La saison estivale est généralement synonyme de vacances, détente et farniente. Mais pour une certaine catégorie de la société, notamment les lycéens et les étudiants, c’est l’occasion de se constituer “un petit pactole”, soit pour contribuer aux dépenses de la famille, surtout en cette période de crise où la moindre rentrée d’argent est la bienvenue, soit pour se payer quelques “extras”. Pour ce faire, il n’est pas nécessaire d’être un génie : il suffit de chercher pour “dénicher” un petit job d’été.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, nombre de secteurs d’activité sont à la recherche d’une main-d’œuvre relativement “bon marché”. À Bouira et faute d’un créneau touristique attractif, les jeunes se tournent vers les secteurs du BTPH, de la restauration et des services dans le but de se “dégoter” un emploi, en attendant la rentrée sociale.
Quand le bâtiment va…
Le secteur du bâtiment à Bouira est en plein essor. C’est bien connu, quand le bâtiment va, tout va. Entre constructions publiques ou privées, les chantiers à travers les diverses localités poussent comme des champignons et le tout a besoin de main-d’œuvre, pas forcément qualifiée. Pour transporter des brouettes de sable, porter à bout de bras des sacs de ciment ou encore tronçonner des madriers en bois ou en acier, ne nécessitent pas une qualification particulière, juste une condition physique bien solide. “Je viens de passer en seconde année de droit et je me suis trouvé un job dans ce chantier (construction d’un particulier, ndlr). C’est pénible de porter des sacs de 25 ou 50 kg, mais que voulez-vous, j’ai besoin d’argent”, nous a confié le jeune Samir, 21 ans et originaire de Bouira-ville. Concernant les modalités de son “salaire”, notre jeune ouvrier fera la grimace. “Le propriétaire me donne 700 DA par jour. C’est de l’exploitation, mais bon, je n’ai pas le choix”, expliquera-t-il. D’autres jeunes rencontrés sur un chantier étatique au cœur de Bouira, qui exercent comme de simple manœuvres, évoquent un meilleur salaire, mais des conditions de travail extrêmes. “On pointe à 6h du matin et on termine à 18h, pour un salaire de 950 DA par jour”, dira Kamel, étudiant à l’université de M’hamed-Bougara de Boumerdès et originaire de la commune d’Aïn Turk. Lui et ses amis déclarent ouvertement qu’ils ne sont pas assurés et d’ailleurs, ils ne l’ont pas réclamé. “On a besoin d’argent. De plus, on ne compte pas s’éterniser ici, c’est juste pour grappiller quelques sous pour aider nos parents”, assurent-ils. En moyenne, combien gagnent ces “ouvriers” d’un temps ? Eh bien tout dépend de la période. Pour Samir, il déclare tourner aux alentours de 15 000 DA pour 20 jours de travail, tandis que ceux du chantier public, ils ont amassé en 18 jours, plus de 17 000 DA.
La restauration, une valeur sûre
L’autre créneau qui a la cote durant l’été et qui attire les jeunes désireux d’amasser un peu d’argent est celui de la restauration. Plongeur, serveur, pizzaiolo et garçon de café sont des profils très recherchés par les employeurs. C’est bien connu, en Algérie, le seul secteur qui ne connaît pas la crise, c’est celui de “la bouffe”. Tout comme pour le BTPH, aucune expérience ni qualification ne sont exigées et tout se fait à la confiance. Tahar, un jeune bachelier de 19 ans, rencontré aux abords d’une terrasse de café, au quartier des 1100-Logements de Bouira, affirmera qu’après la fin de la seconde session du baccalauréat, il s’est dirigé vers son ami qui “connaît un ami”, afin de lui proposer ses services.
“Cela fait 13 jours que je suis serveur dans cette cafète pour un salaire de 12 000 DA. Je ne vais pas vous mentir, je ne suis pas dans le besoin, Dieu merci, mais il est grand temps pour moi de découvrir la vie active et cesser de réclamer de l’argent à mes parents.” Pour Massinissa, un talentueux pizzaiolo, exerçant dans une pizzeria de la rue Foch, titulaire d’une licence en anglais et qui prépare son master, son job est avant tout une passion. “À la maison, c’est moi qui prépare des pizzas pour la famille”, confiera-t-il avec un sourire. Son poste, il l’a obtenu “par hasard”, selon lui.
“Un beau matin, je prenais mon café crème tranquillement, quand j’ai entendu mon actuel patron se plaindre du manque de gars sérieux pour sa pizzeria. J’ai tout de suite sauté sur l’occasion et je me suis proposé”, a-t-il raconté tout en précisant qu’il est assuré. Et concernant sa rémunération ? Notre interlocuteur l’estime “correcte”. “Je touche 18 000 DA, c’est mieux que rien, et puis cela va me permettre de financer mes études.” Son patron, ammi Amar, un sexagénaire, “bon pied bon œil”, s’est dit “satisfait” du boulot de sa jeune recrue, tout en l’encourageant à aller le plus loin possible dans ses études. Toujours dans la restauration, les bons vieux plongeurs sont toujours autant recherchés. Certains, à l’image d’Abdelkader, étudiant en 2e année pharmacie, a été engagé comme plongeur dans un restaurant réputé de la ville pour un salaire de 16 000 DA/mois.
Fêtes, mariages…, ça embauche à tout-va
Enfin et durant l’été, les mariages font “rage”.
À chaque jour son lot de cortèges nuptiaux. Et pour un cortège digne de ce nom, il y a des impératifs à respecter, des voitures propres et bien décorées et, accessoirement, un bon cameraman pour immortaliser le tout. C’est là un créneau pour dénicher un job comme laveur de voitures et décorateur ou bien photographe-cameraman. S’agissant des lavages, ils embauchent à tour de bras et les postulants ne manquent pas. Lors de notre virée à travers les différentes stations de lavage de Bouira, il y avait autant de postulants que de voitures à laver. Seule condition, accepter d’être régulier et… ne pas avoir peur de se salir.
Idir, un jeune étudiant en commerce, était venu postuler pour un poste dans une station de lavage du quartier de Draâ El-Bordj à Bouira. L’entretien d’embauche fut bref. “Tu dois être rapide et régulier”, lui lancera le gérant. Et de préciser : “Au moindre retard, on te trouvera un remplaçant.” Le jeune Idir lui rétorquera tout en sourire : “Pas de problème, tu veux que je me pointe à 5h du mat ?” Vint, enfin, la question de la rémunération. “Et vous payez combien ?” dira-t-il avec aplomb. “C’est à toi de voir. Ce sont 150 DA par voiture lavée ou bien 13 500 DA/mois.” Pour le jeune postulant, le choix est vite fait, c’est 13 500 DA. “La formule journalière n’est pas intéressante, je risque de tout dépenser le jour même”, justifie-t-il. Pour ce qui est des décorateurs, on les retrouve généralement chez les fleuristes de la ville. Là, par contre, il faut un minimum d’apprentissage.
Djamel, un apprenti décorateur, croisé à proximité du fleuriste situé à proximité du siège de la wilaya, admet volontiers qu’il a encore “du pain sur la planche” pour parvenir à faire une décoration digne de ce nom. En tout état de cause, les jobs d’été à Bouira ne manquent pas et peuvent constituer une rentrée d’argent assez conséquente, à condition de se donner de la peine.