La culture « de circonstance » désavantage la création et la production culturelle

La culture « de circonstance » désavantage la création et la production culturelle

ALGER – La « commande » de produits culturels pour marquer des évènements ponctuels ou de circonstance est « contraire à l’essence même du fait culturel » et « nuit » à la créativité, ont estimé mercredi à Alger des cinéastes et écrivains qui croient en une « culture » et une « création populaire continue ».

Lors d’une rencontre sur le passage de la littérature au cinéma tenue dans le cadre du 19e Salon international du livre d’Alger (SILA), l’écrivain Amine Zaoui a ainsi déploré que les hommes de culture soient aujourd’hui « sollicités de façon ponctuelle », tout en supposant à l’occasion que la créativité était un « acte spontané, accessible et intégré dans la vie quotidienne des Algériens ».

Aux yeux de l’écrivain, les films et spectacles produits pour un évènement historique ou culturel « de circonstance » sont généralement « boudés » par le public, à l’exception de la littérature qui ne nécessite pas de grands moyens de production.

Pour le réalisateur Ahmed Rachedi, les cinéastes se retrouvent aujourd’hui « réduits à attendre les commandes ponctuelles de l’Etat », par ailleurs « seul producteur » dans le domaine du cinéma, pour marquer des dates historiques ou de grands événements culturels.

Les échéances fixées par les producteurs sont également, aux dires du réalisateur, une « contrainte majeure » que les cinéastes doivent souvent respecter « au détriment des normes » universelles du cinéma.

Ahmed Rachedi, qui s’est spécialisé peu à peu dans les œuvres historiques dédiées aux figures de la Révolution algérienne, a également regretté l’existence d’un « forme de censure » pour gommer le côté humain des grandes figures historiques qui devient, une pratique due, selon lui, à une sacralisation et une « glorification excessive » de ces personnages.

Evoquant l’adaptation des œuvres littéraires au cinéma, Amine Zaoui -dont le roman « Sommeil du mimosa » a été adapté par Said Ould Khelifa sous le titre « Le thé d’Ania »- a également déploré l’ « absence d’espace d’échange et de rencontres culturels », surtout à l’université qui ne connaît plus l’effervescence culturelle qui était la sienne dans les années 1970 et 1980.

Se référant à son étude sur les cafés comme lieux de rencontres culturelles productives, l’écrivain a estimé que les passerelles entre les arts et les différents domaines de création étaient aujourd’hui « pratiquement rompues ».

Ouvert au public depuis jeudi dernier, le 19e SILA se poursuit jusqu’au 8 novembre au Palais des expositions des Pins maritimes (Safex), avec d’autres rencontres dédiées à la relation entre la littérature et le cinéma.