour expédier renforts, eau et matériel de secours. Il faudra « des semaines et des mois » pour un retour à la normale de l’électricité à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, a prévenu EDF, l’opérateur énergétique français.
Les Pays-Bas ont eux dépêché deux avions militaires pour apporter de l’aide à Saint-Martin. Et deux bâtiments militaires néerlandais sont également sur zone.
Necker Island, île privée détenue par le milliardaire britannique Richard Branson, a elle aussi subi des « dégâts très importants ». « Mais toute notre équipe est saine et sauve », a précisé sur un blog le patron du groupe Virgin, qui s’était réfugié… dans sa cave à vin.
Les Caraïbes pourraient ensuite subir deux autres ouragans de plus faible intensité: Jose, qui a toutefois été relevé en catégorie 3 avec des vents de 195 km/h, puis Katia.