L’amour version algérienne

L’amour version algérienne

Ils se tiennent par le bras ; ils marchent lentement ; ils se regardent ; leurs yeux s’enflamment, s’embrasent par ce feu intérieur qui brûle dans les abysses de leurs âmes.

Leurs doigts s’entrelacent, leurs mains fusionnent et leurs coeurs échangent des battements vifs rythmés par ce désir de posséder l’autre qui monte de leurs tréfonds.

Comme chaque jeudi, Salim et Kenza se rencontrent pour accomplir leur rituel sentimental, une promenade sur le front de mer où la grande bleue aspire leurs rêves et les soulage de la souffrance de leur séparation.

Ce désir ardent de se fondre en lui, Kenza le ressent de plus en plus fort. Et ce rêve de se réveiller chaque matin dans les bras de sa dulcinée, Salim le cultive chaque nuit.

Mais, voilà, leurs conditions sociales précaires, le chômage, le poids des traditions, l’enfer des tabous, bouchent les horizons de ce couple infortuné.

Comment s’aimer dans une société qui collectionne les barrières et les interdits ?

Cette interrogation envahit à chaque fois l’esprit de nos tourtereaux. Pourtant, peu de réponses fusent car l’intelligence du coeur est interdite par les conventions de notre société.

«On s’aime à l’algérienne», résumeront tout bonnement Kenza et Salim. Leur passion est à l’image d’une toile esquissée par les mains d’un artiste révolté.

Noire et colorée à la fois, obscure et lumineuse en même temps. Certes, les tabous et les interdits n’ont jamais étouffé l’amour.

Mieux, dans notre pays, s’aimer c’est surtout partir en guerre contre les traditions archaïques et les paradoxes d’une société «mal dans sa peau».

C’est à se demander même si l’amour à l’algérienne n’est pas en vérité toute une leçon de courage…

Abderrahmane Semmar